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    Streaming, téléchargement direct : heurs et malheurs de la Hadopi

    Créée pour tenter d'enrayer le phénomène du téléchargement illégal, l'Hadopi vise avant tout les réseaux peer-to-peer. Mais laisse de côté plusieurs autres moyens d'échange, de plus en plus prisés des internautes, qui passent ainsi entre les mailles du filet.

    Créée pour enrayer le phénomène du téléchargement illégal, l'Hadopi vise avant tout les réseaux peer-to-peer (P2P) mais laisse de côté plusieurs autres moyens d'échange, de plus en plus prisés des internautes qui passent ainsi entre les mailles du filet. Lorsque la loi Hadopi fut votée, ses détracteurs historiques, notamment l'association "la Quadrature du net", n'avaient alors pas manqué de souligner avec force que, dès le départ, l'organisme était condamné à essayer de vider un océan avec un seau d'eau...

    Parmi les bénéficiaires de l'"effet Hadopi" figurent les sites de téléchargement direct. Ils permettent de récupérer un film, une musique ou un jeu sur un serveur le plus souvent situé à l'étranger, rendant d'autant plus difficile l'obtention de l'IP du "pirate". Cette adresse IP, visible dans le cadre du P2P, sert à identifier un internaute sur la toile et est indispensable pour déclencher la riposte graduée. Ainsi, l'utilisateur soupçonné de récupérer illégalement du contenu sur internet reçoit un premier mail d'avertissement, puis un deuxième et une lettre recommandée s'il récidive dans les six mois. A la troisième infraction, il risque une amende et une suspension de son abonnement pouvant aller jusqu'à un mois, sans possibilité d'en souscrire un autre, pour "négligence caractérisée", selon les termes de la loi.

    Le téléchargement direct contourne les obstacles

    Le téléchargement direct permet de contourner cet obstacle. Preuve de sa popularité croissante, la fréquentation des sites spécialisés explose depuis plusieurs mois. Ainsi, le site hong-kongais Megaupload.com a vu le nombre de ses visiteurs français passer de 350.000 par mois, en août 2008, à plus de 7,4 millions en novembre 2010, selon des données du cabinet ComScore, qui mesure l'audience sur internet, relayées par le blog technotes du figaro.fr. En un an, la hausse s'élève à 35%. Un chiffre loin, très loin d'être négligeable.

    Facteur aggravant pour la structure Hadopi : le streaming, le visionnage d'un film ou d'un épisode de série ou l'écoute d'un son en continu, ainsi que les newsgroups, des serveurs hébergeant des fichiers, n'entrent pas non plus dans son champ d'action. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, on apprend que le terme "Streaming" s'est d'ailleurs hissé au 3e rang dans le classement des requêtes les plus populaires en France en 2010, dans la catégorie "divertissements", derrière "youtube" et "tv programme".

    "Pour l'instant, ce qui se dit, c'est qu'il y a une migration. Est-ce qu'on l'a constatée ? Non" avait expliqué en décembre dernier Eric Walter, secrétaire général de l'Hadopi, lors d'une réunion privée à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD). Et d'ajouter : "Dire qu'il y a une migration ne veut pas dire qu'il y a un effet Hadopi chez le téléchargeur illégal. Cela veut dire en revanche -et cela remonte avant Hadopi- qu'il y a de plus en plus de solutions technologiques pour échanger, accéder à des données". Des propos qui, s'ils ne sont pas faux, loin de là, relèvent quand même un peu de la méthode Coué...

    Un premier bilan chiffré de son activité : 70.000 mails en 2010

    Ce matin, la Hadopi a tenu une conférence de presse, très attendue d'ailleurs, et s'est livrée pour la première fois à un bilan de son activité. Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la Commission de la protection des droits, a annoncé que l'organisme a procédé depuis sa création à l'envoi de 70.000 avertissements en 2010. Après une montée en charge toute progressive, les avertissements sont désormais envoyés au rythme de 10.000 par semaine, soit 2000 par jours ouvrés. Un peu moins de 70% des demandes d'identification d'adresses IP adressées aux FAI auraient abouti à un envoi d'avertissement. Selon les propos de madame Quaretta, rapportés par le site Numerama, celle-ci "a reconnu "ne pas savoir si les recommandations sont lues par l'abonné, mais aussi que la plupart des réactions consistent à demander quelle oeuvre aurait été piratée".

    Une montée en charge teintée de pessimisme

    En 2011, la Hadopi espère une montée en charge significative, de l'ordre de 10.000 mails par jour. Ce n'est du reste pas vraiment une surprise, dans la mesure où ce chiffre correspond à l'objectif initial fixé. De même, les premiers avertissements sous forme de lettres recommandés, qui correspondent au palier 2 de la gradation des mesures prises par la Hadopi, devraient être envoyés cette année.

    Si le volet répressif incarne le bâton de la Hadopi, l'organisme fondait beaucoup d'espoirs sur une carotte de choix pour les internautes : le développement de l'offre légale. Mais "l'autorité administrative ne semble", toujours selon Numerama, "pas être très optimiste, sans doute consciente que son action arrive déjà beaucoup trop tard par rapport aux pratiques qu'elle ne peut contrôler". La Commission de Protection des droits estime qu'il faudra attendre environ 18 mois pour évaluer véritablement son action, et décider s'il y a lieu, ou non, de poursuivre son action. 18 mois, autant dire une éternité à l'ère des réseaux.

    Olivier Pallaruelo avec AFP, PCInpact et Numerama

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