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    Call of Duty : WWII, le soldat Ryan du jeu vidéo ?
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti le 3 novembre dernier, "Call of Duty : WWII" effectue un virage à 180° en décidant de revenir aux racines de ce qui fut la matrice de la saga : la Seconde guerre Mondiale. Pour quel résultat ?

    Activision / Sledgehammer Games

    Call of Duty, la franchise vidéoludique annuelle et véritable martingale d'Activision, est un peu, voire beaucoup, devenue au fil des ans son propre genre : blockbuster, dans son acceptation la plus hollywoodienne du terme. Ces dernières années, l'éditeur s'est surtout borné à conjuguer la guerre au futur plus ou moins lointain, entre les Call of Duty : Advanced Warfare, Infinite Warfare, Black Ops III, et même les opus précédents. Le dernier épisode en date de ce cycle, Infinite Warfare, atteignait d'ailleurs une sorte d'acmé puisqu'on partait plus que jamais dans une dérive SF tendance Battlestar Galactica, mais avec un grand méchant anecdotique dans la campagne solo, incarné par Kit Harington. Bref, sans doute -et clairement- l'épisode de trop qui n'en finissait plus de creuser un filon qui commençait sérieusement à s'émousser.

    A ce titre, il est intéressant de noter que Sledgehammer Games, le studio derrière Call of Duty : Advanced Warfare, avait initialement envisagé de travailler sur une suite à ce titre, avant de rétropédaler et même carrément faire un virage à 180°, en choisissant de revenir finalement à ce qui fut la matrice de la saga : la Seconde guerre mondiale. Et il faut le dire d'emblée : si la licence est encore loin d'avoir fait sa révolution copernicienne, cet opus Call of Duty : WWII est tout à fait recommandable, pour peu évidemment que l'on soit réceptif aux canons du genre. Un retour aux sources assez salutaire donc, d'autant que le dernier opus de la saga à avoir exploité le cadre de la Seconde guerre mondiale remonte à 2008 avec Call of Duty : World at War. Une éternité ou presque.

    The Greatest Generation

    Aux Etats-Unis, on vénère et montre un grand respect à ceux et celles qui ont combattu au cours de cette guerre. Ce n'est pas une formule creuse. Ils font d'ailleurs partie de ceux que l'on appelle The Greatest Generation; ceux et celles qui se sont sacrifiés dans une guerre considérée comme juste et noble. Prendre la Seconde guerre mondiale comme toile de fond pour cet opus Call of Duty était aussi un bon prétexte pour leur rendre hommage, comme nous l'affirmaient d'ailleurs les deux têtes exécutives de Sledgehammer Games, Glen Schofield et Michael Condrey.

    Activision / Sledgehammer Games

    "C'est un honneur pour nous d'avoir l'opportunité de rendre hommage à tous ces sacrifices durant la Seconde guerre mondiale, et pas seulement américains, pour une nouvelle génération" nous disaient-ils d'ailleurs lors de la présentation du jeu à l'E3 en juin dernier. Et d'ajouter : "Vous savez, cela fait presque vingt ans que Il faut sauver le soldat Ryan est sorti, neuf ans que "Call of Duty : World at War" est sorti. Nous souhaitions apporter notre humble contribution en hommage à ceux et celles qui se sont battus durant ce conflit". Mais aussi, donc, évangéliser les jeunes générations sur un événement majeur de notre Histoire. Soit.

    La campagne solo suit donc les (més)aventures d'un jeune soldat ayant quitté son Texas natal, du nom de Ronald "Red" Daniels, incorporé au sein d'une unité faisant partie de la très prestigieuse Première division d'infanterie, surnommée la Big Red One; la même que celle dans laquelle Samuel Fuller vécut la Seconde guerre mondiale, et en fit plus tard un film, Au-delà de la gloire. La référence est d'ailleurs tout sauf anodine, puisque l'on retrouve dans cette campagne toute une galerie de personnages - archétypaux dont on jurerait sortis tout droit du film; en particulier celui du tyrannique Sergent William Pierson, pendant vidéoludique de Lee Marvin dans le film de Fuller, et incarné ici par l'acteur Josh Duhamel.

    De l'ouverture des portes de l'Enfer le 6 juin 1944 à Omaha Beach sur les plages de Normandie jusqu'au franchissement du Rhin par la Division, en passant par la bataille des Ardennes et la restranscription des terribles combats dans la forêt de Hürtgen qui eurent lieu entre septembre 1944 et février 1945, l'équipe de Sledgehammer Games orchestre une campagne solo particulièrement rythmée et sans temps mort que nous avons bouclé en 7h environ, le tout emballé dans une mise en scène et des situations rencontrées qui sont parfois presque des décalques de ce que l'on a pu voir dans le chef-d'oeuvre de Spielberg mais aussi dans la formidable mini-série Band of Brothers. En particulier, pour cette dernière référence, l'épisode 7, Point de rupture, lorsque les Allemands bombardent les Alliés en pilonnant les cimes des arbres qui font pleuvoir la mort sur les têtes des soldats américains.

