Désavouant la ministre de la Culture, Catherine Tasca, le Conseil d'Etat a décidé, vendredi, le classement en X de Baise-moi, le brûlot de de Virginie Despentes et Coralie Trinh Thi, sorti mercredi dernier dans une soixantaine de salles.
A la demande de l'association Promouvoir et de parents de mineurs, le Conseil a en effet estimé que le film "constituait un message pornographique et d'incitation à la violence susceptible d'être vu ou perçu par des mineurs qui pourrait relever de l'article 227-24 du code pénal".
Baise-moi est "composé pour l'essentiel d'une succession de scènes d'une grande violence et de scènes de sexe non simulées, sans que les autres séquences traduisent l'intention, affichée par les réalisatrices, de dénoncer la violente faite aux femmes par la société", estime le Conseil.
Il souligne qu'un film ne peut pas être interdit de représentation aux mineurs de moins de 18 ans "autrement que par son inscription sur la liste des films pornographiques ou d'incitation à la violence".
Un classement X, en vertu de la loi de 1975, implique le retrait total des écrans puisqu'il n'existe plus de salles spécialisées en France. Aucun film n'a été classé X ces dernières années.
Baise-moi avait été interdit aux moins de 16 ans par Catherine Tasca, sur recommandation de la commission de classification avec une voix de majorité.
L'interdiction était assortie d'un avertissement déclarant : "Ce film, qui enchaîne sans interruption des scènes de sexe d'une crudité appuyée et des images d'une particulière violence, peut profondément perturber certains des spectateurs."
Le Conseil d'Etat condamne l'Etat à verser la somme de 10.000 F à l'association Promouvoir, d'une part, et d'autre part aux trois couples qui s'étaient joints à la requête en tant que parents d'enfants âgés de plus de 16 ans et de moins de 18 ans.
La requête avait été déposée le 23 juin par Promouvoir, "association de défense des valeurs judéo-chrétiennes et de la famille", basée à Carpentras dans le Vaucluse. Baise-moi est adapté du roman éponyme de Virginie Despentes qui avait fait sensation lors de sa publication. L'écrivain, qui l'a coréalisé avec l'actrice venue du X Coralie Trinh Thi, raconte l'odyssée sanglante et "destroy" de deux paumés, Manu et Nadine (les "hardeuses" Karen Bach et Raffaëla Anderson), entre dope et musique techno, qui laissent derrière elles une traînée de cadavres, pas seulement de sexe mâle.
Ce road-movie nihiliste et violent s'ouvre sur un viol hyper-réaliste et comporte différentes scènes de pénétration, sodomie, fellation...
Le film est notamment sorti dans les circuits Gaumont et MK2 mais UGC a refusé de le programmer.
Il avait été présenté dans le cadre du Marché du Film, lors du Festival du Cannes, et acheté par une vingtaine de distributeurs étrangers, du Japon, d'Espagne, d'Italie, etc.
A.F.P
