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    "Un révolutionnaire avec une personnalité incroyable" : quand Antonio Banderas évoque Pedro Almodovar

    Dans "Douleur et Gloire", leur huitième collaboration, Antonio Banderas incarne un alter ego de Pedro Almodovar. Récompensé par le Prix d'Interprétation Masculine à Cannes 2019, l'acteur avait évoqué son réalisateur à notre micro.

    Il lui a offert son premier rôle, au début des années 80, avec Le Labyrinthe des passions. Près de quatre décennies plus tard, Antonio Banderas a remporté un Prix d'Interprétation Masculine à Cannes pour Douleur et Gloire, sa huitième collaboration avec Pedro Almodovar. Un trophée symbolique à plus d'un titre, puisqu'il s'agit du plus important de sa carrière, et qu'il le reçoit pour un long métrage dans lequel il incarne... son metteur en scène. Si le héros de son dernier opus en date s'appelle Salvador Mallo, c'est bien le papa de Tout sur ma mère qui s'exprime à travers lui, utilisant l'autofiction pour évoquer des choses personnelles.

    Lorsque nous le rencontrons à Paris, le 72ème Festival de Cannes n'a pas encore débuté. Mais Antonio Banderas parle déjà très bien du film et de son auteur, dont il est l'un des mieux placés pour évoquer la façon dont il a évolué au fil des années : "À l'époque, je ne savais pas vraiment ce que j'avais en face de moi", nous explique-t-il. "Je pensais que nous faisons ce genre de comédie sophistiquée avec une histoire de passage à l'âge adulte. Un peu dingue, à l'américaine. Mais quand je l'ai vu, au Festival de San Sebastian, le film n'était pas vraiment différent de ce que je pensais qu'il allait être, mais j'ai compris qu'il allait révolutionner le cinéma espagnol. Car la réaction du public était incroyable : certains spectateurs se sont mis à nous insulter, alors que les autres nous applaudissaient. La salle était partagée entre ceux qui nous huaient et ceux qui étaient enthousiastes. J'ai compris qu'il provoquait les gens comme je n'avais jamais vu personne le faire auparavant. Nous étions comme les Rolling Stones."

    "Pedro parvient à toucher beaucoup de gens, en bien comme en mal, de différentes façons. Ce qu'il s'est passé ce soir-là allait au-delà du cinéma et relevait davantage de la sociologie, et des changements que traversait l'Espagne à l'époque : nous étions en 1981, 60 ans après la mort de Franco. Le pays était encore sensible. Mais j'ai compris qu'Almodovar, c'était autre chose. Il n'était pas un réalisateur comme les autres, mais un révolutionnaire avec une personnalité incroyable qui allait emmener le cinéma à un autre niveau que celui qui était le nôtre jusque-là. Et il a toujours été ainsi. C'est probablement l'un des artistes les plus fidèles que j'ai vus dans ma vie, et j'ai été au premier rang pour m'en rendre compte.

    Il ne s'est jamais trahi. Jamais. Vous pouvez l'aimer ou pas. Mais sa personnalité est toujours là. Il ne s'est jamais compromis pour de l'argent, alors qu'il a reçu de nombreuses offres des États-Unis, d'Allemagne, d'Italie... De nombreux producteurs venus du monde entier, auxquels il a répondu qu'il devait faire les choses à sa façon. Cette fidélité est remarquable, à une époque où tout est noyé dans une masse grise. Il y a bien sûr des gens qui savent très bien comment faire leur travail. Mais avoir une telle personnalité, c'est autre chose. Et peu de personnes possèdent cela: Tavernier, Truffaut, Fellini... Des gens comme ça, qui ont ce pouvoir."

    "Douleur et Gloire" désormais disponible en Blu-ray et DVD :

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