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    Andréa Bescond et Eric Métayer présentent Quand tu seras grand, leur émouvant nouveau film après Les Chatouilles
    Vincent Formica
    Vincent Formica
    -Journaliste cinéma
    Bercé dès son plus jeune âge par le cinéma du Nouvel Hollywood, Vincent découvre très tôt les œuvres de Martin Scorsese, Coppola, De Palma ou Steven Spielberg. Grâce à ces parrains du cinéma, il va apprendre à aimer profondément le 7ème art, se forgeant une cinéphilie éclectique.

    Quand tu seras grand, nouveau long-métrage du tandem Andréa Bescond / Eric Métayer, débarque en salles le 26 avril. Rencontre avec le duo de réalisateurs à qui l'ont doit notamment Les Chatouilles.

    Après le succès des Chatouilles en 2018, récompensé par les César du Meilleur scénario adapté et de la Meilleure actrice pour Karin Viard, Andréa Bescond et Eric Métayer sont de retour derrière la caméra.

    Cette fois, le duo nous emmène au coeur d'un EHPAD dans Quand tu seras grand. On y suit Yannick (Vincent Macaigne), aide-soignant dans cette maison de retraite. Entre pression permanente et restrictions budgétaires, il fait face aux manques de moyens avec une bonne humeur contagieuse.

    Mais lorsqu’on lui impose de partager le réfectoire avec une classe d’enfants, la situation se complique. Leur arrivée ainsi que celle de son animatrice, Aude, va bousculer le quotidien de tous et surtout des résidents...

    À l'occasion de la sortie du long-métrage le 26 avril, AlloCiné a rencontré le tandem Andréa Bescond / Eric Métayer.

    Quand tu seras grand
    Quand tu seras grand
    Sortie : 26 avril 2023 | 1h 39min
    De Andréa Bescond, Eric Métayer
    Avec Vincent Macaigne, Aïssa Maïga, Evelyne Istria
    Presse
    3,1
    Spectateurs
    2,8
    louer ou acheter

    AlloCiné : Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans ce projet après le succès des Chatouilles en 2018 ?

    Andréa Bescond et Eric Métayer : On a une quelqu'un dans notre famille qui a été placée, on a eu l'occasion d'aller à l'Ehpad ; nos enfants étaient petits et on s'est rendu compte de l'impact super positif qu'ils généraient sur les personnes âgées et vice versa. Donc, on passait toujours des bons moments quand même.

    On voyait les personnes âgées s'animer énormément au contact des enfants.

    On voyait les personnes âgées s'animer énormément au contact des enfants. On s'est dit qu'il y avait quelque chose à raconter. D'abord, ça a été ça. Et puis ensuite, on a toujours été touchés l'un comme l'autre par les conditions de travail du personnel soignant avant la crise sanitaire, pendant et puis après, malheureusement, ça n'a pas trop changé.

    On voulait rendre hommage au personnel soignant avec nos petits moyens de cinéaste.

    Donc ça aussi, on voulait leur rendre hommage avec nos petits moyens de cinéaste, mais en tout cas, s'approcher au plus près de la véracité de leur contexte professionnel, de leur vocation.

    Bestimage
    Andréa Bescond / Eric Métayer

    Pourquoi avoir choisi ce titre, Quand tu seras grand ? C'est important, un titre. Ça intrigue, ça interpelle.

    Il y a un peu deux version versions, d'abord celle de se dire que quand tu seras grand, c'est un peu ne pas attendre le moment où quand on sera grand pour essayer de faire quelque chose, d'exister et de voir ce qu'est la vie. Parce que la vie passe tellement vite et si on attend, c'est le moment où on va perdre pas mal de choses.

    C'était pour appuyer le moment présent, finalement. Ça aurait pu être Carpe Diem. Tu entends toujours quand tu seras grand et finalement, tu l'auras jamais.

    Ce qui m'a interpellé aussi dans le film, c'est la justesse de l'écriture et de ces personnages qui sont très réalistes. Comment avez-vous travaillé le scénario ?

