Quand je vais voir un film qui s'intitule "Le Petit Prince", je m'attends à voir une adaptation du texte originel du Petit Prince, logique. Pourquoi a-t-il fallu alors qu'une face contemporaine soit ajoutée en parallèle de l'oeuvre de départ - joliment mise en scène, d'ailleurs -, comme une espèce de contrepoint grossier, caricatural et lourd, qui, en plus, sous entend très fort que le public ne serait pas assez futé pour décrypter le texte d'origine tout seul, comme s'il était trop ignorant pour comprendre ce qui lui est dit ou, pire, interpréter par lui-même. Il a donc fallu que les réalisateurs dé-cor-ti-quent pour rendre tout ça niaiseux et prémâché, quitte à tomber dans le cliché et ainsi totalement dénaturer le principe même du Petit Prince et reléguer sa poésie au second plan. Où sont passées la magie, l'innocence et la philosophie de Saint-Exupéry ? Laminées ! On voit bien, pourtant, - après un interminable prologue qui n'a absolument rien à voir -, quand on voit enfin le Petit Prince dans le désert, que cette orientation aurait pu être donnée au film. La représentation des personnages en papier, leurs voix et expressions sonnent justes et laissent entrevoir le chouette film qui aurait pu (du) se dérouler sous nos yeux. Malheureusement, non, et c'est d'autant plus rageant, c'est le chemin conventionnel des années 2010, dégoulinant de fausses bonnes morales qui est encore une fois emprunté. En portant ce titre, cette interprétation du Petit Prince dévalue l'oeuvre majestueuse dont elle ose dire s'inspirer et sous estime le public auquel elle s'adresse. Là où Antoine de Saint-Exupéry retranscrivait à merveilles les perceptions et questionnements des enfants, qui pointent toujours de leurs doigts - aussi petits soient-ils - les questionnements les plus essentiels de la vie on se retrouve avec une énième leçon de morale pleine de grosses ficelles irréalistes à la conclusion nunuche comme quoi il ne faut pas oublier ses rêves. Loins d'être aussi naïfs qu'on le pense, les enfants se posent les questions les plus fondamentales pour savoir comment définir leur environnement et comment se positionner en son sein. C'est quoi, la vie ? Qu'est-ce que la mort ? Et il s'agissait pour Saint-Exupéry de se glisser dans des yeux d'enfants pour rappeler les fondements de la vie humaine dans les méninges des grandes personnes et proposer une philosophie et donner à réfléchir, avec toute la considération qu'on peut avoir de la capacité des autres à définir leur réflexion par eux-mêmes. Or, rien de tout ça n'est retransmis ici. En fait, du Petit Prince, cet animé n'a que le nom et j'espère bien que les enfants continueront de trouver en Saint-Exupéry LA référence et qu'elle ne se verra jamais balayée par ce film qui ne prend même pas la peine de la respecter.