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    Quand Steven Spielberg écrit à Dwayne Johnson

    Quand les talents du cinéma prennent la plume pour écrire des lettres, ca donne parfois une prose étonnante, parfois drôle, touchante, sèche, perplexe, lucide ou enragée. Voici quelques exemples.

    "J’ai été à Hiroshima..."

    Décédé en mars 2014, Alain Resnais venait régulièrement à Cannes présenter ses oeuvres, de son Stavisky en 1974 jusqu'à Vous n'avez encore rien vu, en 2012. Brillant metteur en scène, il est l'auteur d'Hiroshima mon amour, sur un scénario de Marguerite Duras. Dans cette lettre envoyée à la romancière / scénariste en 1958, il explique sa vision de la culture japonaise.

    Dimanche 3 août 1958

    Chère Margrot Dora, (comme écrit le "Japan Times")

    Entre toutes les attitudes littéraires possibles pour rédiger mon rapport, je choisis le désordre. Elle me paraît la plus rapide (et n'est-ce pas chaque minute compte) et - qui sait - la plus efficace. Je vous promets de n'écrire que d'un côté de la feuille. Ainsi vous pourrez jouer avec Outah et Gérard, l'un pour les ciseaux, l'autre pour le scotchtape, à reconstituer cette lettre telle qu'elle aurait dû se présenter.

    A Paris nous nous étonnions de l'intérêt que les producteurs japonais pouvaient prendre à ce film. En réalité ils n'en prennent que très modérément, au point que la somme prêtée pour le réaliser me paraît d'une humilité inquiétante. J'ajoute tout de suite que le devis ne sera prêt que Jeudi prochain*. J'ai pensé qu'il était tout de même imprudent de faire venir Riva et Baudrot avant d'avoir la certitude de pouvoir commencer le tournage. […]

    Ce qui paraît le plus affoler les producteurs japonais, c’est notre désir de tourner à Hiroshima même et dans des lieux réels. Cela pose il est vrai des problèmes particuliers : on ne peut tourner dans une gare car cela pourrait gêner les voyageurs. On ne peut tourner dans un hôtel car cela pourrait gêner les clients. On ne peut tourner dans les rues la nuit car cela dérange les gangsters. Ce qui ne veut pas dire qu’on n’y arrivera pas.

    Parmi toutes les choses qu’on nous avait racontées, certaines sont vraies, d’autres fausses, bien sûr. Ainsi : un Européen ne peut pas aimer la cuisine japonaise, laquelle d’ailleurs ne vaut rien. Faux. Jamais je n’ai été à pareille fête culinaire. Tokyo est très américanisé. Tout est bilingue. Faux. Il y a vingt pancartes de rues pour toute la ville et le plan du métro est entièrement en caractères japonais (ce qui rend son emploi incroyablement délicat). Il n’y a pas de cafés au Japon. Particulièrement faux. Il n’y a même que ça. Bien plus que de bistrots en France. La vie nocturne continue toute la nuit à Tokyo. Faux. Les boites de nuit ouvrent à six heures du soir et ferment à minuit. A une heure du matin tout le monde est couché. Tokyo est la capitale la plus bruyante du monde. Faux. Rome l’est quatre fois plus. Tokyo est la capitale du néon. Vrai. L’incroyable politesse japonaise dans les rapports commerciaux. Peut-être vrai, mais c’est indiscernable pour moi. Dauman l’est vingt fois plus (poli). Les femmes rient tout le temps, les hommes jamais. Vrai.

    […]

    Lire la lettre en intégralité sur le site deslettres

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