Un embargo sur une critique d'un film n'est jamais bon signe. Et lorsque ce dernier, pourtant qualifié de blockbuster, est distribué sur le territoire avec un nombre très restreint de copies, on a d'autant plus matière à s'inquiéter. C'est dans ces conditions que débarque le long métrage d'action « La Chute de la Maison Blanche » (« Olympus Has Fallen » dans le texte original).
Réalisé par le yes man Antoine Fuqua, metteur en scène afro-américain à la filmographie hétérogène – le génial « Training Day » côtoie le fonctionnel « Shooters, tireurs d'élite » et les daubes « Le Roi Arthur » / « Les larmes du soleil » – « La Chute de la Maison Blanche » est un projet directement concurrent du fameux « White House Down », blockbuster de Roland Emmerich au casting supra bankable (Channing Tatum, Jaimie Fox) attendu pour cet été.
Et dans l'histoire des films aux sujets semblables (les deux Blanche-Neige l'année dernière aux USA, les deux « Guerre des boutons » chez nous, ou les biopics « Yves Saint-Laurent » à venir), c'est souvent la loi du plus rapide qui fait mouche.
Sortie avancée pour un rendu de copie tout juste dans les temps, le grand gagnant aujourd'hui s'appelle donc « La Chute de la Maison Blanche ».
De l'actionner R-rated mongolo-bourrin, héritage des 90's, qui assume son idéologie putassière ? On dit « Graou ». Un concentré d'adrénaline pimenté d'un humour cynique, articulé autour d'un pitch très DieHardien écrit par le couple novice Katrin Benedikt / Creighton Rothenberger ? On clame « Graou » à nouveau.
Oui, sauf que « La Chute de la Maison Blanche » est parallèlement nourri d'une accumulation de clichés abjects et d'un patriotisme immonde – défilé de drapeaux américains, discours propagandiste anti-terroristes, répliques archi révolues « Que Dieu bénisse les Etats-Unis d'Amérique! », chef d'état major des armées en gros débile bourrin – qui viennent hélas tuer tous les espoirs de servir sur un plateau un « nouveau Die Hard ».
Le film de Fuqua s'amorçait pourtant bien, avec une séquence d'attaque de l'Olympe assez originale, filmée habilement. L'épreuve rassemble ensuite tout ce qu'il y a de plus dégueulasse dans les blockbusters actuels – scènes non crédibles d'échanges de tirs, ritournelle de déjà vus, dialogues mal écrits composés de jurons exécrables censés faire rire, incohérences semées dans le récit (comment l'épouse du héros est-elle au courant que celui-ci a infiltré la Maison Blanche?), résolution facile et prévisible … Un beau gâchis !
Le faiseur Fuqua a clairement le pistolet des pontes du studio sur la tempe et ça se ressent à l'écran.
Quelques noms connus côté casting. Peut être las de ses échecs commerciaux successifs (« Machine Gun »), Gérard Butler, le Leonidas de « 300 », campe sans tellement y croire un ex-garde du corps, vétéran des forces spéciales et sorte d'ersatz de John McClane, le charisme en moins. Morgan Freeman cachetonne en interprétant le président (de substitution) des Etats-Unis d'Amérique, rôle déjà tenu dans le film catastrophe « Deep Impact », quand Rhada Mitchell fait office de figuration en épouse du héros. Aaron Eckhart, quant à lui, fait le boulot mollement dans l'habit du commandant en chef. Dylan McDermott, crédité au générique de la série « The Practice », et Rick Yune, vu au début des années 2000 consécutivement dans « Fast & Furious » et « Meurs un autre jour », jouent les méchants de pacotille pas crédibles pour un sou. Enfin, signalons les étonnants caméos (un peu what the fuck!) de plusieurs célébrités telles que Cole Hauser (méchant de « 2 Fast 2 Furious » et du dernier « Die Hard ») ou Ashley Judd, égarée ces dernières années dans d'improbables navets.
Bilan : « La Chute de la Maison Blanche » aurait fait les beaux jours des studios il y a une vingtaine d'années, sauf qu'on est en 2013 et qu'il paraît inadmissible de pondre une bouse pareille de nos jours. Roland Emmerich, prépare toi à caracoler une nouvelle fois au sommet du box office puisque ton concurrent devrait en toute logique connaître un sacré revers du public.