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    Cannes 2014 : les frères Dardenne, cinéastes des femmes
    Laetitia Ratane
    Laetitia Ratane
    -Responsable éditoriale des rubriques Télé, Infotainment et Streaming
    Très tôt fascinée par le grand écran et très vite accro au petit, Laetitia grandit aux côtés des héros ciné-séries culte des années 80-90. Elle nourrit son goût des autres au contact des génies du drame psychologique, des pépites du cinéma français et... des journalistes passionnés qu’elle encadre.

    Un prix d'interprétation pour Emilie Dequenne, une expérience inégalable selon Marion Cotillard... De "Rosetta" à "Deux jours une nuit" : focus sur cinq beaux rôles de femmes mis en lumière par les Frères Dardenne.

    ARP Sélection / Diaphana Films

    Emilie Dequenne dans "Rosetta"

    Bottes en caoutchouc, coupe à la garçonne, démarche et regard frondeurs, Rosetta est une jeune fille déterminée, une guerrière qui ne s'avoue jamais vaincue et se bat coûte que coûte pour son travail. Son but ? Garder sa place au sein d'une société qui veut la mettre dehors et surtout, comme elle le dit, "ne pas tomber dans le trou". C'est à une comédienne débutante, inconnue de tous et totalement opposée à celle qu'elle interprète, que les Frères Dardenne décident de confier ce personnage rageur : à 17 ans, Emilie Dequenne affiche un look de bimbo tatouée, jupes courtes, talons hauts et cheveux décolorés. "Il était hors de question de choisir une comédienne professionnelle pour éviter de faire écran entre le public et le film", expliquent les cinéastes à l'époque. La transformation s'opère et la fusion prend, auréolant la jeune actrice du prestigieux Prix d'interprétation cannois et l'âpre film, de la Palme d'Or.

    Déborah François dans "L'Enfant"

    Amoureuse de Bruno (Jérémie Renier), Sofia est une adolescente vivant des larcins que Lui commet tout autant que des allocations qu'Elle perçoit. Son combat ? Retrouver leur bébé que ce compagnon inconséquent a osé vendre...  Jeune héroïne sensible plongée au coeur de la brutalité, cette nouvelle enfant des Dardenne a la rage explosive de Rosetta, doublé d'un sens des responsabilités violenté par le drame humain adulte qu'elle doit affronter. Pour l'interpréter, une jeune lycéenne nommée Déborah François, fraîchement repérée par Luc et Jean-Pierre Dardenne, décidément inspirés. Sa prestation juste et révoltée impressionne la presse cannoise et le jury, qui décerne au film la Palme tant convoitée.

    Arta Dobroshi dans "Le Silence de Lorna"

    Jeune femme murée dans sa culpabilité, ses silences, ses paradoxes, Lorna est une héroïne albanaise vivant en Belgique, devenue malgré elle la complice d'une machination impliquant faux mariage, fausse nationalité, mafia et meurtre prémédité. Intense et bouleversante, cette nouvelle femme peinte par les Dardenne est plus adulte et mystérieuse que ses consoeurs, plus réservée et torturée. Son interprète, Arta Dobroshi, est remarquée par les cinéastes grâce à sa prestation dans Magic Eye en 2005. "Nous sommes allés la rencontrer où elle vit, à Sarajevo, et durant une journée, nous l'avons filmée avec notre caméra DV : marchant, courant, chantant et dans des scènes proches de celles du film. Ensuite, elle est venue à Liège et nous l'avons filmée jouant avec Jérémie Renier et Fabrizio Rongione. Elle était merveilleuse, simple et belle", confiaient-ils alors. Inconnue en Europe, la nouvelle révélation des Dardenne marque le Festival de Cannes et les spectateurs, par son jeu lumineux et épuré.

    Cécile de France dans "Le Gamin au vélo"

    Gérante d'un salon de coiffure, Samantha est une jeune femme douce et posée qui se prend d'affection pour un jeune garçon abandonné par son père. Un lien quasi filial se noue entre eux, poussant la jeune femme à le protéger à tout prix, sans trop savoir pourquoi. Dans la peau de cette héroïne aussi dure que tendre ? Cécile de France, soit la première actrice connue à travailler sous la direction des Dardenne. C'est après avoir écrit le scénario du Gamin au vélo que les Frères pensent à la comédienne belge :  "Cécile De France a une présence lumineuse évidente. C’était très important pour le rôle de Samantha, parce qu’on ne sait pas du tout pourquoi elle veut tant aider ce gamin. Il n’y a pas de psychologie", confient-ils alors. La comédienne se fond parfaitement dans l'univers de ses compatriotes et enchante la presse qui voit en elle une force et une évidence rarement mises en lumière dans ses précédents nombreux films.

    Marion Cotillard dans "Deux jours, une nuit"

    15 ans après "le petit soldat" Rosetta, les Dardenne mettent en scène une autre héroïne, "déjà femme" se battant pour conserver son emploi. Cette fois, c'est sans orgueil aucun et au péril de sa santé mentale que Sandra parcourt les rues et les lieux d'habitation de ses collègues, afin de leur demander de sacrifier leur prime pour sauver sa place. Un rôle toute de douleur intériorisée et de désespoir ravivé, ancré plus que jamais dans une société en crise. Deux jours une nuit, c'est la rencontre entre la star française du moment et le cinéma d'auteurs estampillé révélateurs de talents. Révélée, Marion l'est déjà et pourtant : "C'est une expérience d'actrice que j'ai toujours attendue. Ils m'ont emmenée dans des endroits dans lesquels je n'étais jamais allée et je me suis retrouvée dans une situation où ils m'auraient demandé n'importe quoi, je l'aurais fait", confiait-elle récemment à nos micros. "On était subjugué, c'était un coup de foudre cinématographique, une histoire désir de travailler ensemble", couplé d'un "enjeu excitant : que cette grande actrice vienne dans notre univers, sans que son personnage ne renvoie à l'icône qu'elle est dans les médias", ont complété les cinéastes de leur côté. Après un Oscar et un César, après le cinéma de Michael Mann et celui de Jacques Audiard, serait-ce l'heure d'un prix d'interprétation pour Marion Cotillard ?

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