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    Matthieu Delaporte : "Un Illustre inconnu est radicalement différent du Prénom"
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 12 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    Deux ans après Le Prénom, son coréalisateur Matthieu Delaporte revient avec Un Illustre inconnu, un film "radicalement différent" du précédent. Comment passe-t-on de la comédie au film noir ? Rencontre avec le scénariste et réalisateur.

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    AlloCiné : La question doit souvent revenir, mais comment passe-t-on du Prénom à un film aussi différent qu'est Un Illustre inconnu ?

    Matthieu Delaporte : Avec Alexandre de la Patellière, on écrit et on ne décide pas avant. Il y a des sujets qui nous intéressent, des personnages… On écrit, on a une sorte de longue conversation ensemble depuis des années. On aborde des sujets, des idées, on les note. Pendant un an, on en parle. On a trois-quatre idées en même temps, et tout d’un coup une idée émerge et les autres disparaissent. Le sujet tient mieux la barre que les autres.

    Parfois c’est un film noir, parfois c’est une comédie. Mais je ne sais pas pourquoi pas on va d’une comédie à un film noir ; ce sont nos propres envies de spectateur je pense. Ce sont des sujets qui nous intéressent. On a tous des envies de voir des films très différents. Dans le fond, on écrit comme on regarde les films.

    On écrit comme on regarde les films.

    C’est un film radicalement différent effectivement, dans sa tonalité, dans sa façon de filmer, parce qu'il s’y prêtait. C’est un film où la mise en scène se voit. Le Prénom l’était aussi, mais comme ça va très vite, on ne se rend pas forcément compte du travail qui est fait. C’est vrai que le film tranche radicalement. Ca interroge beaucoup.

    D’où est venu le déclic pour ce film ? Etait-ce l’envie de faire un film sur la métamorphose ? Offrir à un acteur cette possibilité de changer d’identité ?

    Il y a évidemment toute une réflexion sur la métamorphose, sur le fait de devenir quelqu’un. Le point de départ, c’était en voyant une publicité qui disait « soyez vous-mêmes ». Je me souviens que j’étais resté en arrêt devant cette pub en me disant que, personnellement, je serais bien en peine de dire qui je suis, que c’était difficile comme question.

    Il y a des gens qui ont l’impression de n’être personne, de ne pas exister, de ne pas avoir de prise sur leur vie.

    Après, on a réfléchi autour de cette idée. C’est fou comme en permanence, on nous renvoie au fait d’être quelqu’un. Mais dans le fond, c’est une question qui est extrêmement difficile. Il y a des gens qui ont l’impression de n’être personne, de ne pas exister, de ne pas avoir de prise sur leur vie. Ils ont l’impression d’être spectateurs d’eux-mêmes, extérieurs à eux-mêmes. J’ai creusé ce personnage, en me disant que c’était un personnage de fiction extraordinaire.

    Ce sont des gens qui rêvent leur vie, qui usurpent des identités, qui comme ça se transforment ou imaginent d’autres vies. Ce sont des personnages de fiction pure puisqu’ils rêvent que l’imaginaire devient réalité. Ça se prête à une écriture de fiction, à inventer des choses. C’est comme ça qu’est né le début du film.

    Marcel Hartmann / BERTRAND RINDOFF PETROFF / BESTIMAGE

    Pouvez-vous nous dévoiler les coulisses des métamorphoses du personnage. Est-ce que cela a été particulièrement long, compliqué ? 

    Ca a été un travail de préparation très long. On a beaucoup travaillé avec Mathieu Kassovitz et le chef opérateur Pierre-Olivier Persin en amont. Il fallait déjà partir de personnage existant et les imiter, donc partir d’acteurs qui pouvaient coller à un double. Mathieu ne pouvait pas prendre les visages de tout le monde.

    Un travail de préparation très long

    Ensuite, il fallait travailler sur le maquillage car c’est quelqu’un qui prend les identités des gens dans la rue. Il faut que le maquillage ne fasse pas trop maquillage, que ça soit crédible. On a travaillé sur des maquillages extrêmement fin pour garder les expressions. Ainsi, lorsque Mathieu joue, il n'est pas figé dans une espèce de masque de latex. On a fait des essais pendant un an. On a testé d’autres acteurs. On a fait des empreintes. On a regardé les visages. On a sculpté les nez pour arriver à ce qu’il soit capable de prendre des identités comme ça dans le film.

    Et était-il évident dès le départ que vous choisiriez Mathieu Kassovitz ?

    Avec Alexandre, nous n’écrivons pas pour un acteur en particulier. Ce sont des personnages imaginaires. Quand j’ai cherché le personnage pour jouer ces rôles, j’ai rencontré plusieurs acteurs. J’ai eu la chance de rencontrer Mathieu et qu’il soit emballé par le film. Ca a été une rencontre extraordinaire.

    Mathieu Kassovitz est un acteur inouï

    C’est un acteur inouï. Il a cette capacité à être Monsieur Tout le Monde, et dans le même temps, il est capable de jouer différents rôles, mais sans cabotinage, sans faire de mimiques. Il arrive à donner du naturel à d’autres personnes que lui-même.

    COADIC GUIREC / BESTIMAGE

    J'aimerais revenir quelques instants sur le succès du Prénom et en savoir plus sur les déclinaisons prévues…

    Oui, le film a été un gros succès public. Il est allé dans beaucoup de pays. Il y a un remake italien qui a été tourné cet été, il est question de peut être faire un remake aux Etats-Unis. Comme la pièce va probablement sortir aux Etats-Unis… Ils attendent que la pièce sorte, avant de peut être faire un film. D’autres remakes sont également en gestation.

    Quels sont vos projets ? Vous avez une nouvelle pièce de théâtre depuis la rentrée…

    Avec Alexandre de la Patellière, nous avons écrit une autre pièce après Le Prénom. Nous retournons au Théâtre Edouard 7 à Paris avec Le Dîner d'adieu, avec Bernard Murat en tant que metteur en scène, avec trois acteurs merveilleux : Eric Elmosnino, Guillaume de Tonquédec qui était dans Le Prénom, et Audrey Fleurot (en savoir plus).

    Côté cinéma, je commence à réécrire, j’ai des pistes. Je ne sais pas encore si je vais repartir sur un film noir ou une comédie. On en est encore au tout début.

    Propos recueillis au Festival du film francophone d'Angoulême 2014

    La bande-annonce d'Un illustre inconnu, dans les salles depuis mercredi :

     

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