Nouvelle réalisation très attendue du grand metteur en scène qu’est Clint Eastwood, American Sniper est sans aucun doute l’un des films qui marquera l’année 2015 de par son immense succès aux Etats-Unis et par ses polémiques à cause du sujet qu’il traite. Mais pour ce qui est du film, et malgré quelques réserves, c’est un très bon et très solide film de guerre et surtout il s’agit du meilleur Clint Eastwood depuis Gran Torino, sans doute son dernier chef-d’œuvre en date. Tireur d’élite des Navy SEAL, Chris Kyle est envoyé en Irak dans un seul but : protéger ses camarades. Sa précision chirurgicale sauve d’innombrables vies humaines sur le champ de bataille et, tandis que les récits de ses exploits se multiplient, il décroche le surnom de « La Légende ». Cependant, sa réputation se propage au-delà des lignes ennemies, si bien que sa tête est mise à prix et qu’il devient une cible privilégiée des insurgés. Malgré le danger, et l’angoisse dans laquelle vie sa famille, Chris participe à quatre batailles décisives parmi les plus terribles de la guerre en Irak, s’imposant ainsi comme l’incarnation de la devise des SEAL : « Pas de quartier ! ». Mais en rentrant au pays, Chris prend conscience qu’il ne parvient pas à retrouver une vie normale. Sortie depuis la fin de l’année 2014 aux Etats-Unis, le nouveau film de Clint Eastwood bat des records et est un succès d’une telle ampleur que personne n’aurait pu le prédire. Avec plus de 312 millions de dollars de rapportés rien qu’aux Etats-Unis, American Sniper est le plus gros succès de la carrière de Clint Eastwood en tant que réalisateur. Les recettes mondiales du film s’élève, au moment où j’écris cette critique, à presque 400 millions de dollars. Fort également de critiques élogieuses de la part du public et de la presse, la dernière réalisation du grand Clint a même été nommée six fois aux Oscars 2015 : Meilleur film, Meilleur acteur pour Bradley Cooper, Meilleur scénario adapté, Meilleur son, Meilleur montage et Meilleur montage sonore. Mais même s’il s’avère être un gros succès commercial, le film n’en reste pas moins très polémique aux Etats-Unis où il défraie la chronique car accusé d’être une glorification de l’armée américaine et des forces spéciales ainsi que de son rôle dans la guerre en Irak. Et dans ce contexte de polémique, Michael Moore, réalisateur du documentaire Bowling for Columbine et connu pour être contre le port d’armes, ainsi que Seth Rogen, réalisateur de L’Interview qui tue, se sont révoltés contre le film de Clint Eastwood en le critiquant violemment. Mais maintenant, venons-en au film. Comme je l’ai évoqué ci-dessus, American Sniper est indéniablement le meilleur film de Clint Eastwood depuis longtemps, même si on est loin de la portée de son Gran Torino sorti en 2008 qui est sans doute sont dernier plus grand film, mais le grand Clint revient en très grande forme avec ce film de guerre solide. Après des films décevants pour certains comme Au-delà, J. Edgar et un petit film passé inaperçus en 2014, Jersey Boys, le réalisateur de Million Dollar Baby s’est refait une très belle santé avec cette adaptation du roman autobiographique de Chris Kyle connu pour être le sniper le plus redoutable de l’Histoire de l’armée américaine qui aurait tué, selon ses dires, plus de 255 personnes durant la guerre en Irak, sur ce chiffre, 160 tirs létaux ont été confirmés par le Pentagone. Un temps entre les mains de Steven Spielberg, le projet de cette très intéressante adaptation des mémoires d’un héros national s’est donc retrouvée entre celles de Clint Eastwood qui livre un film de guerre certes intéressant, puissant, violent et efficace mais qui souffre malheureusement d’un certain académisme et donc d’un classicisme évident dans la forme et le scénario. En effet c’est ce qui me pose problème avec cet American Sniper, car là où l’on pouvait s’attendre à quelque chose d’inédit sur la guerre et bien au final le film ne révolutionne pas le genre car on a le sentiment d’avoir déjà tout vu dans soit Démineurs, La Chute du Faucon Noir ou Du Sang et des Larmes par exemple. En fait je pensais découvrir un film où Chris Kyle serait rentré au pays et connaîtrait des difficultés à retrouver goût à la vie et le spectateur revivrait ses faits de guerre aux travers de flashbacks. Mais cela aurait été difficile à mettre en scène car quand on voit le film on remarque qu’il se constitue de 80 % de scènes de guerre donc avoir des flashbacks très longs aurait été pesant dans le déroulement de l’histoire civile. Et donc le film à ce côté très classique et linéaire de raconter l’histoire de Chris Kyle qui fait qu’il peut paraître répétitif dans le montage et le déroulement de l’intrigue :
