José Luis Valle a tourné son film à Tijuana, ville mexicaine toute proche de la frontière avec les Etats-Unis. C'est aussi la ville où vit le cinéaste. "A Tijuana il est impossible de ne pas être inspiré", confie-t-il. "C'est comme lorsque tu as une fiancée, qui n'est certes pas la plus jolie mais que tu aimes plus que tout. Tjuana n'est pas une belle ville, mais elle est pleine de charme. C’est une grande source d'histoires et d'expériences, c'est pour cela que j'aimerais revenir filmer à Tijuana". Par ailleurs, le titre du film, Workers, qui est en Anglais, fait référence au bilinguisme qui règne dans cette cité frontalière.
Lorsqu'il construit ses personnages, José Luis Valle s'inspire de plusieurs éléments du réel, des expériences personnelles, de choses qu'il a pu lire ou observer. "L'histoire de Rafael est celle d'un ami de mes parents, un salvadorien immigré et illégal confronté à une situation transnationale qui le dépasse. L'histoire de la femme est davantage d'ordre fictionnel", précise le cinéaste quant à l'élaboration des deux protagonistes de son film.
José Luis Valle confie s'être échiné, avec ses acteurs, parmi lesquels Jesus Padilla et Susana Salazar, pour atteindre une grande précision dans leur jeu. "La direction d’acteurs est peut-être la chose la plus complexe et en même temps ce qui m'amuse le plus dans la création cinématographique (...). Nous voulions que tous les éléments convergent vers la subtilité. Pour les acteurs, c'était une épreuve épuisante, ils ont dû me haïr car je leur disais 'ne bouge pas ce sourcil', et ensuite ils me disaient 'au fait, tu m'as rendu hyper conscient de la façon dont nous bougeons les sourcils'", raconte-t-il.
Il explique notamment que l'une des difficultés de la direction d'acteurs, au Mexique, provient du fait que beaucoup de comédiens viennent des telenovelas (séries télévisées) et ont donc l'habitude d'un type de jeu particulier. "Ces comédiens souhaitaient relever le défi avec moi et nous sommes parvenus à l’essence des choses, en croyant aveuglement qu’il est peut-être plus fort que les personnages se taisent ou parlent peu plutôt que de débiter des dialogues insipides", indique le cinéaste.
Au sujet de l'humour dans Workers, le metteur en scène José Luis Valle souligne qu'en sa qualité de Mexicain originaire d'ailleurs, en l'occurrence du Salvador, il possède une vision un peu décalée de la réalité, qui permet d'aborder certaines choses avec distance : "Malgré le fait d'avoir vécu tant d'années au Mexique, j'ai un regard de 'non appartenance', non pas que je ne veuille pas m'intégrer. Mais je continue à m'étonner de choses que les mexicains eux-mêmes ont sans doute cessé de voir. Pour moi, l'humour se transmet de manière naturelle car je suis comme cela, et j'ai un regard un peu distant par rapport aux choses qui cultivent une certaine ironie. Mais la situation vécue aussi par les personnages est si absurde qu'elle en devient franchement comique", commente-t-il.
Workers est le tout premier long métrage de fiction du réalisateur d'origine salvadorienne José Luis Valle. En effet, le cinéaste naturalisé mexicain avait réalisé un premier long en 2009, El milagro del Papa, mais il s'agissait d'un film documentaire.
Workers a été présenté lors du Festival de Berlin 2013.