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    Rage 2 : un univers post-apo barré et survolté, mais pas sans défauts
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti le 14 mai, suite d'un jeu sorti il y a 8 ans et développé par les inventeurs du FPS qui ont conjugué cette fois-ci leurs forces au studio suédois Avalanche, "Rage 2" se révèle être un titre fun et survolté, mais pas sans défauts.

    Bethesda Zenimax / Id Software / Avalanche Studios

    Une fois n'est pas coutume, on commencera par faire amende honorable. Lorsque RAGE 2 a pointé le bout de son fusil d'assaut pour la toute première fois, l'inquiétude guettait. Avec son look bariolé de couleurs fluo, on avait la tenace impression de voir un jeu qui partait dans tous les sens et lorgnait de manière éhontée vers la franchise à succès Borderlands, avec son univers post-apocalyptique fun et bien barré. Et puis il y a eu les images du jeu Far Cry New Dawn chez le concurrent Ubisoft, et son esthétique post-absorption de substances hallucinogènes avec ces mêmes couleurs fluo, dans la veine du malheureux enrobage esthétique Acid / pop de Suicide Squad.

    On aurait pourtant dû faire davantage confiance au premier géniteur de ce RAGE 2, Id Software. S'il y a bien un studio de développement qu'il n'est plus vraiment besoin de présenter, c'est bien celui-ci, à qui l'on doit quelques unes des franchises les plus mythiques des jeux vidéo : Doom, Wolfenstein et Quake. Le studio qui est rien de moins que l'inventeur du FPS. En octobre 2011, sous la bannière de l'éditeur Bethesda, le studio a ainsi sorti RAGE. Un FPS post-apocalyptique fou furieux avec une ambiance croisée entre l'univers de Mad Max 2, avec une large louchée de Ken le survivant. Si le titre n'était pas exempt de défauts, notamment la fin, brutale, bâclée et assez indigne du jeu, RAGE était un excellent titre baignant dans une ambiance assez dingue.

    Quoique la réputation d'Id Software en matière de FPS ne soit, depuis longtemps, plus à faire, comme s'est d'ailleurs brillamment chargé de le rappeler leur formidable reboot de la licence Doom en 2016, le studio n'est en revanche pas vraiment connu pour sa création de mondes en Open World. De là l'excellente idée de Bethesda de confier une large partie du développement de RAGE 2 au studio suédois Avalanche, tout juste échappé d'un Just Cause 4. Une collaboration avec Id Software qui fait totalement sens. Avalanche Studios, c'est l'équipe derrière la création de l'excellent jeu en Open World Mad Max, sorti en 2015, pour lequel le studio avait d'ailleurs étroitement travaillé avec George Miller, affairé à mettre la touche finale à son démentiel Mad Max : Fury Road.

    Road Warrior

    Dans RAGE premier du nom, l'histoire prenait place en 2135, 106 ans après que la Terre ait été percutée par Apophis, un immense astéroïde. 80% de la population mondiale fut erradiquée, tandis que les quelques rescapés se réunissaient pour reconstruire leur civilisation et tenter de survivre. Dans RAGE 2, la planète est plus que jamais devenue une terre sauvage où des factions aussi dégénérées les unes que les autres  se battent pour le contrôle de précieuses ressources. Comme si les gangs ne suffisaient pas, les joueurs doivent également faire face à l'Autorité, les antagonistes du premier RAGE, qui menacent à nouveau le Wasteland. Le joueur incarne ainsi Walker, dernier ranger du Wasteland et grain de sable dans les rouages de l'Autorité. Ou plutôt le poil à gratter du général Cross, à la tête de l'Autorité justement, qui cherche à étendre son emprise sur tout le territoire.

    Id Software / Avalanche Studios / Bethesda Zenimax

    Puisqu'on parle de ce dernier, il faut rendre hommage au travail accompli par les développeurs dans le jeu. Entre les zones où la végétation reprend péniblement ses droits au milieu d'immondices, de tronçons de routes dévastés, aux étendues calcinées par le soleil sans âme qui vive, en passant par les marais et autres petites villes où le joueur peut se ravitailler et croiser du monde, l'univers de RAGE 2 a de la gueule. Un monde majoritairement désertique où, paradoxalement, se trouve toujours régulièrement une étincelle de (sur)vie. Un monde qui est aussi des plus agréable à parcourir au volant de son bolide tuné et paré aux combats à grands renforts de missiles à têtes chercheuses, mitrailleuses gatling ou canon de 20mm, baptisé Phénix.

    Toutefois, à jouer les guerriers de la route, cet aspect précis nous a paru moins réussi et bien moins spectaculaire que dans le jeu Mad Max justement, dont nous parlions plus haut, et développé par Avalanche Studios. Là, tout y était : la sensation de la tôle froissée ou arrachée grâce à un harpon, les violents coups de volants pour tenter de faire sortir de la route ses poursuivants, les lances explosives balancées sur les réservoirs mal protégés des véhicules ennemis, les Kamikasseurs se lançant à l'abordage sur le toit de votre bolide et qui étaient oblitérés d'un coup de fusil à canon scié, les pneus en flammes, les explosions... C'était clairement un des points forts du jeu.