    D'abord, on travaille beaucoup à l'oral et puis ensuite, en ce qui concerne le personnel soignant, par exemple, on s'est vraiment documentés. On a vraiment travaillé notre sujet autour des aides soignants, des auxiliaires de vie. On a regardé pas mal de documentaires, lu des témoignages.

    Ça nous a quand même apporté du concret, puisque tout ce qu'on dit est réel dans le film, quand on parle des deux couches par jour par résident ou des six personnes âgées sur des dix qui vont être visitées ou pas, bref, tout ça c'est du concret. Donc, on a travaillé avec du concret. Après, on a voulu faire un film de cinéma.

    Plus précisément, comment ça se passe quand vous vous mettez devant votre ordinateur ? On se dit, "Là, il faut qu'on trouve des scènes comiques, établir un équilibre avec le drame..."

    C'est compliqué, je trouve. C'est un mélange entre quelque chose qui est la vie telle qu'elle est, mélangée de rire. C'est pas obligatoirement une fabrication pure et simple, on ne se dit pas : "Ça fait déjà dix minutes qu'on est dans un truc dur, on va se mettre une scène comique." Le mélange se fait de lui même.

    Par exemple, sur une scène comme celle de la cuisine, on va avoir quelqu'un comme Vincent Macaigne qui va tout d'un coup avoir un rapport de "Tu devrais aller voir des gens là haut qui sont en souffrance." On peut avoir un petit sourire et de l'autre côté, on a une vraie phrase sur un truc plus social... On a envie de dire des choses à ce moment là.

    À un moment donné, on peut évidemment rentrer dans un truc très technique qui est assez lourd et très dense. Qu'est ce qu'on pourrait faire pour que tout d'un coup, ça le soit un peu moins...

    2022 - LES FILMS DU KIOSQUE - Renaud KONOPNICKI

    Après, je trouve que ce film là était très compliqué à monter, pour trouver cet équilibre dont vous parlez. Il s'est énormément travaillé au montage, des scènes qui étaient normalement écrites pour le début se retrouvaient à la fin. On a quand même bien réfléchi à l'équilibre émotionnel du récit.

    Il y a beaucoup de choses qu'on a coupé du scénario car on a explosé au minutage au tournage et qu'on s'est dit "Non, ça, ça n'a plus lieu d'être, de toute façon, on est trop longs", etc. Donc, qu'est ce qu'on choisit de raconter ?

    Comme on a choisi de raconter le spectre humain, la richesse de la vieillesse, de toutes les générations et notamment dans un huis clos d'EHPAD, il fallait pouvoir basculer entre drame et comédie pour apporter des respirations, mais aussi l'émotion nécessaire, parce qu'on ne pouvait pas passer à côté des sujets.

    Il fallait pouvoir basculer entre drame et comédie pour apporter des respirations, mais aussi l'émotion nécessaire, parce qu'on ne pouvait pas passer à côté des sujets.

    Je me souviens notamment que sur la fin, en deuxième partie de récit, quand on commence à basculer un peu plus dans le drame, à un moment, en montage, on s'est dit "Oui, mais c'est trop." Comment on peut ramener de la fantaisie du quotidien là dedans ? Il a fallu qu'on se creuse la tête.

    Là, il y a eu l'idée de faire venir le bureau des soignants, le cri qui était au début qu'on a mis à la fin. Il y a eu un gros travail de rééquilibrage au niveau émotionnel dans ce film au montage. À l'écriture, l'histoire était linéaire. Au montage, après, on se rend compte qu'on n'a plus envie de raconter le même film.

    Pourquoi avez-vous choisi Vincent Macaigne, pour son talent à être à l'aise dans le registre comique autant que dramatique ?

    Oui, c'était très important que le personnage de Yannick soit interprété par un acteur qui ne soit pas trop premier degré, puisque le personnage peut être un peu chiant au départ, sur le papier. On se dit, mais c'est quoi ce psycho-rigide ?

