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    "American Gangster" par Russell & Denzel

    Le flic et le voyou. Douze ans après "Programmé pour tuer", Russell Crowe et Denzel Washington se retrouvent face à face dans l'événement "American Gangster" de Ridley Scott. Rencontre.

    Comment comparer "American Gangsters" avec les autres films de gangsters new-yorkais comme "Le Prince de New York", "Le Parrain",... ?

    Denzel Washington : Et bien la grosse difference c'est que ce ne sont pas des films avec des gangsters black ! Et ça, c'est vraiment la grosse différence. C'est vraiment un film unique sur un gangster de Harlem, de son apogée à sa chute... C'est le regard sur une tranche de la société que l'on n'a pas l'habitude de voir dans le cinéma hollywoodien. Evidemment, pour le reste de l'histoire et des circonstances, c'est similaire aux autres films de gangsters.

    Que pensez vous du vrai Frank Lucas, le gangster que vous incarnez. Il a passé presque tout son temps sur le tournage, n'est ce pas ?

    Oui, Frank est un homme passionné et il tenait à ce que son histoire soit la plus authentique possible à l'écran : c'est sans doute pour cela qu'il a passé beaucoup de temps sur le tournage. Disons que Frank est un homme "touché" par la fatalité de son destin. C'est quelqu'un qui a vu son cousin assassiné à l'age de 6 ans par des membres officiels du gouvernement et cela a changé à jamais sa vision des choses et son manque de respect pour les lois et le gouvernement. Dès son plus jeune âge, il est tombé dans une vie de criminalité, pleine de vols et de violence. A son arrivée à Harlem, il est tombé sous le parrainage du plus gros gangster de l'époque et il a "surpassé" très vite son maître. C'est un génie du crime et il est coupable de nombreux meurtres. Et il a fini par payer sa dette envers la société. Je pense que dans une certaine mesure, il ne pouvait pas échapper à son destin, de par l'environnement dans lequel il a grandi. Certes il est coupable mais je ne pense pas qu'il aurait pu faire autrement. Je crois que s'il avait emprunté une voie différente, fait des études, sans traîner dans la rue, il serait devenu un businessman hors pair. D'ailleurs, il a maintenant un fils de 12 ans qui est un jeune homme brillant et qui aura un avenir lumineux. Donc c'est primordial d'avoir une éducation et de grandir dans un environnement sain et positif.

    Et puis il s'agit de trouver la foi, la force en soi de se prendre en main et de continuer le combat de la vie. Qu'est ce qui vous pousse, vous, à continuer ce combat ? Qu'est-ce qui vous inspire chaque matin à vous lever et poursuivre votre chemin ?

    Quelle belle question! C'est tout un programme ! Et bien une chose est certaine, c'est que j'ai pris en main à nouveau mon destin en décidant de passer derrière la caméra. Je suis en train de réaliser mon second long métrage et c'est comme si une nouvelle vie s'offrait à moi. Mais le vrai miracle de la vie, de ma vie, ce sont mes enfants, ma famille. C'est vraiment le vrai moteur de ma vie, ce pourquoi je continue, la joie de vivre qui me tient en apesanteur dans cette ndustrie si dure et si compliquée. Vraiment, je suis reconnaissant à la vie, à Dieu, d'avoir le destin qui est le mien.

    Est-il difficile de dire qui est le Diable et qui est Dieu dans ce film ?

    Oui c'est une réponse délicate que de juger totalement négativement mon personnage quand, selon lui, il croit s'occuper de sa famille, protéger sa communauté et vouloir accéder au rêve Américain. C'est un personnage ni noir, ni blanc mais qui traverse des zones de gris pendant tout le film. C'est quelqu'un qui oscille en effet entre l'enfer et le paradis. Mais en fin de compte, il est coupable de suffisamment de choses qu'il est normal que son destin bascule...

    Ce personnage est une sorte d'anti-héros : est-ce que vous avez hésité à jouer ce rôle afin de protéger l'image "positive" que l'on a de vous au cinéma?

    Non, pas du tout, aucune hésitation de ma part ! Je crois que mon public apprécie que je ne joue pas toujours le même héros et que je prenne des risques. Et pour moi, en tant qu'acteur, c'est un défi de passer d'un type de personnage à un autre sans jamais me répéter. C'est vrai qu'il a fallu que j'attende Training Day pour jouer des hommes aux couleurs sombres et violentes. Mais c'est quelque chose que j'avais toujours voulu faire. En fait, il s'agit de trouver le bon script et le bon réalisateur et ensuite tout se met en place d'une façon naturelle. Encore une fois, je pense que le public m'aime autant en gangster qu'en bon père de famille...

    Que pensez-vous du monde des gangsters à l'époque de Frank Lucas, et celui d'aujourd'hui ?

    Je pense qu'il y a une difference énorme. A l'époque, les gangsters avaient une vraie vie de famille et avaient un code d'honneur. Ils respectaient le territoire des uns et des autres. Il faisaient certes un business honteux, celui de la drogue, mais il y a avait une notion d'ordre entre ces voyous. Aujourd'hui tout est chaotique, on tue des enfants dans la rue, les "drive by shootings" comme on les appelle. Il n'y a plus d'ordre, c'est chacun pour soi, c'est le chaos total, la violent totale et le règne désorgnisé des gangs qui s'affrontent dans un bain de sang permanent. C'est effrayant ce qui se passé aurjourd'hui et combien de jeune garçons, d'à peine 10 ans, se rallient à un gang et commencent une vie de violence qui les mènera à coup sûr au cimetière...

    Et que pensez vous des rappeurs qui jouent les gangsters au cinéma et qui font des albums sur le mode de vie gangsta à la ville ?

    Je pense qu'ils peuvent faire les deux. Je peux moi même jouer un gangster et puis jouer Jules César dans une pièce de Shakespeare comme je l'ai fait il y a deux ans. Je ne porte pas de jugements sur les rappeurs, je pense que ce sont comme moi des gens aux talents multiples. Et puis j'aime certains de ces albums dits "gangsta", comme America's Most Wanted : c'est mon album de rap favori.

    Propos recueillis par Emmanuel Itier à New York en octobre 2007

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