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    K Contraire : un premier film intense sur la dépendance et l'enfermement
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 12 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    Sandor Funtek, Alexis Manenti et Sandrine Bonnaire sont à l'affiche ce mercredi de "K Contraire", un premier long métrage de Sarah Marx, remarqué en festival, traitant de sujets sensibles comme la dépression et la dépendance. Rencontre avec l'équipe.

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    L'histoire : Quand Ulysse, 25 ans sort de prison, il doit gérer sa réinsertion et la prise en charge de sa mère malade. Sans aide sociale, il lui faut gagner de l’argent et vite. Avec son ami David, ils mettent en place un plan. Mais rien ne se passe comme prévu.

    AlloCiné : Comment vous est venue l'idée de ce long métrage, K Contraire ?

    Sarah Marx, scénariste et réalisatrice : C’est le prolongement d’un parcours de vie et d’expérience, d’un parcours documentaire également, qui a été les prémices de K Contraire. J’ai fait un travail documentaire à la maison d’arrêt de Nanterre pendant plusieurs mois. Je viens de la vidéo pop culture. C’est le fruit et le prolongement d’une histoire, d’une vie, de mon expérience jusqu’à mes 35 ans.

    Sur l’écriture, les dialogues, j’ai coécrit avec Ekoué et Hamé (La Rumeur), qui sont aussi des hommes de mots. C’est un film qui raconte les héros du quotidien et raconter les gens, c’est les écouter. Essayer de mettre les mots justes dans leur bouche. Le travail d’écriture, de dialogue a été un vrai plaisir.

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    Qu'est-ce qui vous a plu dans ce long métrage ? 

    Sandrine Bonnaire, comédienne : Je sentais déjà une histoire et une écriture très dynamique. C’est plutôt chouette. Je sentais un sens du rythme. Peut être aussi parce que tous les trois ont affaire à la musique, donc ça se sentait dans l’écriture.

    Ce que j’aimais surtout dans cette histoire, comme son titre l’indique, K Contraire, le K de Kétamine. D’un côté, c’est utilisé comme une drogue, donc interdit, et de l’autre, de l’ordre du soin, donc aboli. C’est une vraie question : est-ce qu’on soigne avec de la drogue ? Est-ce que c’est efficace ? Ce sont mes propres questionnements. Est-ce que la kétamine soigne vraiment la dépression alors qu’on l’interdit de l’autre côté ? Ce sont des questions qui font partie presque de mon quotidien, parce que je me suis battue longtemps pour une de mes sœurs qui est autiste, et qui a été très médicamentée. Ca n’a pas toujours été à bon escient.

    Bestimage

    Sarah Marx : On a beaucoup parlé de ça en amont du film. Pour rebondir sur ce que dit Sandrine, K Contraire c’est un film qui part de questions que je me suis posées, au premier rang desquelles : comment fait-on quand on a ses parents à charge, quand on devient les parents de ses parents ? C’est une question importante aujourd’hui en France avec une population qui vieillit, une prise en charge des personnes malades, dépressives, âgées extrêmement onéreuse. Cette question était au centre. Comment fait-on, quand on a 25 ans, qu’on doit justifier d’un emploi auprès de son juge d’application des peines quand on sort de prison, et qu’on se retrouve avec sa mère à charge. Quelles sont les solutions en fait ? Et puis, comme le disait Sandrine, ces molécules, comme la kétamine, qui sont quand meme au départ des molécules utilisées pour endormir les bestiaux, et qui consommées par les jeunes qui ont envie de flirter avec ce que la vie à offrir de bon, et qui aujourd’hui, dans le protocole médicale, sont injectées pour « soigner » la dépression. Je mesure mes mots. Parce que l’on sait ce que ça fait sur un temps court, mais on ne sait pas ce que ça fait sur un temps long. Et puis il y a la question de l’addiction aussi. Ca aide pendant 10 jours, 15 jours. Mais il faut reproduire des intraveineuses de manière assez régulière, et ça, on n’a pas les réponses de ce que ça fait sur le long terme. La molécule comme poison ? La molécule comme antidote ?

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    Finalement, on pourrait dire que c'est un film sur la dépendance, dans ses différents sens…

    Oui sur la dépendance, et l’enfermement : les murs, qui sont ceux de la prison. L’enfermement de la maladie, de la dépression. Le piège aussi d’échapper à ses propres schémas. Bien sûr aussi la question de la dépendance au sein de la famille. Ce sont des questions centrales.

    Sandrine, ce rôle ne devait pas être évident à aborder, et en même temps intéressant de ce fait, car son état évolue. Il y a différentes facettes...

    Sandrine Bonnaire : Ce n’était pas toujours facile, parce que la dépression ou la folie, on ne sait pas bien si elle est juste dépressive, ou un peu folle. En tout cas, elle est bipolaire, ça c’est clair. La bipolarité n’est pas facile à faire parce qu’il y a des moments où elle est complètement normale, et tout d’un coup, ça dérape. Elle a des actes qui sont un peu étranges, comme de vaporiser tout son appartement. Il y avait des comportements et des actions à faire qu’il fallait être à la bonne distance sinon ça peut vite basculer.

    Sarah Marx : Aujourd’hui, la dépression est une maladie qui touche énormément de gens. Ce sont des maladies honteuses en fait. On se disait que le malade, là dans le cas du personnage de Gabriel, cette dépression s’exprime quand elle est seule, face à sa maladie. Quand elle reconnaît ces moments où elle peut lâcher prise. C’est ça qui est terrible dans ces maladies, ces souffrances, c’est qu’on passe sa vie à essayer de montrer que ça va. On n’a pas de maitrise là-dessus. Sandrine est rentrée dans le personnage avec une justesse, une nuance, dans le regard, toujours à la bonne distance.

    La bande-annonce de K Contraire :

     

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