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    "La Dame de fer" : interview avec Meryl Streep

    Meryl Streep, actuellement au cinéma dans "La Dame de fer", revient sur son rôle de Margaret Thatcher, sa préparation et son point de vue sur cette personnalité politique très controversée.

    AlloCiné : Quel type de recherches avez-vous fait pour incarner Margaret Thatcher ? Car cette performance est bien plus que l’apparence, il y a aussi le jeu, la posture…

    Meryl Streep : J’ai regardé beaucoup d’images d’archives, et pour moi, le plus grand défi était de pouvoir énoncer les longues tirades qu’elle avait l’habitude de faire, sans même reprendre son souffle. Même avec tout l’entrainement que j’ai eu lors de ma formation, j’ai eu beaucoup de mal à faire cela.

    Et cela avait une incidence sur qui elle était en tant que personne, sa manière de galvaniser les gens, sa capacité à parler avec conviction, et ce sans s’arrêter, sans reprendre son souffle. Et le fait de ne laisser personne lui couper la parole. Elle avait une grande maitrise des interviews. Et j’en prends note d’ailleurs.

    Préférez-vous jouer des personnes ayant réellement existé ou des personnages de fiction où l’interprétation est parfois plus libre ?

    Puisque presque 40% du film, j’interprète une Margaret Thatcher que personne n’a jamais vu ou que personne n’a pu connaitre, on a pris une voie imaginaire. Donc j’ai ressenti beaucoup de liberté. Je me suis sentie très libre, et cela grâce au choix de la réalisatrice (Phyllida Lloyd) et son parti pris qui consistait à montrer trois jours dans la vie d’une vieille dame, et une des « turbulences » qu’elle traverse –devoir vider les placards de son mari décédé- comme déclencheur de ses souvenirs, d’être désorientée, et de faire des aller-retour entre son passé et le présent.

    Lorsque vous acceptez d’interpréter une personne qui est toujours en vie (contrairement à Julia Childs, par exemple, que vous avez incarné dans Julie et Julia), est ce que vous avez en tête que la personne concernée pourrait voir ce film et le commenter ?

    Oui. Je n’ai pas rencontré Margaret Thatcher en revanche. Je l’ai vue une fois à l’université de ma fille, à Northwestern. Nous avons assisté à une conférence qu’elle a donné, et cela a laissé chez moi une marque indélébile. C’était en 2001 ou 2002, je ne me souviens plus exactement. Mais pour répondre à votre question sur la responsabilité que cela représente de jouer quelqu’un qui est toujours en vie, et qui potentiellement pourrait voir le film, nous avons été critiqués parce que nous avons dressé le portrait de quelqu’un de fragile et dans un état de santé délicat. Certaines personnes ont dit que c’était honteux de montrer cette partie de la vie, mais en même temps, si les gens pensent que la démence, la fragilité mentale sont honteuses, si les gens pensent qu’il faudrait se couper des images montrant quelqu’un en fin de vie, alors c’est cela qui est regrettable, qui est honteux ! Je ne pense pas qu’il faille s’en couper. J’ai connu des gens atteints de démence, je comprends cette situation, et cela est naturel.

    Nous sommes naturellement intéressés par nos leaders, et à travers leur histoire, cela dit des choses de nous. (...)

    Avez-vous rencontré sa fille, c'est-à-dire l'auteur du livre qui a inspiré le film?

    Non.

    Vous avez déclaré que vous admiriez le fait que Margaret Thatcher n’avait pas peur d’être au pouvoir et qu’elle savait diriger. Cela semble plus dur de diriger lorsque l’on est une femme, plus particulièrement dans le domaine de la politique. Pouvez-vous commenter ?

    Je suis impressionnée par tout ce qui aurait pu l'empêcher d'arriver à la tête de son parti politique et ensuite diriger le pays, et devenir celle qui a occupé le poste de Premier ministre le plus longtemps au XXème siècle. Il y avait un très grand nombre d’obstacles devant elle, et je pense qu’elle a rendu service à "notre équipe" (celle des femmes, Ndlr) en arrivant à ce poste. Même si vous n’êtes peut être pas d’accord avec ses convictions politiques, il y a sa détermination, son énergie, son courage de continuer… Je pense qu’une personne qui s’élève et qui cherche à être au pouvoir, avec sa formation et son intelligence, est admirable à un certain niveau, car vous faites beaucoup de sacrifices. Tous les personnes publics le font.

    J’ai entendu que vous passiez 4 ou 5 heures par jour pour le maquillage.

    Non, c’était moins de 2 heures.

    Craigniez vous qu’avec un personnage qui nécessitait autant de maquillage que cela dévalorise votre performance, ou même devienne la performance ?

    Lorsque nous développions le personnage de Margaret âgé, on a beaucoup enlevé de couches de maquillage. Le designer Mark Coulier a fait des merveilles. Il a réussi à créer quelque chose de l’épaisseur de la peau, donc je me sentais très libre de mes mouvements. J’avais l’impression de regarder un propre membre de ma famille, ou même moi-même, et cela a rendu mon jeu plus facile.

    Propos recueillis par Emmanuel Itier, à New York, en décembre 2011 / Traduction : Brigitte Baronnet

    Notre interview avec la réalisatrice de La Dame de fer, Phyllida Lloyd :

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