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    Ukraine : Winter on Fire, le poignant documentaire sur la résistance de l'Euromaïdan à voir sur Netflix
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Cité à l'Oscar du Meilleur documentaire en 2016 et disponible sur Netflix, le poignant documentaire "Winter on Fire : Ukraine's Fight For Freedom" trouve un écho douloureux à l'actualité, alors que le pays subit une invasion des forces russes.

    De quoi ça parle ?

    Winter on Fire couvre les troubles publiques en Ukraine sur 93 jours, entre 2013 et 2014, au cours desquels des manifestations d'étudiants d'abord, puis de toute la population ensuite, eurent lieu. Ces dernières n'ont pas tardé à engendrer une violente révolution appelant à la démission du président Viktor F. Ianoukovytch.

    Le film inclut des interviews de protestants, d'activistes, de journalistes, d'infirmiers, d'artistes et de membres du clergé, tous représentants de différentes générations, classes sociales, nationalités et croyances. Winter on Fire documente le combat des protestants ukrainiens qui se sont soulevés en dépit des effusions de sang, du désespoir grandissant et des sévères conditions de la protestation.

    Comme un douloureux écho à la tragique actualité...

    "L'Histoire ne se répète pas, mais elle bégaie" disait Karl Marx. Triste et terrible illustration en est faite avec l'actualité, alors que la Russie mène depuis plusieurs jours une invasion de l'Ukraine, plongeant le monde dans la stupéfaction, l'horreur et la consternation.

    Alors que le gouvernement ukrainien joue sa survie, les rues de Kyiv se vident de ses habitants, qui ont fui ou se terrent dans des abris, et des milliers de civils prennent les armes volontairement pour tenter de repousser l'envahisseur russe. Ce vendredi, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky appelait les européens aguerris à venir combattre en Ukraine. Et, il y a quelques heures à peine, ce lundi, il demandait aux dirigeants de l'Union Européenne "l'intégration sans délai" de son pays dans l'Union.

    L'Union Européenne justement, constitue le point d'ancrage du formidable et poignant documentaire Winter on Fire: Ukraine's Fight for Freedom, disponible sur Netflix. Réalisé par Evgeny Afineevsky et tourné à Kyiv (pour respecter l'orthographe ukrainienne; Kiev étant le nom russe) en 2013-2014, son film fut cité à l'Oscar du Meilleur documentaire.

    Winter on Fire: Ukraine's Fight for Freedom
    Winter on Fire: Ukraine's Fight for Freedom
    Sortie : 12 juillet 2017 | 1h 38min
    De Evgeny Afineevsky
    Spectateurs
    4,2
    Voir sur Netflix

    L'Euromaïdan, la révolution du peuple ukrainien, commencée le 21 novembre 2013, réclamait, comme l'avait promis le président pro-russe Viktor F. Ianoukoviytch, la signature effective d'un accord d'association avec l'UE. "L'Ukraine fait partie de l'Europe !" scandait alors la foule rassemblée place de l'indépendance, simplement appelée Maïdan. Des manifestations de prime abord bon enfant, joyeuses, majoritairement peuplées d'étudiants. Mais Ianoukovytch fait volte-face au profit d'un accord avec la Russie.

    Neuf jours plus tard, le gouvernement lance sa police anti-émeutes, tristement connue sous le nom de Berkut, pour disperser violemment les manifestants. "Le gouvernement a voulu stopper ce mouvement à la base, mais ça a eu l'effet inverse" commente un témoin dans le documentaire. A la manière d'un journal de bord, caméra au poing, Evgeny Afineevsky filme les trois mois de manifestations, qui prennent rapidement une tournure de plus en plus terrible avec la répression.

    Le 16 janvier 2014, le régime se durcit encore plus, en votant des lois liberticides destinées à étriller pour de bon toute contestation venant de la rue. Là encore, les manifestants ne lâchent rien, quotidiennement galvanisés aux cris de "Gloire à l'Ukraine ! Gloire aux héros !"

    Le point de bascule a lieu au 63e jour, au petit matin du 22 janvier 2014, lorsque, profitant de la torpeur des manifestants, la Berkut charge avec une brutalité inouïe, talonnée sur ses arrières par les groupes de Titushki. Des brigades formées par des repris de justice faisant le sale boulot et n'hésitant pas non plus à tuer. On relève ce jour-là les premiers morts parmi les manifestants, tués à balles réelles. Une spirale de violences qui ne retombera pas, bien au contraire. "Gloire à la Nation ! Mort à nos ennemis !" scandent désormais les manifestants, plus unis que jamais, et qui reçoivent le soutien d'officiers de réserve pour former les barricades et apprendre à se défendre.

    Jusqu'au 24 février 2014, le jour où, acculé et surtout destitué par le parlement, Ianoukoviytch est obligé de s'enfuir du pays dans un hélicoptère pour trouver refuge en Russie, le bilan des violences sera terrible. On relèvera 125 morts, 65 disparus, et près de 1900 blessés.

    Epilogue...

    Le mouvement contestataire de 2013-2014 est celui d'une partie de l'Ukraine, alors qu'une autre partie, dans les Oblasts (régions administratives) de Donetsk et Louhansk, dans le Sud-Est du pays, lui est fortement hostile. Des référendums d'autodétermination seront organisé afin de se séparer du gouvernement ukrainien en place.

    Ces derniers évènements débouchent sur la guerre du Donbass dès le mois d'avril 2014; la Russie, pays frontalier, étant accusée de soutenir militairement les insurgés. Une guerre qui a fait plus de 10.000 morts et provoqué le déplacement de 2 millions de personnes. Un mois auparavant, alors que l'Euromaïdan pleurait encore ses morts, Vladimir Poutine annexait la Crimée...

    "On n'a pas peur de mourir pour la liberté. La liberté est pour nous. La liberté est nôtre. On vaincra, et l'Ukraine fera partie de l'Europe, fera partie du monde libre ! Jamais on ne sera des esclaves. On sera libres !" lâche un manifestant devant la caméra du cinéaste, dans une sanglante bataille de rue. Des paroles poignantes, à la résonnance actuelle éminemment douloureuse...

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