    Mais en même temps, interprété par un Vincent Macaigne qui a cette douceur dans la voix, qui a cette solarité, ça donne un Yannick, à fleur de peau certes, mais quelqu'un d'hypersensible, d'investi, de généreux et qui n'est pas un connard.

    C'était très important que le personnage de Yannick soit interprété par un acteur qui ne soit pas trop premier degré.

    Ce qui était d'emblée très, très important, il fallait que le public comprenne dès les premières secondes que c'est un chouette mec, vraiment. En dépit du fait que d'emblée, il dit non à tout.

    C'est un bon gars, mais ça comptait pour nous, que ce soit pour le personnage de Aude ou le personnage de Yannick, qu'ils soit interprétés par des comédiens extrêmement solaires et sensibles.

    2022 - LES FILMS DU KIOSQUE - Renaud KONOPNICKI
    Vincent Macaigne

    Je trouve que ça marche très bien car au début, Aude et Yannick sont totalement opposés et vont finalement se trouver des points communs...

    Tout à fait, et on voulait rendre hommage à l'amitié aussi. Comment les gens se confient des choses, comment ils vont s'apporter des choses alors qu'à la base, comme vous le dites, ils peuvent pas se sentir et qu'au fur et à mesure, ils se rendent compte qu'ils sont dans le même bateau.

    Cette violence institutionnelle touche tout le monde, tous les corps de métier et ils sont dans le même bateau. On n'avait pas envie d'un récit avec deux personnes qui ne se supportent pas pendant tout le film et à la fin, soit ils deviennent copains, soit ils s'aiment. On aurait pu imaginer qu'il y ait une histoire entre eux.

    Cette violence institutionnelle touche tout le monde, tous les corps de métier.

    Là, tout d'un coup, je trouvais ça intéressant qu'on court directement dans le milieu en disant "Je suis désolé, je me suis gourré." On passe à autre chose. C'était pas l'intérêt de l'histoire de se dire "On va faire tenir tout le truc là dessus."

    C'était simplement un moment de vie où tout d'un coup, comme dans la vie, il y a quelqu'un qui fait "Je me suis gourré. Tant pis. Désolé."

    Sur le travail avec les enfants, comment on crée une complicité avec les personnes âgées sur le plateau ?

    Pour le groupe d'enfants, on avait six petits protagonistes. Il y a vraiment Kristen Billon qui joue Brieuc, et puis il y en avait cinq qui gravitaient autour de lui avec des petites répliques par ci, par là. Donc ces six là, on a créé un groupe et on les a mis comme dans une colonie au cinéma. Ils vivaient juste à proximité du tournage.

    Et le reste des enfants, c'est tout un groupe de loisirs qui sont potes déjà de l'école, etc. Après, le but sur un plateau, c'est surtout de mettre tout le monde à l'aise. Je crois que c'est la meilleure direction d'acteurs possible, c'est d'essayer de mettre tout le monde à l'aise, tout le monde dans son propre potentiel et d'être plus à l'écoute que l'inverse.

    En plus, quand on tourne avec des enfants, c'est quatre heures par jour de plateau, comme vous l'avez souligné, avec beaucoup de personnes âgées, etc. C'était quand même des plateaux lourds et techniques. Après, c'est d'aller au plus près de l'enfant, il me semble. Je ne sais pas, Eric, ce que tu en penses, mais moi, il me semble que c'est vraiment les mettre le plus possible à l'aise.

    Ils prennent ça pour un jeu, c'est ça le secret ?

    Non, je pense qu'ils savent très bien ce qu'ils sont en train de faire. Ils sont en train de tourner un film. Ils avaient très bien compris ce qu'ils étaient en train de faire. Parce que là, on n'est pas en train de les filmer comme dans un documentaire, ils savent qu'on va refaire cinq, six, sept fois la même chose, le même déplacement, le même truc.

    Et il n'y en avait aucun qui était en train de ne pas comprendre qu'on était dans un film. Donc, il n'y avait pas de problème avec ça. C'est plus le problème de la gestion, de la totalité qui est compliqué. Mais anciens ou enfants, ils avaient une compréhension de ce qu'on était en train de faire et de ce qu'on tournait.

