Mon compte
    Vous ne devinerez jamais de qui Al Pacino s'est inspiré pour créer Tony Montana
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Pour s'immerger dans leurs rôles respectifs, les talents ont toujours des méthodes bien à eux. Des sources d'inspirations étonnantes aussi, parfois insolites, qui ne relèvent pas de l'évidence.

    Universal Studios

    Pour composer leurs personnages, les acteurs et les actrices puisent logiquement dans une multitudes d'inspirations : expériences personnelles, parfois plus ou moins heureuses d'ailleurs; sens de l'observation; entretiens avec des spécialistes si le rôle l'exige, etc. Au fond, rien que du très classique.

    Dans ce panel, les acteurs de l'extrême, issus de la Method Acting occupent une place bien à part. On pense évidemment à Robert de Niro par exemple. Formé à l'Actors Studio, c'est un perfectionniste notoire, épousant totalement ses rôles, qui n'hésite pas à apprendre le saxophone pour la comédie musicale New York, New York; à vivre aux côtés de mineurs-sidérurgistes pour Voyage au bout de l'enfer (1978); à prendre trente kilos pour jouer un boxeur sur le déclin dans Raging Bull (1980); ou encore à apprendre la messe en latin pour les besoins de Sanglantes confessions.

    A côté de cela, il y a des sources d'inspirations étonnantes chez ces talents; des influences, parfois insolites, qui ne relèvent absolument pas de l'évidence.

    Al Pacino s'est inspiré de Meryl Streep pour créer Tony Montana

    Formé à "la méthode" propre à l'Actors Studio, Al Pacino est connu pour délivrer un jeu très intense et physique. Son approche, qui lui a permis de se glisser dans la peau de quelques uns des plus grands rôles de l'histoire du cinéma américain -a fait de lui un idéal qui a inspiré - et inspire encore- toute une génération d'apprentis acteurs et réalisateurs. Parmi ses rôles légendaires figure évidemment Tony Montana. Difficile d'imaginer un instant le Scarface de Brian de Palma sans son interprète principal : Al Pacino y délivre une prestation tellement bigger than life avec son monstrueux abattage et ses punchlines qu'elle est devenue cultissime. Un personnage qui est même devenu iconique, imposant le standard des films de gangsters des années 80. Dans un passionnant article publié par Empire en 2011, l'acteur évoquait justement sa transformation pour ce rôle, rappelant notamment que Steven Bauer, d'origine cubaine, l'avait beaucoup aidé à trouver l'accent adéquat. Il s'est aussi beaucoup inspiré d'un légendaire boxeur panaméen, Roberto Duran : "il y avait chez lui un côté fauve qui correspondait à mon personnage". De manière beaucoup plus surprenante, il avouait aussi s'être inspiré de Meryl Streep, dans son film Le Choix de Sophie : "J'ai été très inspiré par le travail de Meryl Streep dans Le Choix de Sophie. J'ai trouvé que sa façon de s'impliquer dans le rôle de quelqu'un venant d'un autre pays et d'un autre monde était particulièrement fine, engagée et... courageuse." Convoquer la délicatesse de Meryl Streep pour composer un personnage comme Tony Montana, il fallait y penser.

    Meryl Streep s'est inspiré de Clint Eastwood dans "Le Diable s'habille en Prada"

    Loin de ses rôles purement dramatiques qui ont fait sa gloire, Meryl Streep s'essayait avec jubilation à un tout autre registre dans la comédie Le Diable s'habille en Prada, dans laquelle elle prêtait ses traits à la cruelle et tyrannique Miranda Priestly, rédactrice en chef du magazine de mode Runway. Si son personnage rappelle fortement Anna Wintour, à la tête du magazine Vogue, la comédienne décida ne pas en jouer une pâle copie, refusant notamment de prendre l’accent britannique. Pour sa performance, elle s’inspira également de Diana Vreeland, la précédente rédactrice en chef de Vogue; et Liz Tilberis, la directrice d'Harper's Bazaar. De manière tout à fait étonnante, elle cita également la composition de Clint Eastwood dans Le Bon, la Brute et le Truand comme source d'inspiration, pour créer et moduler la voix de son personnage : "Il n'élève jamais, jamais, jamais la voix; tout le monde doit se pencher pour l'écouter, ce qui fait automatiquement de lui la personne la plus puissante dans la pièce." Un compliment qui ferait sûrement plaisir à Blondin, personnage effectivement taciturne, carburant toujours à l'économie de mots. Mais fait mouche à chaque coup. Comme Miranda.

