Avis sur Pour elle un seul homme

S'il fut un réalisateur éclectique à Hollywood des années 1930 à 1960, Michael Curtiz était bien celui-là dont le talent protéiforme n'a omis aucun des genres. Du film de pirates au mélodrame passionnel en passant par le film de gangsters, le western, la comédie musicale ou encore le péplum en toute fin de carrière rien ne semble avoir échappé au talentueux réalisateur hongrois .
Ce n'est donc pas la biographie romancée de la chanteuse Helen Morgan qui pouvait lui poser le moindre problème à ce stade de sa carrière. Toutefois l'entame du film pour le moins chaotique censée décrire la confusion sociale née de la prohibition ne contribue pas à poser de façon claire la thématique centrale du film et l’on reste un moment à tenter de cerner les réelles interactions entre les personnages.
Heureusement les choses se décantent avec l'ascension d'Helen Morgan (Ann Blyth) vers la gloire et le délitement de sa relation avec l'impresario de ses débuts Larry Maddux (Paul Newman) qui progressivement mène la chanteuse vers l'alcoolisme et la déchéance. A ce moment le film affirme clairement sa parenté avec "A star is born" le succès phénoménal de l'année 1954 signé George Cukor qui avait particulièrement ému le public en raison de l'identification de Judy Garland, ex-enfant star, à son rôle. Forcément le film pâtit de la comparaison et resta anecdotique dans la carrière du Michael Curtiz tout comme dans celle de Paul Newman.
Pourtant Newman dont c'est seulement le troisième film, se montre ici particulièrement convaincant et surtout sobre dans son jeu pas encore encombré des afféteries qu'il exposera un peu plus tard dans sa période de collaboration avec Martin Ritt et Richard Brooks pour les adaptations un peu boursouflées des auteurs sudistes américains comme Tennessee Williams où l'ombre tutélaire du Marlon Brando d' "Un tramway nommé désir" vampirisait toutes les compositions des jeunes acteurs sortis de l'Actor's Studio. De ce point de vue et pour les exégètes de Newman, le film mérite largement d'être réhabilité.

un biopic visiblement assez peu fidèle à la réalité, le film souffre aussi d'un scénario un peu décousu qui casse l' intensité. Au niveau acteurs, Ann Blyth bonne actrice n'a pas le petit plus qui ferait vraiment la différence. On remarque un Paul Newman déjà bien installé dans un type de personnage ambigu qu'il va utilisé durant toute sa carrière. Un film correct.