Brillant scénariste chez Amenábar, la carrière de Mateo Gil en tant que réalisateur; aussi éclectique soit-elle, n’a jamais décollé. Son dernier projet, le premier d’essence science fictionnelle, ne fera guère évoluer ce constat puisque, nonobstant certaines qualités, ‘Realive’ n’a vraiment rien pour s’imposer comme une production de premier choix. Au-delà de son originalité de surface, le thème de la cryogénisation qui ouvrirait la possibilité d’une hypothétique résurrection des décennies plus tard, lorsque la science en aurait les capacités, n’est peut-être pas aussi porteur que prévu, le traitement dramatique et “philosophique� d’un sujet foncièrement Hard SF risquant de ne convaincre qu’à moitié les profanes comme les geeks : Gil choisit de mettre en balance la capacité de la science à corriger les insuffisances corporelles et son incapacité à réfléchir au-delà des contingences pratiques, nouvelle variation sur l’éternel dilemme entre technique et éthique. Il ne s’agit donc pas de l’adaptation du cobaye à un nouveau monde - on n’est pas dans ‘Demolition man’! - mais de son adaptation à lui-même, de son adhésion à un choix qu’il a fait sans en mesurer pleinement les conséquences. D’ailleurs, la totalité de l’action se déroule dans le laboratoire où a lieu l’expérience, ce qui fait qu’il n’y a pas grand chose de visuellement stimulant à découvrir : c’est la SF “papier glacé� des films d’Alex Garland...mais si ça se trouve, eut-il mis le pied à l’extérieur qu’on aurait écopé de la SF “Blade runner� de tous les autres ! . Comme pour prendre le contrepied de ce futur dont on comprend bien qu’il est froid et aseptisé, l’évocation des souvenirs de l’ancienne vie lorgne du côté de chez Terrence Malick, chaleur, sensualité, lever de soleil sur les herbes hautes et effluves panthéistes appuyées. Ce chantage à l’émotion fonctionnerait à merveille si l’acteur principal n’était pas aussi insipide, au point de neutraliser la charge mélancolique de cette nouvelle existence dépourvue d’enjeux qui vaillent. ‘Realive’ est plus convaincant lorsqu’il expose les pour et les contre du droit à entraver le processus naturel de la vie, mais il le fait mieux par les images et les actes que lorsque le cobaye développe son point de vue en voix off, auquel cas le résultat se transforme alors en un pensum trop bavard pour convaincre. A condition d’apprécier les films statiques et réflexifs, il y a du bon dans ‘Realive’, c’est indéniable, mais ce n’est pas encore suffisant : avec un casting mieux choisi, des partis-pris de mise en scène moins conformistes et moins de bavardage, Mateo Gil aurait peut-être pu enfin s’imposer comme un auteur à part entière, et pas seulement comme un scénariste monté en grade.