Chapeau, Monsieur Chabrol ! - Page 7

A plus d'un titre... Au milieu des années 50, Claude Chabrol travaille comme attaché de presse pour la Fox. Chargé de rédiger les dossiers de presse, ce fan érudit de cinéma hollywoodien est parfois chargé de trouver des titres français pour les films américains. C'est lui qui imagine ainsi le titre français Derrière le miroir pour le film de Nicholas Ray Bigger than Life.

Complot de famille... Bien sûr, il fit tourner sa compagne et muse Stéphane Audran dans les années 60 et 70, et même après leur séparation (Betty, en 1992). Mais Chabrol s'entoure aussi de plusieurs proches: sa compagne après Audran, Aurore Chabrol, restera sa scripte attitrée. La fille de celle-ci, Cecile Maistre, sera son assistante sur de nombreux films, et même scénariste de La Fille coupée en deux. Chabrol donne régulièrement des rôles à son fils, l'excellent Thomas Chabrol (photo-ci-dessous, La Fille coupée en deux), et c'est son autre fils Matthieu Chabrol qui compose la musique de ses films à partir du milieu des années 80.

 Chabrol acteur. Claude Chabrol figure au générique d'une cinquantaine de films en tant qu'acteur. Il s'agit bien sûr rarement de premiers rôles (citons tout de même Alouette je te plumerai de Pierre Zucca avec Fabrice Luchini), souvent de films réalisés par ses amis (François Truffaut, Jacques Rivette, Luc Moullet) ou par lui-même. A l'évidence, devant la caméra, Chabrol s'amuse : zoophile dans Avida, il forme un couple homo avec Jean-François Balmer dans Sam suffit. Dans le tout récent Gainsbourg de Joann Sfar, il incarne le directeur de maison de disques qui lance au chanteur, venu lui faire écouter le sulfureux Je t'aime moi non plus : "Enregistrez un album ! Je veux bien aller en prison, mais alors au moins pour un 33 tours !"

De vous à moi.  Elle avait beau être son actrice-fétiche depuis Violette Nozière, Isabelle Huppert continuait de vouvoyer Claude Chabrol, qui, lui, la tutoyait. "Ca fait 30 ans qu'on a établi ce modus, je nous vois mal en changer pour les 30 ans à venir", confiait-elle en 2009, en souriant, au micro d'AlloCiné.

Snobé ? Cinéaste français par excellence, Claude Chabrol n'a pourtant jamais reçu le moindre César : malgré une oeuvre prolifique, il a été nommé à seulement deux reprises, pour Une Affaire de femmes et La Cérémonie, ce dernier film permettant tout de même à Isabelle Huppert de remporter un trophée. Avec le Festival de Cannes, les rapports n'étaient pas tellement meilleurs : seuls Violette Nozière et Poulet au vinaigre eurent les honneurs d'une sélection officielle. Et la seule récompense obtenue, c'est encore un Prix d'interprétation pour Isabelle Huppert en 1978 ! Plus habitué aux festivals de Venise et de Berlin, le réalisateur recevait en 2009 dans la capitale allemande la prestigieuse et honorifique Berlinale Camera pour l'ensemble de sa carrière.

Tel est Chabrol. Curieux de tout, Chabrol ne méprisait pas le petit écran. Lui-même téléspectateur (il était notamment friand de jeux télévisés), il a signé des dizaines de films pour la télévision. Il a par exemple tourné dans les années 80 plusieurs enquêtes de l'Inspecteur Lavardin (avec Jean Poiret, qui incarne aussi au cinéma cet enquêteur fine gueule) et des épisodes d'une série Fantomas avec Helmut Berger dans le rôle-titre en 1980. Il a aussi mis en scène des adaptations de nouvelles de Henry James dans les années 70, d'une pièce de Strindberg (La Danse de mort en 1980), d'un classique de Goethe (Les Affinités électives, en 1982) ou de récits de Maupassant, diffusés avec succès sur France 2 entre 2007 et 2009. Sans parler des innombrables interventions de ce "bon client" sur les plateaux des talk-shows les plus variés...

Le témoignage de Bernard Le Coq (interview réalisée en 2009 par Claire Varin)