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    La réforme de l'audiovisuel ne va pas assez loin pour les patrons de chaîne
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Invités au festival Médias en Seine, les patrons des chaînes de TV estiment que la réforme de l'audiovisuel, présentée en septembre, ne va pas assez loin pour pouvoir affronter les plateformes de streaming.

    Bestimage

    Séquence flashback. Le 3 septembre dernier, le ministre de la Culture, Franck Riester, dévoilait à la Presse les contours que pourrait prendre la grande réforme de l'Audiovisuel à venir. En ligne de mire, un projet de loi devant être présenté en novembre prochain en Conseil des ministres, en vue d'être adopté avant l'été 2020. En substance, ce projet de loi vise à "assouplir la régulation de la publicité et mieux encadrer les services comme Netflix". Dans un contexte où les plateformes de vidéo à la demande vont se multiplier dans les mois à venir, (Disney+, Apple et WarnerMedia devant arriver prochainement sur le marché français), le sujet est plus que jamais d'actualité.

    Invités dans le cadre du Festival Médias en Seine ce mardi, les patrons de chaînes TV ont fait front commun en évoquant justement cette réforme à venir. Si les médias français veulent faire jeu égal avec les plateformes de streaming, il faut que cette réforme aille plus loin que ce qui est actuellement proposé, tant sur le plan fiscal que sur les règles encadrant la production.

    Le PDG du groupe M6, Nicolas de Tavernost, a estimé que "La France empêche les groupes d'audiovisuel d'investir dans la production du fait des quotas, et c'est là-dessus que sera jugée la loi". Pour lui, "il faut aller au bout dans cette affaire de production pour pouvoir constituer des groupes médias : changer les règles de détention des mandats, de la durée des droits, de la détention du capital...".

    Maxime Saada, le président du groupe Canal +, ne dit pas autre chose. "La production, c'est le sujet-clé de la loi. On a des acteurs qui font de l'intégration verticale et vont se réserver leur contenu en exclusivité sur leurs plateformes, la bataille commence à être sérieuse puisque Friends repart chez NBC, Warner va lancer sa plateforme, Universal vient d'annoncer Peacock, Disney va se réserver Mandalorian... Ils vont récupérer leurs actifs, y compris chez nous, donc on a un enjeu majeur d'avoir des contenus de qualité". Pour rappel d'ailleurs, dans cet objectif bien compris de la nécessité de renforcer sa position pour affronter la concurrence, le groupe Canal + a annoncé mi-septembre avoir passé un accord avec le géant Netflix, pour mettre à la disposition du public les contenus de cette dernière dans les offres de bouquets de Canal +.

    Pour mémoire, les plateformes de VOD pourraient, avec ce projet de loi, avoir obligation de s'engager auprès du CSA à financer la création d'oeuvres françaises à hauteur de 16% (minimum) de leur chiffre d'affaires réalisé en France, et ce en distinguant les investissements dans la production de séries et celle pour le cinéma. Mais, en contrepartie, celles-ci pourraient bénéficier d'une chronologie des médias plus favorable. Le délai est actuellement à 36 mois entre la sortie d'un film et la possibilité d'entrer au catalogue de Netflix en France (le délai est beaucoup plus court pour Canal+, par exemple, qui a des obligations de financement pour le cinéma français). Précisons que le Ministre menace de couper ces services en France si les plateformes ne s'y plient pas.

    Sur le plan fiscal, Maxime Saada et Nicolas de Tavernost pointent du doigt des mesures qu'ils estiment peu équilibrées face aux plateformes. "L'enjeu, c'est que l'on bénéficie des mêmes règles que les Gafa, pas plus, pas moins", a exposé Alain Weill, PDG d'Altice France. "La loi va dans le bon sens, mais elle est trop entre les mains des lobbies", affirmait quant à lui David Kessler, directeur d'Orange Content, selon des propos rapportés par l'AFP; assurant en outre que la France est le "seul pays" où les producteurs vivent l'émergence des plateformes "comme une menace". De son côté, Delphine Ernotte, l'actuelle patronne du groupe France Télévisions, a défendu le projet Salto, plateforme commune à France Télévisions, TF1 et M6, rappelant qu'elle bénéficiait des investissements faits dans les contenus par les trois diffuseurs. Mais face à la concurrence qui s'annonce titanesque, il va falloir sortir l'artillerie lourde pour rivaliser et convaincre les (télé)spectateurs de mettre la main au portefeuille...

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