    Iwan Rheon s'est inspiré de Denis la malice pour son personnage de Game of Thrones

    Dans Game of ThronesIwan Rheon campait l'ignoble Ramsay Bolton. En terme de barbarie, de torture, de sadisme, ce monstre, sans filtre et sans empathie, il remportait la palme de l'abjection. Il faisait semblant de sauver Theon pour mieux lui enlever toute sa dignité, il tuait Rickon comme dans une partie de chasse, violait Sansa, éliminait son propre père et donnait en pâture à ses chiens sa belle-mère et son petit-frère. En avril 2016, l'acteur confiait au New York Times ses sources d'inspirations pour créer son personnage : le Joker de Heath Ledger, un zeste de chanteur Liam Gallagher du groupe Oasis, mélangé avec un soupçon du personnage de BD Denis la Malice. Curieux et étrange cocktail à vrai dire, même si la référence à Denis peut être prise pour son côté sale gosse toujours prêt à faire des farces. Même horribles et funestes comme dans la série.

    Daniel Day Lewis s'est inspiré d'Eminem pour Gangs of New York

    Daniel Day Lewis ou la Method Acting à son paroxysme. Pour mieux s'imprégner de son personnage, le terrifiant Bill le boucher dans Gangs of New York, Lewis passait tout son temps vêtu avec les habits et costumes de son personnage, y compris en dehors des plateaux de tournage. L'ennui, c'est que c'étaient des vêtements portés au milieu du XIXe siècle, pas vraiment fabriqués pour tenir chaud... Résultat des courses pour l'acteur : il contracta une grave pneumonie. Quand la production lui demanda de porter des vêtements chauds et surtout de se soigner avec des médicaments, il refusa, au motif que cela ne l'aiderait pas à rester immergé dans son personnage et son époque. A force d'insistance, il a fini par accepter les médicaments. Le plus étonnant, c'est que Lewis confia que la musique avait joué un rôle important pour qu'il se glisse dans les habits de Bill, ainsi qu'il le déclara dans un entretien accordé à Rolling Stone en 2003 puis au Telegraph en 2007. Avec une prédilection pour la musique de... Eminem ! "Oui, j'écoutais tous les matins de la musique, vers 5h, en particulier la chanson "The Way I am". Je l'admire depuis un moment. Je suis toujours à la recherche de musique qui pourrait être utile à un rôle. Ca permet de contourner l'intellect d'une manière particulière. Avec ce film, j'ai réalisé que j'écoutais Eminem plus que d'habitude." On n'aurait effectivement pas associé le monstrueux (et évidemment génial) Bill le boucher à Eminem en tout cas. Chapeau l'artiste !

    Chris Pratt s'est inspiré des dauphins pour son personnage dans "Jurassic World"

    On a eu beau voir Chris Pratt s'agiter dans tous les sens et transpirer de la chemise dans Jurassic World, la référence ne sautait pas forcément aux yeux. Mais pourquoi pas. Dans un entretien accordé à GQ en mai 2015, l'acteur révélait une nouvelle technique, qui consiste à penser à un animal auquel le personnage incarné ressemblerait, puis déterminer quelle partie du corps bougerait en premier en fonction de cette idée, pour aider l'acteur ou l'actrice à se mouvoir dans l'espace. Pratt a ainsi déterminé que pour Owen Grady, l'animal le plus approprié était le dauphin : "ils se dirigent avec leurs fronts" expliquait-il.

