Loin de se focaliser sur l'histoire personnelle d'une transsexuelle, Duncan Tucker choisit ici de voir bien plus loin que le sujet en lui-même. La transsexualité n'est ici abordée que très partiellement, mais toujours avec une extrême justesse. En effet, le film se veut surtout une véritable illustration des relations père-fils, de la découverte, de l'apprentissage d'un "autre", inconnu, mais qui fait partie intégrante de nous. Le road-movie est d'ailleurs prétexte à cette découverte mutuelle entre rires, altercations, et vérités dévoilées sur fond d'une amérique rurale merveilleuse de soleil et de couleurs. L'humour, présent tout au long du film sans jamais être pesant, parvient à dédramatiser certaines situations pourtant difficiles comme le viol, la prostitution, ou la drogue. Bien sûr, ces sujets ne seront jamais réellement approffondis dans le film, car, tout comme la transsexualité, ils ne représentent pas l'axe majeur de l'histoire, mais seulement quelques bribes. Le film ne se place jamais en moralisateur, ou donneur de leçon. Ils s'efforce simplement de dresser le portrait de deux êtres solitaires, blessés mais pas vaincus, à l'envie farouche de vivre selon leur propre désir. Transamerica se paye le luxe de deux excellents acteurs, d'une crédibilité totale, et d'une interprétation magistrale à laquelle on ne trouve rien à redire. Les personnages prennent vie, et l'on devine derrière les regards tout un passé de cicatrices que le scénario ne fait que murmurer, pour finalement laisser au spectateur cet attachement fragile, qui se tisse doucement, vole en éclats, se reconstruit. Transamerica est un film assez fin, qui, sans jamais tomber dans le dramatique ou le pathos, porte un regard modeste, sincère et très juste sur un sujet jugé difficile et peu représenté au cinéma. Là où Boys don't cry avec Hilary Swank prônait la dureté du sujet, Transamerica se veut plus léger et tranquille, et permet de ne pas stygmatiser la différence en la filmant avec simplicité.