    Ici, dans RAGE 2, les courses-poursuites aux volants des véhicules restent sympas, mais loin d'être inoubliables. Ce bémol est cela dit un peu atténué par l'offre de véhicules pilotables. Si vous voyez un véhicule, c'est qu'il est possible d'en prendre le contrôle. Non seulement il y en a pas mal, mais ils sont plutôt variés, entre la moto ultra rapide mais fragile, forcément; le Monster Truck et ses énormes pneus capables de franchir à peu près n'importe quel obstacle, des bolides conçus pour la vitesse; le Hover Boat, aéroglisseur qui fait merveille dans les marais... Et même l'Icare, un véhicule volant parfait pour atteindre les endroits difficiles d'accès. Et quoi de mieux que de se confronter aux meilleurs pilotes du Wasteland et les défier sur le circuit de voitures de la région des Plaines déchirées, façon Course à la mort ?

    Walker, Wasteland Ranger

    Pot pourri nostalgique et multi référencés, que ce soit dans les comics, au cinéma, les séries TV et bien entendu les jeux vidéo, RAGE 2 ne brille, tout comme son aîné, pas par son scénario prétexte, qui tient, soyons franc, pratiquement sur un timbre poste. Si vous espérez jouer à ce titre pour cet aspect, toujours problématique d'ailleurs dans un Open World où la trame scénaristique manque souvent de liant, à moins de s'appeler Rockstar-, il vaut mieux passer votre chemin. Les gueules cassées que vous croiserez, certaines vraiment savoureuses d'ailleurs, n'existent le plus souvent que le temps de balancer une punchline, ou pour vous passer commande d'une quête, mais jamais vraiment par et pour elles-mêmes; d'autant qu'elles ne sont d'ailleurs pratiquement pas mises en scène. C'est dommage, parce que le jeu ne manque vraiment pas, -et c'est heureux- d'humour.

    id Software / Avalanche Studios / Bethesda Zenimax

    Tout au long de la grosse quinzaine d'heures de jeu si vous filez en ligne droite, mais près du double si vous passez le jeu au peigne fin, ce qui est une courte durée de vie pour un titre censé être un Open World, votre personnage est amené à remplir un panel de missions diverses : contrats de chasseur de primes, nettoyer un barrage routier tenu par un gang, faire le ménage dans une station d'essence, "enquêter" sur la disparition d'un ancien Ranger... Des missions qui seront notamment confiées par un trio de personnages non joueurs et censés vous aider à erradiquer la menace de l'Autorité. Mais avant cela, il faut gagner leur confiance...

    Vu le pedigree du studio Id Software, on se doute bien que lorsque le personnage principal est envoyé faire le ménage dans un coin de la carte du Wasteland, ce n'est pas pour y aller et déclamer du Shakespeare. Et là on touche clairement au gros point fort du titre, ce qui finalement en fait la sève : ses affrontements armes aux poings. Vêtu d'une combinaison capable de passer en Overdrive (surcharger) lui conférant une puissance surhumaine (qui n'est d'ailleurs, au passage, pas sans rappeler la combinaison du jeu Crysis) gorgé de pouvoirs basés sur un précieux aliage précieux nommé nanotrite lui permettant de faire des ruées dévastatrices sur ses ennemis, les écraser, créer des vortex ou un champ magnétique pouvant arrêter les balles, Walker affronte des cohortes d'ennemis parfois grands comme un immeuble (coucou Ken le survivant !) dans un bain de sang aussi jubilatoire qu'ultra nerveux. Galvanisé par des riffs de Metal endiablés, boosté par un arsenal d'armes qu'il est en plus possible d'améliorer généreusement, on se retrouve à défourrailler nerveusement dans tous les sens, alors que des créatures mutantes surgissent de partout et par dizaines, fondant sur nous. Des affrontements jouissifs et survoltés d'une rare brutalité, qui nous rappelle combien Id Software sait y faire en matière de gunfights et de gameplay ultra nerveux, qui est d'ailleurs ici un cran au-dessus de celui du reboot de Doom, de part la variété des combinaisons possibles permises par la combinaison de Walker.

    Offrant un Open World séduisant même s'il peut sembler étriqué au regard de ce que peut proposer la concurrence, asssez court mais finalement très intense et souvent jubilatoire dans son gameplay, en tout cas en ce qui concerne les affrontements en FPS où Id Software montre comme personne sa maîtrise du sujet, RAGE 2 ne cherche nullement à réinventer la roue. Mais parfaire un peu plus une recette déjà éprouvée dans un premier opus sorti il y a huit ans, en dépit de ses vrais défauts. Fin comprise. Un titre tout à fait recommandable, aussi imparfait soit-il.

    Ci-dessous, la bande-annonce de lancement du jeu...

     

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