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    "A dirty shame" : rencontre avec John Waters

    Nous avons rencontré le plus déjanté et impertinent des réalisateurs américains : John Waters, dont la comédie "A dirty shame" sort ce 8 juin...

    AlloCiné : Il y a quelques années, vous avez dit que vous aimeriez réaliser un film porno avec des acteurs célèbres, avez-vous toujours cette idée en tête ?

    John Waters : Ce ne serait pas un vrai porno, parce que je suis toujours gêné par ce genre de scènes. Vous savez, c'est très embarassant de demander à un acteur de se mettre dans une position particulière. On a toujours l'impression d'être un pervers : "Pourrais-tu heu...". Oh mon Dieu ! Mais dans ce film, les scènes de sexe étaient tellement ridicules qu'il était difficile de ne pas rire quand on les tournait. Donc c'était bien. Mais je ne ferai jamais un vrai film porno, ce serait trop gênant. Il y a plus de trente ans, j'ai loué ma maison à une équipe de tournage pour réaliser un film porno. Je pensais que ce serait amusant d'assister au tournage. Mais j'étais mortifié ! C'était vraiment très embarassant. Alors non, je ne tournerai probablement pas ce genre de film, parce qu'un porno ressemble toujours d'une certaine façon à une opération à coeur ouvert (rires) ou à un film médical quand vous les regardez.

    Oui, ce n'est pas sexy du tout...

    Je pense que la pornographie peut être sexy mais pas dans une salle de cinéma, je crois que ça l'est pour... d'autres raisons... (sourire)

    Il vous arrive de jouer dans certains films, votre dernier rôle était celui d'un paparazzi teigneux dans "Le Fils de Chucky", avez-vous aimé cette expérience ? Et voudriez-vous recommencer ?

    J'adore les Chucky, je suis un vrai fan de chaque film. J'ai tout fait pour être dans cette suite, j'en parlais en interview. Quand on me demandait dans quel film je voudrais jouer, je répondais Chucky ! J'aurais accepté quelque soit le réalisateur. Le tournage fut très amusant mais le film était tourné à Bucarest. Un long chemin à parcourir pour être tué dans un film ! Mais j'ai vraiment aimé l'expérience, j'adore le réalisateur, Don Mancini. Et Chucky a enfin 18 ans ! Je le trouve très beau. (sourires)

    Revenons à "A dirty shame", Selma Blair y porte d'énormes prothèses mammaires. Pourquoi sont-elles si grosses ? Est-ce une façon de vous moquer de Pamela Anderson ?

    Non ! J'adore Pamela Anderson. Je la trouve superbe. Elle a son propre style. D'ailleurs elle sort maintenant avec Stephen Dorff, qui jouait dans un de mes films, Cecil B. DeMented. Vous voyez, le show-business peut-être si satisfaisant ! En fait, dans les films porno il y a beaucoup de femmes qui ont ces poitrines géantes. Il y a même des films spécialisés : les "tit movies" (films de nichons, NDLR). Et j'ai toujours été fasciné par ce phénomène. Quel docteur oserait pratiquer de telles opérations ? Est-ce légal de transformer quelqu'un en monstre de foire de cette façon ? Je conçois que dans ces pornos, ces femmes jouent des actrices, des strip-teaseuses ou des prostituées mais comment font-elles dans la vraie vie, au quotidien ? C'est ce qui me fascine le plus. Alors très bien, elles ont ces seins énormes, mais elles doivent toujours aller faire leurs courses, faire des choses banales. Et c'est ce qui m'a donné l'idée de la partie du film, où Selma redevient une "ordinaire" (ndlr : dans le film, les accros au sexe se battent contre les "ordinaires" qui prônent le retour à la décence). Elle s'habille à la façon de Laura Ashley (des vêtements comme ceux portés dans La Petite Maison Dans La Prairie). D'ailleurs ces femmes doivent se faire faire des vêtements sur mesure, rien ne leur va sinon ! Il y a leur tenue de scène bien sûr, mais à part ça ? Par exemple, elles ne pourraient pas porter de col roulé (rires). Pourtant je trouverais ça sexy. Mais aucune de ces femmes ne le fait. Dans le film justement, j'ai voulu que Selma porte aussi des robes qui remontent jusqu'au cou, ce que ces femmes ne feraient jamais. Pourquoi accepter de dépenser autant d'argent pour des seins énormes si c'est pour les cacher ? De plus, c'est vraiment inconfortable, elles sont obligées de dormir sur le dos.

    Dans A dirty shame", tous les accros au sexe ont chacun leur spécialité sexuelle, quelle serait la vôtre ?

    Je ne pense pas être un accro au sexe ! Donc heureusement ma spécialité n'est pas vraiment définie. Je suis un peu plus sujet à l'interprétation. En matière de sexe, il n'y a pas une seule et unique chose que je sache faire ! Je n'ai jamais essayé la plupart des choses que l'on voit dans le film. Comme par exemple, étaler de la nourriture sur mon corps. C'est pas mon truc, ou s'habiller comme un bébé, ou encore lécher le sol. J'ai bien essayé une partie à trois, mais je n'ai pas aimé. Car dans ce genre de plans, si vous et votre partenaire demandez à un troisième de faire l'amour, c'est que votre couple ne va pas très bien. Et si vous êtes cette troisième personne, l'un des deux autres doit être fou ! (rires). Donc il n'y a rien d'amusant dans le triolisme. On ne peut pas se concentrer (rires). Voyons quels sont les autres fétichismes possibles... Ah, clairement, je ne suis pas un "ours" ! (NDLR: "bear" : homme costaud, poilu et homosexuel) je suis un vieux largué en fait...(rires)

    Johnny Knoxville a un charisme indéniable dans votre film, que pensez-vous de sa performance dans le film ?

    J'adore Johnny Knoxville. Je pense qu'il tenait à être sérieux et jouer le mieux possible dans le film. Je l'adore dans la vraie vie aussi, c'est un type génial. C'est comme si je l'avais toujours connu. J'aurais pu traîner avec lui à Baltimore toute ma vie. Et il convenait parfaitement au personnage. Pendant le tournage à Baltimore, il y avait toujours un groupe de fans devant sa loge. Une fois l'un deux a demandé s'il pouvait le prendre en photo, et Johnny a accepté. Mais il a remarqué que pendant ce temps-là, l'un des fans essayait de voler sa radio (rires). Johnny a réussi à la récupérer, mais le voleur s'est enfui et s'est fait renverser par une voiture. C'était dramatique. Moralité : on doit surveiller les fans à Baltimore, ils essaient de voler vos affaires pendant que vous signez des autographes !

    Justement, pourquoi tournez-vous toujours vos films à Baltimore ?

    Parce que je vois cette ville comme un personnage à part entière de mes films. C'est un second rôle. Les gens ont l'air "vrai" là-bas. Ils ne ressemblent pas à des acteurs de sitcom. De plus je suis très inspiré par Baltimore. En effet tout le monde croit être normal là bas, mais je pense qu'ils sont complètement dingues.

    Dans "Polyester", vous aviez projeté le film en odorama, et dans "A dirty shame", vous utilisez de nombreux messages subliminaux. Vous aimez jouer avec la perception des spectateurs ?

    Oui, les messages subliminaux sont une blague, un clin d'oeil que je fais au public. C'est une référence à mon enfance dans les années cinquante, où l'on disait que ces messages hypnotisaient les gens à des fins politiques. Donc ici, c'était juste un autre gag du film.

    Propos recueillis par Louisa Amara le 04 mai 2005

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