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    Plus belle la vie (France 3) : quel avenir pour le feuilleton alors que les audiences baissent ?
    Julia Fernandez
    Julia Fernandez
    -Journaliste Séries TV
    Elevée à « La Trilogie du samedi », accro aux séries HBO, aux sitcoms et aux dramas britanniques, elle suit avec curiosité et enthousiasme l’évolution des séries françaises. Peu importe le genre et le format, tant que les fictions sortent des sentiers battus et aident la société à se raconter.

    Face à la baisse notable de ses audiences depuis la reprises des inédits en juin et la concurrence toujours plus forte des quotidiennes de TF1 et France 2, la pérennité du feuilleton historique de France 3 est-elle désormais compromise ?

    François LEFEBVRE / FTV / NEWEN

    Après deux mois d'interruption de la diffusion du feuilleton, liée à la suspension des tournages pendant la crise sanitaire du Coronavirus, les épisodes inédits de Plus Belle la vie ont fait leur retour à 20h20 sur France 3 depuis le 29 juin. Mais au terme de ces longues semaines de mise à l'arrêt, difficilement comblées par la rediffusion d'une ancienne intrigue datant 2015, une partie des fidèles du feuilleton mistralien, installé sur la chaîne depuis 2004, ne sont plus au rendez-vous. Comment expliquer ce soudain désamour ?

    Une interruption coûteuse

    Le site Stars Actu constate ainsi qu'à l'issue de la première semaine de reprise des inédits, du 29 juin au 3 juillet, la quotidienne a perdu entre 800 000 et un million de téléspectateurs. De 3,4 millions de téléspectateurs le 17 mars dernier (un record d'audience pour la série cette année), la série a dégringolé à 2,1 millions le 13 juillet, tandis qu' Un Si Grand Soleil, le feuilleton de France 2 tourné à Montpellier, a une nouvelle fois dominé les audiences des quotidiennes avec plus de 3 millions de téléspectateurs.

    Comment expliquer une telle perte sur un programme qui fidélise pourtant les téléspectateurs depuis plus de quinze ans ? Bien sûr, l'arrivée de la saison estivale peut en partie justifier ce désintérêt ponctuel pour les aventures des mistraliens, et le feuilleton en a vu d'autres en termes de variations d'audiences depuis sa création en 2004, en parvenant à tenir dans la durée malgré tout. Mais la comparaison avec les autres quotidiennes est inévitable : on compte désormais 2,4 millions de téléspectateurs en moyenne chaque soir pour Plus Belle la vie depuis le 29 juin, contre 3 millions pour Demain nous appartient sur TF1 et 3,4 millions pour Un Si Grand Soleil depuis la reprise de leur diffusion, respectivement les 16 et 1er juin 2020. 

    Un public fidèle et (relativement) jeune

    La quotidienne peut pourtant se targuer d'attirer un public majoritairement plus jeune que l'âge médian des téléspectateurs de la chaîne, avec une moyenne de 54 ans. Avec ses seize ans d'existence au compteur, Plus Belle la vie arrive encore à attirer un public plus diversifié que celui des autres chaînes, et représente "un bassin d'audience jeune à France Télévisions", déclarait le président de Telfrance au site Les Echos. En effet, 38% de son public a moins de 50 ans, quand la moyenne d'âge des téléspectateurs d'Un Si Grand Soleil est de... 62 ans. Selon un cadre du groupe, le public du feuilleton marseillais y est "très attaché" et "fidèle" depuis de longues années, et sa consommation en replay avoisine les 450 000 vues chaque jour en marge des audiences TV. La production par ailleurs entamé une modernisation de l'image du feuilleton au cours des dernières années, notamment en multipliant les tournages en extérieur pour gagner en naturel. Alors, pourquoi un désamour aussi soudain en ce début d'été ?

    Notre reportage pour les quinze ans de la série :

    Un nouveau souffle pour la fiction de France 3 ?

    Face à la concurrence supplémentaire de Demain nous appartient depuis 2017, celle d'Un Si Grand Soleil depuis la rentrée 2018, et l'annonce du premier soap daytime de TF1 prévu pour l'automne 2020, Ici tout commence (qui, au vu de son casting, s'annonce comme un spinoff direct de Demain nous appartient) le feuilleton historique de France 3 est-il vouer à évoluer, voire à changer de recette ? 

    En mars 2020, le site Les Echos révélait que Newen, le groupe qui produit le soap marseillais, envisageait en interne de réfléchir à un "après" pour Plus Belle la vie. "On y réfléchit, et on va commencer à imaginer des développements possibles via notre filiale de production interne" a déclaré un cadre du groupe.

    Deux raisons principales pourraient justifier ce désir d'envisager la fin du feuilleton pour France 3. D'un part, France Télévisions, qui depuis 2018 met l'accent sur le développement de sa structure de production interne (avec laquelle elle coproduit Un Si Grand Soleil sur France 2 avec la société Epeios Productions), chercherait à se libérer de ses obligations contractuelles avec le groupe Newen. 

    D'autre part, le groupe de télévision publique consacre une part non négligente de son budget alloué à la fiction chaque année pour produire Plus Belle la vie. Avec 260 épisodes de 26 minutes par an, auxquels s'ajoutent plusieurs primes de 90 minutes, ce sont près de 30 millions d'euros dédiés à la production de la quotidienne. Une somme conséquente, qui pourrait être redistribuée dans de nouveaux programmes pour alimenter le catalogue fiction de France 3... "On pourrait faire de très belles séries, pas forcément quotidiennes d’ailleurs", souligne à ce sujet un cadre du groupe au site Les Echos.

    Malgré ces hypothèses, aucune décision définitive ne semble pour le moment à l'ordre du jour, étant donné que le contrat actuel entre France Télévisions et la société Newen court jusqu'en 2021. Si les audiences de ce début d'été ne sont pas concluantes, la perte d'une des marques emblématiques de France Télévisions représenterait une prise de risque conséquence pour le groupe, tant pour la mise en péril de la fidélisation de son public que d'un point de vue économique. La production de la quotidienne rapporte chaque année 43 millions d'euros à la chaîne, soit 17% de la part de ses recettes publicitaires, et représente un bassin d'emploi de plus d'un millier de techniciens en région. Patience donc; les habitants de la place du Mistral ne quitteront pas le petit écran de sitôt.

     

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