Avis sur La Cible vivante

Un bon petit film noir. L'ensemble est très classique et Mann n'en est qu'a ses débuts, mais c'est tout de même assez agréable, avec un Erich Von Stroheim plus sublime que jamais.

Un film noir qui n’arrive pas vraiment à sortir de la moyenne, malgré une belle mise en scène et le milieu insolite, celui du music hall, qui sert de décor (fort bien mis en valeur, les séquences de scène sont bien). Le personnage de femme fatale est trop totalement et banalement malfaisant pour vraiment fasciner. Il lui manque du mystère ou un élément émouvant. Il n’est pas sûr que Von Stroheim ait été le plus désigné pour camper les amoureux transis et trompés (il a au naturel trop de cynisme ou d’ironie pour cela). Son interprétation ne devient vraiment impressionnante que quand on sent son personnage possédé d’une idée fixe, d’une obsession : retrouver celle qui l’a manipulé. Pas un mauvais film, pas un grand Anthony Mann non plus.

Le problème de ce film c'est que le suspense fonctionne de travers, le "Que va-t-il se passer ?" n'ayant plus aucune raison d'être posé, est remplacé par "Ça va se passer quand ?". La chose se regarde néanmoins grâce à une mise en scène élégante, une prise de vue soignée, un Eric Von Strohem parfait et aussi une Mary Beth Hughes qui ne démérite pas dans son rôle de garce pourtant trop abrupte.

Avant d'être le réalisateur de westerns que l'on connait, Anthony Mann a œuvré avec succès dans le film noir. Cette période de sa carrière est malheureusement trop méconnue. "Cible vivante" scénarisé par Heinz Herald d'après une nouvelle de Vicky Baum utilise à merveille l'auguste stature d'Erich Von Stroheim qui reconverti pleinement acteur après son éviction des studios en qualité de réalisateur s'avère ici très inquiétant. Son jeu serait sans doute jugé un peu daté de nos jours mais il incarne ici à merveille ce magicien replié sur lui-même devenu le jouet d’une femme fatale qui le conduira au meurtre pour mieux disparaître aussitôt après. La vengeance sera terrible. La scène où il attend sa dulcinée qui ne viendra jamais dans un palace où il lui a donné rendez-vous est pathétique à souhait. Une réelle curiosité.

Flamarion, un tireur d'élite extrêmement doué, utilise son talent dans des spectacles durant lesquels il prouve son habileté armes à la main. Il monte sur scène avec un couple marié, dont Connie qui va le séduire dans le but de le pousser à tuer son mari. Bien que l'intrigue soit dévoilée rapidement étant donné que l'on sait que Connie est morte et que Flamarion est blessé, Anthony Mann arrive à nous tenir en haleine jusqu'au bout. C'était osé de partir sur cet angle-là surtout qu'un peu plus de mystère n'aurait pas fait de mal, mais c'est quand même efficace. Le triangle amoureux fonctionne bien avec un très bon Erich von Stroheim et une convaincante Mary Beth Hughes. Les deux arrivent à compenser la performance surjouée de Dan Duryea, qui heureusement n'est pas très présent. Au final, c'est un bon petit film noir malgré un manque de surprise et une trame assez classique.

La cible vivante est un film noir à la trame assez classique (une femme séduit un homme pour l'aider à tuer son mari) mais cela fonctionne relativement bien.
C'est juste dommage que le suspense faiblit un peu passé le premier tiers, cela manque d'intensité. Le début pose l'intrigue puis on suit son déroulement sans véritablement être surpris.
C'est bien joué notamment Erich von Stroheim qui est convaincant dans la peau d'un homme solitaire et apparemment antipathique se laissant facilement amadouer par l'appel de l'amour (il est assez touchant lors que la séquence ou il croit retrouver sa belle, et qu'il se rend compte qu'il a été dupé), Mary Beth Hughes est celle qui joue la garce qui sous ses airs mielleux cache une femme sans scrupules.
Pas la plus grand réussite d'Anthony Mann, c'est tout de même un court film (1h15) qui se regarde sans déplaisir jusqu'au dénouement final.

Un bon film sur une double tragédie amoureuse qui nous entraîne dans une descente aux enfers finalement. Ce que l'amour peut faire ou détruire.
Le personnage du tireur est dramatique dans ses espoirs et sa vengeance

Un classique du genre. Certes, Anthony Mann ne fait pas preuve ici de grande invention pour réaliser cette "Cible vivante", sauf peut-être la scène initiale et le parti pris du flash-back, mais au-delà de la mise en scène, le film tient par la solidité de son scénario. Un bonne histoire avant tout... Anthony Mann connaît la chanson. Et pour la mettre en oeuvre, il fait appel à l'excellence. Erich Von Stroheim apporte toute sa rectitude et son professionalisme pour donner de l'épaisseur à son personnage. Il y a quelque chose de balsacien dans cette oeuvre... L'ambition, le triomphe et la chute. Rien de bien nouveau somme toute, mais assez pour espérer un jour que l'histoire sera remise au goût du jour. A quand un remake ?

« The Great Flamarion » offre un rôle parfaitement écrit à Eich Von Stroheim à la rigidité prussienne qui le fait bien. Distant, hautain, sur de son succès et de son art, Flammarion semble impénétrable et indestructible, mais… il y a la garce fatale classique. La belle Mary Beth Hughes peine à lui apporter le côté fascinant et vénéneux que Lana Turner et Viviane Romance ont porté au sommet. Elle apporte ainsi un déficit de crédibilité à l’histoire. C’est d’autant plus regrettable que scénario et réalisation sont suffisamment denses pour accompagner avec intérêt la déchéance d’une star du Music Hall, malgré un suspens inexistant. Ils offrent même un grand moment de cinéma lorsque Erich Von Stroheim esquisse un pas de danse en attendant la nouvelle femme de sa vie. Le triangle amoureux sulfureux est complété par Dan Duryea dans le rôle du mari si désespérément jaloux qu’il a sombré dans l’alcoolisme. Même s’il ne fait pas partie des grands films d’Anthony Mann, sa réalisation très maîtrisée vaut bien une vision.

La Cible vivante est vraiment une déception, compte tenu de sa fiche technique. Comment, en effet, peut-on faire un film ennuyeux dans ses trois quarts avec Anthony Mann, réalisateur renommé de grands westerns ainsi que du Cid et du Déclin de l'Empire Romain, et le grand Von Stroheim de la Grande Illusion? Ce vieux film noir patît d'une intrigue usée, d'ambitions purement commerciales justifiant presque des interprétations à côté de la plaque et d'une psychologie sommaire. Seul le dernier quart d'heure vaut quelque chose, peinant à effacer plus d'une heure de verbiage pompeux et de plans manqués. Ce qui donne au final un film anonyme, quasimment sans âme, une erreur de de jeunesse (relative et cinématographique) d'Anthony Mann tout juste bonne à faire passer un après-midi pluvieux devant la télévision.