12 and Holding : les secrets du tournage

Twelve and Holding est présenté en 2006 en compétition au Festival du cinéma américain de Deauville. C'est le deuxième long métrage de Michael Cuesta après le très remarqué Long Island Expressway (sorti en France en 2003) qui explorait l'étrange relation unissant un adolescent à un quinquagénaire. Le cinéaste a également signé plusieurs épisodes de la série culte Six feet under.

"La nuit après avoir lu le scénario, j'ai rêvé que je réalisais le film... C'est le genre de choses qui aide à prendre une décision...", révèle Michael Cuesta. Plus généralement, le réalisateur confie que les sujets évoqués dans le script d'Anthony Cipriano (jeune scénariste né en 1975, qui a écrit des programmes télévisés pour enfants avant cette première expérience pour le cinéma) rejoignent ses préoccupations : "Il s'agit d'amour, de cet amour inconditionnel que les enfants portent à leurs parents. Des limites qu'ils sont prêts à dépasser pour rester aimés. Des sacrifices qu'ils consentent pour préserver la stabilité et le bien-être dans leur foyer, quelles qu'en soient les conséquences... Je voulais aborder certains thèmes : l'attirance pour la violence, les conséquences du désir de vengeance, le fardeau que représente pour les enfants les erreurs de leurs parents, et comment la société gère toutes ces questions délicates dans un monde toujours plus complexe."

Michael Cuesta explique pourquoi le thème de l'adolescence lui est si cher : "J'ai des enfants encore assez jeunes, et je crois que cela a une influence sur ma façon de réagir à ce qui m'entoure. L'adolescent, c'est l'archétype du personnage qui cherche sa place dans le monde. C'est un thème intemporel et universel. Ce que j'aime dans ces histoires d'adolescents, c'est que l'innocence et la fragilité des personnages leur donne beaucoup d'épaisseur dramatique. On ne sait jamais ce qui va arriver. Je voudrais que le spectateur puisse se souvenir de son entrée dans l'adolescence, ce passage à la fois délicat, délicieux et malaisé. La difficulté de se débarrasser de ses angoisses, la douleur de perdre un être aimé, l'anxiété vis-à-vis de la sexualité (...) C'est comme une petite guerre du Vietnam intérieure. Quand on y repense, on a oublié à quel point ça a été difficile à vivre. Et chacun garde le souvenir d'un événement, d'une expérience particulière qui a représenté un passage, un pont vers l'âge adulte."

Des centaines d'enfants ont été auditionnés, pendant plusieurs mois, afin de trouver les jeunes comédiens qui interpréteraient les quatre personnages principaux, âgés de 12 ans. A prropos de Conor Donovan, qui joue le double rôle de Rudy et son frère jumeau Jacob, le cinéaste note : "Il me fallait un garçon qui puisse jouer de vrais jumeaux, le premier étant sûr de lui et sportif, l'autre plus réservé et plus fragile. Conor était le seul qui pouvait interpréter les deux, tout en restant très naturel." Concernant Malee, il précise : "Je l'imaginais asiatique et je n'en démordais pas. Mas on ne trouvait personne... J'ai failli laisser tomber, quand j'ai reçu une cassette de Zoe Weizenbaum. J'ai su qu'elle était la bonne personne dès qu'elle a commencé à parler." Pour Jesse Camacho (Leonard, le garçon obèse), cela a été plus simple : "J'ai reçu une cassette de Montréal sur laquelle Jesse faisait des abdos. Je l'ai trouvé très drôle, très attachant, parfait pour le rôle !" se souvient-il.

Après le dérangeant Long Island Expressway (L.I.E.), Michael Cuesta évoque des thèmes délicats tels que le rapport des adolescents à la mort et à la sexualité, la délinquance des mineurs et le désir de vengeance. "Les histoires que je raconte ne sont pas sombres, mais plutôt réalistes, voire même gênantes peut-être pour certains, revendique-t-il. "Le cinéma de grande consommation a tendance à produire des “happy end” pour satisfaire notre besoin de valeurs positives. Mais pour moi, un film peut être drôle, triste, perturbant, déprimant... qu'importe, pourvu que l'histoire soit intéressante et qu'elle nous permette de nous interroger sur le monde dans lequel nous vivons. Comme dans L.I.E., je cherche à mettre le doigt sur les blessures de la société. Je crois que cela peut avoir un effet bénéfique sur le spectateur, et qu'en fin de compte les choses peuvent changer, d'une façon ou d'une autre."