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    Mémoires d'un condamné
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Mémoires d'un condamné" et de son tournage !

    Qui est Jules Durand ?

    Jules Durand, l'homme dont il est question dans le film, est un docker, militant de la Ligue antialcoolique et de la Ligue des droits de l’homme, qui dirige le syndicat des ouvriers charbonniers en 1910. Ses principales revendications sont des douches, une cantine sur les quais et des paies qui ne soient plus versées dans les bistrots.Avec l’arrivée des bennes automatiques installées par la toute puissante Compagnie Générale Transatlantique, les charbonniers assistent à la mécanisation de leurs métiers. Le syndicaliste réclame une compensation salariale, exige le respect de la récente loi sur le repos hebdomadaire et le paiement des heures supplémentaires. Le refus des armateurs est catégorique. En août 1910, la grève éclate. Elle va durer trois semaines.

    Le 9 septembre 1910, sur le Quai d’Orléans, quatre hommes ivres se bagarrent : Louis Dongé, un « renard » succombe sous les coups de trois autres charbonniers grévistes. Ce qui devrait n’être qu’un fait divers apparaît, dans le climat de guerre sociale de l’époque, comme un moyen pour les grandes compagnies de ramener l’ordre en brisant les revendications des anarcho-syndicalistes. Jules Durand est arrêté le 11 septembre pour « incitation et complicité de meurtre ». De faux témoignages, suggestions et menaces, corruption permettent d’inculper Jules Durand, quand cent témoignages montrent le contraire.

    Pourquoi ce titre ?

    La réalisatrice Sylvestre Meinzer revient sur le titre de son film, Mémoires d'un condamné :

    "Comme il n’existe aucun document officiel, juridique, médical, municipal, aucune archive à la Compagnie Générale Transatlantique, rien –ou presque rien- sur l’affaire Jules Durand, il n’était pas possible de faire un film documentaire classique. C’est donc un film sur la mémoire, mais au pluriel : mémoires d’un homme, mémoires d’une ville, mémoires de la classe ouvrière, mémoires de ceux qui se sentent porteurs de cette histoire. Le mot de « condamné » renvoi directement à Jules Durand.

    Il a été condamné à la guillotine « au nom du peuple français » mais il a aussi été condamné à la folie et enfin condamné à l’oubli. Il y a comme une triple peine dans cette affaire. Ça rappelle aussi l’histoire de la ville, bombardée par les alliés, reconstruite complètement dans un esprit de nouveauté, et l’histoire des quartiers prolétaires dont on a cherché à changer l’identité. Ca rappelle enfin l’histoire du monde ouvrier véritablement condamné à disparaître… dans le silence.

    C’est donc un essai-documentaire qui joue sur ces notions, qui se base sur les traces et les mémoires, des lieux, des hommes que Jules Durand aurait pu rencontrer ; qui prend le point de vue rétrospectif pour renvoyer pleinement à l’actualité et même interroger l’avenir."

    Une histoire fascinante

    La cinéaste Sylvestre Meinzer raconte la genèse du projet Mémoires d'un condamné et sa fascination pour l'histoire de Jules Durand :

    "Ce qui m’étonne c’est pourquoi ce personnage, son histoire de dingue - c’est le cas de le dire - n’a pas intéressé d’autres cinéastes. C’est un scénario qui, pour quelqu’un qui fait de la fiction, pourrait être la matière à un grand film historique et politique. Quand on m’a parlé de Jules Durand, ça m’a vraiment fasciné mais ça m’a semblé impossible à réaliser. Ça me semblait démesuré, inaccessible, trop ambitieux. Mais le temps a fait son travail. Avec d’autres projets réalisés au Havre, j’ai mieux connu la ville, son histoire, ses hommes - et Jules Durand restait fort dans mon esprit. Je crois même que je le cherchais un peu partout, dans le paysage, dans les témoignages.

