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    Personal Affairs : "La réalité est une bombe à retardement "
    Vincent Garnier
    Vincent Garnier
    -Rédacteur en chef
    Cinéphile omnivore, Vincent « Michel » Garnier se nourrit depuis de longues années de tous les cinémas, sans distinction de genres ou de styles. Aux côtés de Yoann « Michel » Sardet, il supervise la Rédac d’AlloCiné et traque les Faux Raccords.

    Avec son ton mélancolique et désenchanté, l'israélien "Personal Affairs" offre une vision décalée et inhabituelle de la vie quotidienne au Moyen-Orient. Entretien avec une réalisatrice qui s'intéresse aux rapports humains.

    Sophie Dulac Distribution

    Personal Affairs est votre premier film. Pouvez-vous nous parler un peu de vous ? Comment êtes-vous entrée dans le monde du cinéma ?

    Maha Haj : J'ai toujours été fascinée par le monde du cinéma, mais je n'ai jamais étudié ou rêvé d'être cinéaste. Je savais que j'aimais vraiment la littérature, la musique et les arts, mais rien de plus précis que cela. Mon enseignement secondaire s'est articulé autour des littératures anglaise et arabe. J'ai enseigné dans des lycées pendant un certain temps et travaillé sur des traductions. J'ai ensuite commencé à m'essayer à l'écriture de scénarios courts jusqu'à ce qu'un ami m'approche pour écrire pour un long métrage, qui a obtenu un financement. Cela m'a encouragée à continuer à écrire. C'est comme ça que j'ai écrit et réalisé mon premier court métrage en 2008, Oranges (Young Audience Award, CINEMED). Et c'est là que j'ai dû apprendre la réalisation.

    Le premier jour de tournage d'Oranges a été mon premier jour sur un plateau de cinéma. Je me souviens que tous les acteurs et membres de l'équipe étaient là, la caméra prête à tourner, et moi regardant par l'oeilleton. J'étais tellement fascinée par la façon dont tout est vu à travers la lentille que le directeur de la photographie, mon mari Ehab Assal, a dû me prévenir que tout le monde m'attendait pour commencer (...) J'étais extatique. Et je savais que c'était ce que je voulais faire pour le reste de ma vie. Après la réalisation d'Oranges, j'ai travaillé comme directrice artistique sur plusieurs films, dont The Time that Remains (2009) d'Elia Suleiman, et en 2012, j'ai commencé à écrire Personal Affairs.

    Sophie Dulac Distribution.

    Votre film offre une vision pacifique de la vie quotidienne des Palestiniens. Vous vous concentrez sur 3 couples et leurs relations. Mais la menace n'est jamais loin d'eux. Tout peut être ruiné en un clin d'oeil, comme dans la scène de point de contrôle.

    Alors que les couples dans le film vivent dans un calme relatif, leur vie n'est pas nécessairement si pacifique. Elles sont pleines de tensions et de problèmes quotidiens. Vivre dans une réalité colonisée ne fait qu'ajouter à cela. La frustration, l'ennui et le côté morne de la vie conjugale sont intensifiés par la situation extérieure. Et un incident anodin à un check point peut prendre des proportions dramatiques.Tout comme la vie de la grand-mère, la réalité est suspendue à un fil. C'est une bombe à retardement qui pourrait exploser à tout moment.

    Dans votre film, l'humour est proche de celui qu'Elia Suleiman a utilisé pour Intervention divine. On pense aussi à l'humour d'Aki Kaurismaki. Sont-ils deux de vos influences? Quelles sont vos autres influences ?

    Je ne peux pas dire si je suis influencé par Elia Suleiman ou d'autres, mais j'aime ce genre de cinéma. Dans le cas particulier d'Elia Suleiman, nous partageons la même ville et avons grandi dans un environnement similaire. Peut-être que nous partageons la même vision de notre réalité, qui pourrait se traduire par des approches similaires. Et peut-être que l'humour impassible est capable d'embrasser toutes les complexités d'une situation qu'il serait difficile d'exprimer autrement. Je suis aussi une grande admiratrice d'Ingmar Bergman, de Nuri Bilge Ceylan, d'Abbas Kiarostami, de Roy et des frères Coen.

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