formation en tant que sniper, histoire amoureuse, première mission, retour au pays, deuxième mission, retour au pays, troisième mission, retour au pays, quatrième mission, retour au pays et évocation de sa vie civile
. Et par contre là où le film m’a un peu déçus et où je l’attendais beaucoup, c’était sur le thème du retour de guerre, le côté psychologique du soldat qui a des difficultés à se réadapter à sa vie d’avant ainsi que l’évocation des troubles de stress post-traumatiques qui sont selon moi des sujets qui ne sont pas assez développer par Clint Eastwood. Certes il y a quelques scènes forte où le personnage principal s’emporte vite, à des reflex de soldat très souvent, repense aux combats violents ou se met facilement en colère, mais malheureusement ce n’est pas suffisamment exploité et le film aurait été encore meilleur s’il s’était attardé sur cette partie du scénario fort intéressante qui aurait donné au film une dimension psychologique fascinante. Mais il n’empêche que ce qui est traité de cette partie de l’histoire est très bien fait notamment grâce aux prestations des acteurs qui sont tous très bon dans leur rôle mais qui se font forcément voler la vedette par l’interprétation puissante et imposante de Bradley Cooper dans son meilleur rôle à ce jour. L’acteur de Very Bad Trip s’est investi comme jamais dans le rôle de Chris Kyle allant jusqu’à prendre 18 kilos de muscle pour se fondre dans la peau de celui qu’on surnommait « Le diable de Ramadi ». Hormis ces petites réserves, le film, malgré son classicisme, reste très bien mis en scène par Clint Eastwood qui prouve qu’à son âge de 84 ans il peut encore livrer des films pleins d’intensité et très solide jusqu’au bout. American Sniper ne révolutionnant pas le film de guerre s’offre tout de même quelques scènes de combats vraiment intenses et violentes avec une tension qui émerge petit à petit amplifiée par la musique, peu présente dans le film d’ailleurs, avec des sons un peu à la Inception. De plus, Clint Eastwood n’hésite pas à montrer toute la violence de la guerre avec des images chocs
comme des civils qui se font tuer, des enfants qui prennent les armes, qui se font abattre froidement ou de manière sadique et insoutenable avec une perceuse comme arme, une image du film qui restera dans les mémoires sans doute
. Et ce que j’ai bien apprécié dans ce film c’est qu’il n’y a pas de patriotisme à outrance avec des musiques lourdes tout du long un peu comme dans un film de Michael Bay en fait. Alors oui il y a une idée de servir son pays, de protéger ses camarades, de protéger son pays même si on doit en mourir, le personnage de Chris Kyle nous le rappelle souvent, mais le réalisateur nuance tout de même son propos avec les parties du scénario centrées sur le retour au pays qui montre les ravages psychologiques de la guerre sur les soldats, Clint Eastwood s’est toujours dit contre l’intervention américaine en Irak d’ailleurs, et donc American Sniper ne doit pas être vue comme un vulgaire film de propagande pro-américain qui fait l’éloge de l’armée même s’il montre Chris Kyle comme un héros national. La conclusion du film avec des images d’archives montrant l’enterrement et l’éloge national d’un héros de l’Histoire des Etats-Unis, achève ce long-métrage comme aussi une sorte d’hommage à Chris Kyle qui aura indéniablement marqué l’Histoire de l’Amérique. Voilà, American Sniper est donc un très bon et efficace film de guerre réalisé par un Clint Eastwood encore en très grande forme, malgré de petites déceptions et sans révolutionner le genre, le film vaut le détour notamment pour ses scènes de guerre intenses et pour l’excellente interprétation de Bradley Cooper qui domine le film comme jamais. American Sniper est le premier film que j’ai vu de l’année 2015 au cinéma et je dois avouer que même si j’ai eu des réserves, l’année cinéma commence très bien.