En ces temps cannois où nous partons à la pêche aux films uniques, frémissants d'impatience à l'idée de subir une énième claque cinématographique, il n'est pas si mal de retrouver son train-train quotidien. Installé convenablement (ou presque) dans une petite salle de province, on découvre sans illusions le nouveau film de Mark Walhberg. Ça tombe bien, il pleut dehors et on a pas très bien dormi, alors apprécions la simplicité du geste. Dans ces conditions là, on ne se croirait ni à Cannes, ni au mois de mai, et pourtant on ressort de la salle satisfait. Il faut savoir deux choses primordiales sur Contrebande : Premièrement, ça ne révolutionne pas le thriller, deuxièmement : On s'en fout, parce que c'est pas mal quand même. Comme un épisode des experts, on sait à quoi s'attendre, et c'est pour ça qu'on regarde, parce que ça fonctionne.
Dans cette histoire de père de famille à la droiture étonnante (sic), contraint de revêtir son habit de parfait bandit, on y entremêle dettes, trahisons et suspens, pour un ensemble qui, à défaut d'être surprenant, ne s'essouffle jamais et nous plonge dans une course contre la montre effrénée et jouissive. Certes on pourrait regretter le côté parfois trop contenu de Farraday (Wahlberg), même si il a ses petits punchs, qui en fait le héros-type à la fois trop lisse et trop parfait. L'ensemble quant à lui est plutôt explosif, et cette double-trajectoire qui relie Farraday et sa femme, séparés par quelques bouts d'océans, s'avère d'une efficacité sans partage tant la tension s'immisce au sein de l'intrigue pour conférer aux deux parties cette intensité caractéristique, à base de coups de fils perdus entre deux balles tirées. Il n'y a pas de passivité, tout le panel de personnages est exploité à bon escient, il n'y a ni faire valoir ni inutilités, et à aucun moment le scénario ne s'encombre de temps morts. S'il y a évidemment quelques simplicités et une difficulté à atteindre les sommets sur certaines séquences, l'évolution de l'histoire et la manière de la raconter ne faiblit à aucun moment.
En plus d'être une histoire de trafic avec tout ce que ça comporte (élaboration de plans, distribution de rôles et action constante) c'est aussi et surtout une histoire de famille. La confiance, la trahison, l'amour, ce cocktail de sentiments incertains contient les personnages dans une peur continue, celle de faire les mauvais choix, celle de franchir la ligne finale, la ligne qui pourrait tout changer. Et le jeu psychologique sur ces sentiments est retranscris avec beaucoup de nervosité, assombrissant le tableau au fil des minutes pour promettre un final en apothéose (qui ne vient pas vraiment mais on ne peut pas tout avoir). S'il est évident que, comme le dévoile la fin du film, on a du mal à franchir la limite cinématographique entre le convenable et le plus que convenable, nulle doute que dans son élaboration et son exploitation, Contrebande ne saurait pas mieux justifier son titre, son affiche, son casting, son pitch. Difficile d'être déçu devant ce thriller basique mais efficace, qui nous fait renouer avec une certaine simplicité. Et puis, tant que Walhberg est aussi doué et Beckinsale aussi sublime, on prend sans rechigner. En espérant que demain il fasse un peu plus beau malgré tout...
En fin de compte Contrebande c'est un peu comme un coup moyen après une longue relation, c'est du déjà vu mais on prend son pied quand même. Et il faudrait que j'arrête les métaphores vaseuses.