Tricheuse : les secrets du tournage

Pour le réalisateur Jean-Francois Davy, Tricheuse a l'ambition d'être une comédie tendre, avec des personnages justes, proches et sincères. "Les thèmes abordés, je l'espère avec légèreté, me tiennent à coeur et j'ai essayé de les traiter avec une certaine pertinence, explique-t-il. La difficulté pour une jeune femme ambitieuse et moderne de trouver son identité et de chercher sa place dans une société encore très macho ; l'amour mixte, celui qui intègre et se nourrit des différences ; l'immigration, dont notre peuple s'est enrichi au cours des siècles dans une France qui ne sait plus très bien comment gérer le mélange des cultures ; la famille composée, décomposée, recomposée, relations entre générations, absence des parents, enfants paumés ; le mensonge et la manipulation, pratiqués non pas comme défauts, maisérigés en art de vivre ; et puis au passage une satire de la magouille politique, de l'art contemporain..."

Jean-François Davy s'est intéressé à ce projet il y a une douzaine d'années, lorsqu'il souhaitait revenir à la réalisation. Jean-Marc Ghanassia, agent artistique, l'avait alors mis en contact avec le scénariste Michel Delgado qui venait d'écrire avec Karine de Demo Une famille à louer, titre d'origine du projet. "J'ai été séduit par cette comédie attachante qui abordait des thèmes qui me tenaient à coeur, explique le cinéaste. Nous avons retravaillé le scénario mais le projet n'a pas pu aboutir. Dix ans plus tard, j'ai reçu un coup de téléphone de Karine de Demo qui avait pris l'initiative de réécrire le scénario, en inversant le sexe des deux personnages principaux : le jeune avocat était devenu une avocate et la femme de ménage un travailleur immigré ! En inversant la relation du couple, l'enjeu m'a semblé beaucoup plus intéressant."

Jean-François Davy avoue que la construction du personnage de Farid a été mouvementée. Au départ, il devait être d'origine roumaine. "Mais j'avais un problème de casting dans la mesure où je ne savais pas comment trouver un comédien roumain, explique le réalisateur. J'ai pensé à Kusturica, mais j'ai eu peur que sa personnalité hors normes soit un peu décalée par rapport au projet. Dans un deuxième temps, le personnage s'appelait Pablo, d'origine argentine et j'ai envisagé de confier le rôle à Sergi López qui n'était pas disponible aux dates du tournage. Comme j'avais très envie de travailler avec Zinedine Soualem depuis que je l'avais repéré dans Ah ! si j'étais riche, j'ai décidé de faire du personnage un maghrébin. J'étais certain que l'alchimie fonctionnerait entre Zinedine et Hélène de Fougerolles."

Pour la réalisation de Tricheuse, Jean-François Davy s'est dit influencé par les films de Frank Capra, Ernst Lubitsch, Billy Wilder ou Frank Tashlin. "Le vaudeville est très jubilatoire, surtout lorsqu'il met en scène des personnages justes et attachants, explique le cinéaste. C'est pour cela que j'ai essayé d'éviter d'en faire des marionnettes, y compris les seconds rôles. Le ton du vaudeville est davantage présent dans la première partie du film, et l'on glisse ensuite vers l'émotion et la tendresse."

Hélène de Fougerolles retrouve ici deux comédiens à qui elle a donné à plusieurs reprises la réplique : Michel Duchaussoy (dans Le Plus beau jour de ma vie, 2005) et Zinedine Soualem (dans Le Péril jeune, Chacun cherche son chat, Que la lumière soit et Ne quittez pas !).

Aimant faire appel à des comédiens qui font partie de sa " famille " et qui acceptent de venir pour une ou deux journées de tournage, Jean-François Davy n'a pas hésité à avoir recours aux services de Bernadette Lafont et Rufus qui formaient déjà un couple dans son film Chaussette surprise il y a trente ans.