    Activision / Sledgehammer Games

    Pour immerger le joueur - spectateur et tenter de le connecter émotionnellement à ceux qui l'entourent, les développeurs ont eu l'idée de faire du personnage principal un maillon de l'escouade, plus ou moins dépendant de ses camarades, à qui il peut demander des trousses de soin (la barre de vie ne se régénère pas), des fumigènes pour masquer l'avancée de l'escouade, un repérage et marquage des ennemis, ou encore un réapprovisionnement de munitions. Si vous jouez en mode de difficulté "Commando" (soit difficile, ce que l'on vous recommande d'ailleurs, le palier en-dessous, "2e classe", étant assez faible), vous constaterez vite les bienfaits des trousses de soins à condition que l'infirmier de l'escouade soit dans les parages. Les balles ennemis, en particulier les rafales de mitrailleuses, font très mal, tandis que notre barre de vie fait du yoyo.

    Ce qui est plus embêtant, et anesthésie justement cette bonne idée de créer de l'empathie, c'est que nos petits camarades sont intuables... Du coup, cela désamorce toute espèce de tension qu'il y aurait pu y avoir en créant véritablement une situation d'inter-dépendance entre les soldats, comme dans la réalité, où ils se protègent mutuellement. Le gain émotionnel, celui tant recherché par les développeurs, aurait certainement été là... Tout en posant, on imagine, un casse-tête scénaristique probablement insoluble aux développeurs. Mais de toute façon, la campagne solo d'un Call of Duty n'a jamais été réputée pour laisser le libre arbitre aux joueurs, qui évoluent sur un sentier particulièrement balisé et n'en dévie pratiquement jamais.

    Activision / Sledgehammer Games

    Certaines pourront aussi sourire ironiquement en soulignant le côté cliché de certains dialogues et discours à base d'honneur, de camaraderie, du sens du devoir et du sacrifice, ect... Peut-être, mais c'est aussi un peu vite oublier que, à quelques nuances près, on a aussi ce type de considérations / discours dans de grands films de guerre. Le plus souvent, ce type de considérations / dialogues interviennent dans le cadre de diverses Cut Scenes à la facture graphique plutôt flatteuse, et plutôt bien écrites.

    Dans son périple, Ronald "Red" Daniels rencontre aussi un personnage féminin clé de la Résistance française du nom de Rousseau, dont le doublage vocal est assuré par Ludivine Sagnier. C'est peut-être là que le jeu se révèle finalement être le plus étonnant dans sa campagne solo, puisque, loin du tumulte des combats sur le Front, le joueur est placé aux commandes de ce personnage, chargé d'infiltrer à Paris le siège de la Gestapo, déguisé et avec de faux papiers, dont il faut mémoriser les informations les plus essentielles en cas de questions lors d'un contrôle. Faute de quoi, c'est la mort assurée. Une parenthèse bienvenue donc, qui pourrait presque être une sorte de jeu dans le jeu, avec une narration prédominante.

    De l'art de la guerre

    Si la campagne solo a toujours constitué un morceau de choix dans la franchise Call of Duty, celle-ci est sans doute encore plus connue pour son volet Multijoueur. Sans trop développer et parce que vous lirez un compte-rendu beaucoup plus détaillé sur le site de nos confrères de jeuxvideo.com, on se contentera de dire que les joueurs sont invités à choisir parmi cinq Divisions, chacune ayant sa spécialité, dans lesquelles leurs personnages progresseront en gagnant de l'expérience : la Division Aéroportée, la Division de Montagne, la Division d’Infanterie, la Division Blindée ou le Corps Expéditionnaire.

    Outre les indéboulonnables modes de jeu "chacun pour soi", matchs à mort par équipe et autres dominations, on retiendra surtout l'excellent mode Guerre. Celui-ci s’appuie sur un contexte historique et oppose les Alliés aux forces de l'Axe, dans de petites batailles scénarisées basées sur le travail d'équipe et portées par des objectifs stratégiques. C'est assez grisant et fun, et les parties sont rapides, pour peu que les membres de l'équipe travaillent en bonne intelligence.

    Activision / Sledgehammer Games

    On terminera en glissant quelques mots sur l'incontournable mode zombie coopératif, toujours très populaire chez les joueurs, qui fait logiquement son retour avec le mode Zombie Nazis. Lorgnant du côté de Dead Snow avec Frankenstein's Army, loin de l'ambiance potache de Zombie in Spaceland du précédent jeu, Zombie Nazis plonge les joueurs dans les tréfonds d'un petit village enneigé perdu en Bavière du nom de Mittelburg. Au fil de l'histoire, une équipe internationale façon Monuments Men, à laquelle les comédiens David Tennant, la Française Elodie Yung, la Canadienne Katheryn Winnick, l'Allemand Udo Kier et l'Americain Ving Rhames prêtent leurs traits, est aux prises avec une armée de morts-vivants de plus en plus forte et déboulant par vagues. Un mode bonus très fun à jouer, qui devrait logiquement occuper les joueurs durant de nombreuses heures.

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