    Et puis je voyais le paysage Havrais en pleine mutation. Je suivais la progressive réhabilitation des Quartiers Sud qui perdaient leur identité ouvrière, comme s’il fallait vite faire oublier cette histoire là. Au moment de la démolition de la prison Dantondans le centre ancien, j’ai voulu voir à quoi ça ressemblait, prendre des images de l’enfermement où avait été placé Jules Durand. Il y avait quelque chose de terrible dans ces lieux de souffrance, qui s’effondraient sous les coups des bulldozers. Tout le monde a été soulagé de voir la prison disparaître, mais ce n’était qu’un déménagement ; elle est reconstruite ailleurs. C’est ce rapport à la mémoire que l’on efface, que l’on déplace hors du visible, qui m’a rapproché de l’histoire de Durand. J’ai pensé à la disparation des documents et ça m’a donné envie de démarrer ce film."

    Sujet d'actualité

    Sylvestre Meinzer dresse un parallèle entre notre société actuelle et celle de l'époque de Jules Durand :

    "Nous vivons dans une époque difficile, où de nombreuses personnes se sentent blessées, perdues, trahies. Le sentiment d’injustice est très fort ; le clivage entre les riches et les pauvres est terrible et la justice est trop sévère envers les plus démunis. On est dans une période de tension sociale forte, qui s’exprime particulièrement dans le monde du travail. Comme dit l’un des personnages du film, Johann Fortier (Secrétaire général des dockers CGT) alors que du temps de Durand, on était confronté à la mécanisation, aujourd’hui, les emplois sont menacés par l’automatisation.

    Or, Jules Durand est une icône de la lutte des classes et de l’oppression du système.  Jean Jaurès disait du Capitaine Dreyfus qu’il était « la victime de la raison d’état militariste » et de Jules Durand qu’il était « la victime de la raison d’état capitaliste ». Aujourd’hui, beaucoup de gens sont les victimes du système capitaliste : condamnés à désirer toujours plus des richesses toujours plus inatteignables, à travailler pour un salaire trop bas, dans des conditions de vie difficiles, avec des enjeux psychiques liés à l’individualisme et à la compétitivité qui rendent chacun plus vulnérables… Et ceci entraine un sentiment de frustration, un sentiment de manipulation, et des effets désastreux en retour.

    Or, Jules Durand est une image.  Il représente à la fois le martyre et le héro du syndicalisme. Son combat pour la justice, pour une vie décente, le combat de ses contemporains pour sa réhabilitation sont importants à rappeler."

    Une production soutenue

    Sylvestre Meinzer revient sur l'évolution de la production de son film :

    "On est parti de très petit mais on a bénéficié d’un soutien énorme et d’une grande solidarité. Du côté des dockers, on a été très soutenu, de l’Union Locale aussi, sur la plateforme de financement participatif Ulule il y a eu des centaines de participations, l’association des Amis de Jules Durand a été très proche et très active. Pierre Arditi a prêté sa voix gratuitement. Le matériel vidéo a été offert par un mathématicien communiste. Le Pôle Image Haute Normandie a soutenu le film lors du mois du documentaire... Tous et toutes, des archives aux représentants des maisons de la culture dans les quartiers, ont accompagné ce projet.

    Et pourtant, le film a été refusé par toutes les chaines nationales.  Il a pu se faire grâce à une petite chaine associative, Télé Bocal, avec l’aide de la Région Normandie, de la Sacem pour la musique, de la Scam (Brouillon d’un rêve) et du CNC. Parce qu’il existe encore des institutions courageuses qui défendent une vision singulière du monde et du cinéma. Merci ! C’est un film enfin, qui existe grâce à l’engagement d’une maison de production courageuse, Lardux Films. Je n’aurais jamais fait un tel film avec qui que ce soit d’autre car je me serai sans doute censurée moi-même.

    Si j’avais filmé un mec en costume qui sort d’une voiture de luxe avec une fille habillée en Dior et qui s’engouffre dans un hôtel très classe où on boit du champagne, j’aurais eu beaucoup plus d’argent mais ça aurait couté beaucoup plus cher. L’un dans l’autre, on s’en est bien sorti."

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