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    Ghost in the Shell : entretien avec l'équipe chargée de la restauration du film
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti en 1997, "Ghost in the Shell", le chef-d'oeuvre de Mamoru Oshii, ressort en Blu-ray dans une magnifique copie intégralement restaurée. L'occasion de nous entretenir avec l'équipe en charge de cette restauration pour cette (re)sortie événement.

    Chef-d'oeuvre visionnaire sorti chez nous il y a déjà 20 ans, l'adaptation de Ghost in the Shell signée Mamoru Oshii, d'après l'oeuvre culte de Masamune Shirow, n'a pas pris une ride, bien au contraire même, tant les thèmes abordés dans l'oeuvre sont plus que jamais d'actualité. A l'occasion de la sortie en version intégralement restaurée du film sur Blu-ray, nous avons eu l'opportunité de nous entretenir -par mail- avec Timothy Killian, responsable produit chez l'éditeur @Anime, en charge de la restauration.

    AlloCiné : Ghost in the Shell a-t-il été entièrement restauré et remastérisé, ou bien a-t-il bénéficié d'un "simple" transfert en Haute-Définition à partir d'un scan en 2K ? 4K ?

    Timothy Killian : Le film Ghost in the Shell tel que présenté dans nos nouvelles éditions Blu-Ray et DVD a été restauré depuis un fichier vidéo HD (1920x1080), numérisé à partir d’une HDCAM-SR envoyé expressément depuis le Japon aux USA pour une nouvelle digitalisation faisant suite à nos demandes appuyées. En effet, nous avons longtemps cherché la meilleure source vidéo possible en multipliant les requêtes d’accès au matériel des différents ayant-droits (USA, UK, Japon), et en se procurant les différentes éditions disponibles sur le marché, en France, aux Etats-Unis ainsi qu’au Japon, pour s’assurer que nous avions bien la meilleure source possible.

    Cette longue quête a bien failli mettre en péril notre planning éditorial, mais nous ne regrettons pas d’avoir insisté aussi longtemps pour nous assurer qu’aucun autre matériel de qualité supérieure n’était à ce jour disponible. A réception de la dernière digitalisation depuis la HDCAM-SR, nous avons tout de même décidé qu’il était nécessaire de restaurer la vidéo ici en France afin de proposer une qualité d’image à la hauteur de nos attentes. Nous avons donc placé assez haut notre niveau d’exigence à l’égard de ce grand classique du cinéma d’animation japonais et de science-fiction. Lorsque nous avons examiné le fichier vidéo, nous avons pu constater un certain nombre de défaut apparents, qui se retrouvent d’ailleurs sur les précédentes éditions déjà disponible sur le marché : bruit vidéo à l’image, éclats de gélatines, scratches, manque de piqué sur les arrières plans. À ce moment-là, nous n’avions plus d’autres options que de recourir à une restauration du dernier fichier en date obtenu.

    Quelle est la principale difficulté lorsqu'on travaille sur du digital ?

    Sur une source numérique HD, la manipulation est plus aisée puisqu’on peut comparer facilement le résultat avec la source. Néanmoins, on se rend souvent compte qu’en enlevant la matière gênante de l’image, certains défauts de compression présents sur la source remontent. Dans ces cas-là, nous ajoutons du grain artificiel pour lisser les effets de solarisation ou autres défauts de compression. Par conséquent, il convient d’être prudent et de fonctionner graduellement en surveillant chaque nouvelles sorties vidéos, quitte à faire de nombreux allers-retours.

    Est-ce que Mamoru Oshii a été impliqué dans le process de restauration ?

    Le film Ghost in the Shell réalisé par Mamoru Oshii et son équipe en 1995 fut un travail de commission produit par le studio Production I.G pour le compte du comité de production du film. Ce dernier est l'un des premiers à regrouper des partenaires américains et britanniques pour une production d'un long métrage d'animation japonaise. Le process de validation s’est fait avec un comparatif image source / image restaurée en splitscreen. Vous pouvez d’ailleurs retrouver des extraits vidéo de ce travail de validation parmi les nombreux bonus présents dans nos éditions Blu-Ray et DVD.

    Quel était le plus gros challenge technique dans la restauration du film pour sa sortie en Blu-ray ?

    Le plus gros challenge était de trouver le juste équilibre entre le respect du chef-d’œuvre original, tout en restant fidèle à l’esprit du rendu voulu par le réalisateur à l’époque de la sortie du film. Mais aussi proposer une qualité d’image et de son inédite qui saura contenter le plus grand nombre, que ce soit les fans de la première heure ou les personnes qui le découvriront après avoir vu le nouveau film d’Hollywood. Aussi, améliorer l’image source sans générer d’autres défauts fut l’une de nos préoccupations principales durant le travail de restauration.

    À cette heure, les retours que nous avons eu sont tous très positifs et nous confortent dans les choix entrepris. Nous avons pris très à cœur de proposer presque 20 ans plus tard la meilleure qualité possible de ce grand film précurseur en son temps, en lui permettant d’être apprécié à sa juste valeur sur des équipements vidéo & son HD contemporains. D’ailleurs, nous ne nous sommes pas arrêtés là, car nous avons également travaillé pour la première fois avec Scanavo, le fabricant danois de boîtier métallique Steelbook. Celui-ci nous a aidé à doser intelligemment l’intensité d’impression afin de laisser transparaître un léger effet métallique brillant sur certaines parties de l’illustration si connue de Motoko Kusanagi. Nous avons également négocié avec Sony Music Japan les droits d’acquisition de la Bande Originale par Kenji Kawai que nous proposons en exclusivité avec la Fnac en accompagnement du boîtier Steelbook. Nous avons donc beaucoup travaillé, et mis beaucoup de passion, au service de ce magnifique film et de ses fans qui, après tant d’années, méritaient mieux que ce qui était déjà disponible.

    Le gros problème avec le numérique, c'est que l'image perd souvent son piqué, apparaît trop lisse, notamment en raison d'un usage abusif / excessif du réducteur de bruit. Comment avez-vous géré cela ?

    Pour entrer spécifiquement dans l’aspect technique d’une remasterisation vidéo, on peut généralement constater qu’il existe 6 leviers possibles en restauration d’image. Sur des masters numériques relativement récents (années 80-90), on en utilise 3 essentiellement : retrait des défauts du télécinéma; dégrainage, et renforcement du piqué d'image. C’est la combinaison de ces trois éléments qui permettent d’obtenir un nouveau master avec une image améliorée, débruitée, tout en restant fidèle au film d’origine. Pour des films plus anciens on peut ajouter à la liste les effets de pompage de lumière, la stabilité de l’image et le recadrage de l’image.

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