Anton Corbijn en revient à sa passion, son métier initial, la photographie, en mettant en scène la rencontre entre la star naissante, James Dean, et un photographie freelance, Dennis Stock, en 1955. Le cinéaste, dont le dernier film, un thriller d’espionnage de toute bonne facture, adaptation de John Le Carré, délaisse toute prétention de grandiloquence pour nous livrer une composition somme toute assez timide dont l’attrait, l’un des rares attrait, est de pouvoir mesurer le poids de la célébrité, ses conséquences sur la vedette et plus encore, sur son entourage. Oui, parce que Life, du nom du célèbre magasine qui sera amené à publier des clichés de Dean à la veille de sa gloire, n’est ni un biopic de James Dean ni un film à la gloire de cette figure éphémère du cinéma des années cinquante, mais n’est finalement qu’une petite retranscription d’un instant de vie qui verra une vedette de cinéma se lier d’amitié avec un reporter photographe, chacun pouvant aider l’autre à accéder à la stature voulue. James Dean a alors besoin de publicité, d’images fortes, alors que Stock, lui, tente d’accéder à l’indépendance et à la gloire en pariant sur une vedette en devenir. Tout tourne là autour.
Si cela n’est jamais inintéressant, la relation entre les deux protagonistes étant pleine de paradoxes, le film d’Anton Corbijn ne décolle pourtant jamais, quand bien même les deux comédiens principaux soient excellents. En somme, c’est sans doute la monotonie dont fait preuve le scénario, sans aucun rebondissement ou changement de d’angle de vue, de prises de risques, qui fait de Life un film si inconséquent. Toutes les bonnes volontés de Corbijn et de ses acteurs ne servent réellement qu’à peu de chose face à, notamment, un manque cruel d’immersion dans les années 50. Los Angeles est inconséquente, New-York artificiel, composite de plan de synthèse sur fond vert et de façades d’immeubles austères. Seul, finalement, l’espace familial rural de James Dean, en Indiana, semble démontrer un quelconque naturel.
Pour en revenir aux comédiens, Robert Pattinson, quoiqu’un peu maniéré, endosse le rôle du malheureux bon copain, photographe ambitieux qui entrevoit en James Dean l’espoir d’un grand repartage en prime. L’acteur remplit sa part du contrat. Quant à Dane DeHaan, celui-ci est excellent dans la peau de James Dean, rôle difficile à porter dont s’acquitte à merveille le jeune acteur, acteur qui plus est bien trop rare dans le paysage cinématographique. Quant aux apparitions de Ben Kingsley ou encore Joel Edgerton, celles-ci ne servant en définitive qu’à bien peu de choses, sans doute une petite plus-value promotionnelle pour un film discret. Les acteurs, bons voire excellents, ne parviennent donc pas à faire oublier cette espèce de morosité ambiante qui plombe le film, une morosité, difficile à dire si le mot est juste, qui abaisse l’intérêt général d’un film qui sur le papier, était plutôt ambitieux. Cette morosité, justement, est aussi caractérisée par quelques séquences de dialogues sans la moindre saveur, on pense notamment aux confessions insignifiantes de Dean, dans le wagon restaurant. Un moment d’une platitude gênante.
Imparfait, donc, que ce portrait momentané d’une légende du cinéma et plus encore, d’un photographie ayant lancé sa faste carrière grâce à cette rencontre. On comprend aisément l’intérêt que pouvait porter Anton Corbijn à cet instant de vie, notamment de par le point du vue du photographe. La photographie, justement, thème central de l’œuvre, n’est, je trouve, que peu développée techniquement. Un peu gênant si l’on prend en compte les connaissances de Corbijn en la matière. 08/20