    Johnny Depp s'inspire de Pépé le putois pour Jack Sparrow

    Dans son procès en diffamation l'opposant à son ex femme Amber Heard, qui a duré 6 semaines, Johnny Depp est souvent longuement revenu sur sa carrière, anecdotes comprises. Comme celle où il a raconté la création de son personnage culte Jack Sparrow. "j'avais rencontré les équipes de Disney qui m'avait proposé le scénario d'un film, Hidalgo [NDR : qui sera réalisé par Joe Johnston et produit par la filiale de Disney, Buena Vista], j'ai lu le script, et j'ai trouvé que ce film n'était pas pour moi. Mais je voulais les rencontrer parce qu'à cette époque, j'avais ma fille qui était âgée de 2-3 ans, et pendant trois ans, je n'ai regardé rien d'autre que des films animés, des cartoons, de Tex Avery à Bugs Bunny. "J'ai reçu le script de Pirates des Caraïbes en 2002, et quelque part dans mon esprit, j'y ai vu l'opportunité de mélanger différents personnages comme ceux des cartoons, comme le Coyote de "Bip Bip et Coyote", lorsqu'il se prend un énorme rocher sur la tête qui le fracasse, avant de le retrouver dans la scène suivante où il porte un bandage sur le crâne. J'ai donc commencé à penser à ce genre de choses que l'on trouvait dans les cartoons, et à les intégrer dans la composition du personnage, de sorte que je puisse contrôler la suspension de crédulité. [...] En faisant cela, je me suis dit que ce personnage pourrait aussi bien être bien reçu de la part d'un enfant de 5 ans, que chez un adulte de 45, 65 ou 85 ans". On rajoutera d'ailleurs qu'au catalogue de ses inspirations cartoonesques figure en bonne place celle de Pépé le putois. Tout comme lui, Jack Sparrow est souvent incroyablement chanceux pour se sortir des pires situations.

    Tom Hardy s'est inspiré de l'auto proclamé roi des gitans pour créer la voix de Bane

    Un crâne complètement chauve, un terrifiant masque en métal, une musculature massive comme un minotaure... et une voix de caverne. Si le personnage de Bane campé par Tom Hardy dans The Dark Knight Rises - est resté ancré dans la mémoire, c'est en partie grâce à l'intonation si particulière du personnage. Un timbre métallique, désincarné, teinté d'un accent quasiment impossible à identifier, forgé de toutes pièces par son interprète. Mais comment s'y est-il pris pour confectionner la voix ? Interviewé par Wired, l'acteur avait évoqué la manière dont il avait suggéré cette piste à Christopher Nolan, sur le tournage de The Dark Knight Rises. "Bane est un personnage qui a des origines latines, ce qui n'est pas mon cas", avait-t-il expliqué. "Alors j'ai fait des recherches et j'ai découvert un homme appelé Bartley Gorman, qui appartient à la communauté Rom. On l'appelle "le roi des Gitans". Il est boxeur et il combat à mains nues. J'ai trouvé ça génial. Je l'ai montré à [Christopher Nolan]", racontait-il. "Je lui ai dit qu'on pouvait soit suivre une piste à la Dark Vador, une tonalité de méchant neutre, ou bien que l'on pouvait essayer ça. J'avais envisagé cette possibilité, juste au cas où il nous aurait fallu prendre en compte les racines et les origines de Bane (...). [Christopher Nolan] a répondu qu'on allait partir dans cette direction. Nous nous sommes amusés avec [cet accent], nous l'avons rendu un peu plus fluide, et à présent les gens l'adorent."

    Joaquin Phoenix s'est inspiré de l'Epouvantail du Magicien d'Oz pour créer son Joker

    Dans la période précédant la sortie de Joker, et même après d'ailleurs, on a beaucoup évoqué la manière dont Joaquin Phoenix s'était emparé du rôle. Le comédien avait révélé avoir d’abord travaillé sur le rire du personnage, créé à partir d’importantes recherches auprès de personnes atteintes de troubles de la personnalité. "J’ai commencé par le rire. J’ai regardé des vidéos de personnes atteintes de rires pathologiques, un syndrome neurologique qui provoque des crises incontrôlables de rire" expliquait-il. On a cependant moins entendu une autre source d'inspiration, plus étonnante celle-là : l'acteur Ray Bolger, qui incarnait l'Epouvantail dans le Magicien d'Oz. "Il y avait une chanson en particulier intitulée "The Old Soft Shoe" qu'il a interprété et j'en ai vu une vidéo, et il y a presque une étrange arrogance dans ses mouvements et, vraiment, je la lui ai complètement volée" racontait Phoenix. "Il fait cette chose en levant le menton. Le chorégraphe Michael Arnold [sur le film] m'a montré ça et des tonnes de vidéos, et je me suis concentré sur celle-là. C'était le Joker, n'est-ce pas ? Il y a de l'arrogance chez lui, vraiment. C'était probablement la plus grande influence".

    FBwhatsapp facebook Tweet
    Sur le même sujet
    Commentaires
    Back to Top