    Après, vous avez 35, 40 personnes sur le plateau en figuration et en comédiens, ça commence à être beaucoup plus compliqué à monter.

    Cette violence institutionnelle touche tout le monde, tous les corps de métier
    Aïssa Maïga

    Et vous avez pris des personnes qui vivaient vraiment dans des EHPAD ? Comment ça s'est passé ? Vous avez tourné dans un vrai EHPAD, je crois ?

    On a tourné dans un EHPAD désaffecté, mais toutes les figurantes et figurants, c'était des résidents d'EHPAD du coin. Le personnel soignant aussi, hormis les acteurs et les actrices, évidemment, mais il y a quand même pas mal de personnes en figuration qui pouvaient nous conseiller aussi sur la précision des gestes des comédiens qui interprétaient le personnel soignant.

    C'est un mélange de personnes lambda, si j'ose dire, avec des acteurs et des actrices professionnelles, notamment les personnes âgées. On ne voulait pas de grosses têtes d'affiche à la André Dussollier.

    Et on est allés chercher des acteurs de théâtre très forts, très doués, qui ont beaucoup de métier derrière eux, mais qui ne sont pas tout à fait reconnus de grands publi. On se permettait d'aller au plus près du réel.

    Sur le plateau, comment décidez-vous de la manière dont vous allez filmer telle ou telle scène ?

    Ça, c'est en amont. On n'attend pas le jour-même pour le faire. Après, on peut toujours discuter avec notre chef-opérateur pour se dire "Écoute, on peut avoir une proposition qui est différente de ce qu'on avait." On écoute, puis on voit. Puis après, on va faire "C'est vrai, ce n'est pas con ça tiens."

    Sinon, en grande majorité, c'est vraiment de la préparation avant ; en plus on était dans un décor unique pratiquement, à part deux ou trois sorties à l'extérieur.

    Les mouvements de caméra, quand on est venu visiter le truc, on avait déjà par exemple l'envie de faire le mouvement dans le couloir, c'était des choses qu'on avait déjà envisagées. Donc, tout est fait un peu avant, et puis, il y a toujours l'impondérable ou la surprise.

    Généralement, au découpage, tu décides si tu vas faire un plan séquence ou un plan découpé. Et des fois, au tournage, tu vas faire ton plan séquence et tu vas dire "On va quand même faire deux autres plans, histoire de se couvrir." Généralement, si ton plan séquence marche, tu es content.

    Dernière petite question sur la bande-originale composée par Rob. Pourquoi l'avoir choisi ?

    C'est vraiment Rob qui a rencontré le film de manière exceptionnelle, vraiment. Il a un très grand talent. On a commencé à collaborer avec le musicien car on a eu des petits soucis justement avec un autre compositeur. À la base, on ne travaillait pas avec Rob, ce n'était pas avec lui que c'était prévu.

    Et finalement, on a appelé Rob un peu comme ça en urgence, "Écoute, voilà, il paraît que tu aimes bien notre travail." Il avait adoré Les Chatouilles et voulait qu'on lui envoie Quand tu seras grand. Ça fait toujours un peu peur d'envoyer ton film quasiment terminé, sans aucune musique, à quelqu'un qui a adoré ton premier film.

    C'est vraiment Rob qui a rencontré le film de manière exceptionnelle, vraiment. Il a un très grand talent.

    Il a eu une révélation, vraiment, et il est arrivé avec 14 morceaux, deux jours plus tard, dont le thème. C'était très impressionnant. C'est quelqu'un de très écléctique, il a une culture musicale très large. Il y a des gens qui ont des grands talents, mais qui sont dans un créneau musical bien précis.

    Lui, il peut mélanger les styles. Il peut tout d'un coup mettre un instrument ancien en plein milieu d'une musique répétitive à la Philip Glass, c'est étonnant. C'est un mélange. C'est quelqu'un de très fort à ce niveau là.

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