Jarmusch, moi j’ai lâché l’affaire après « The Limits of Control ». Et franchement ça a été dur parce qu’à la base, moi, je l’aimais ce cinéma de l’ami Jim. Du coup, dix ans après la rupture, voir revenir dans mon écran radar ce joli dandy du septième art avec – excusez du peu – un film de zombies, forcément ça m’a donné envie de reprendre contact. Et je ne regrette absolument pas… Alors je sais qu’en disant cela, je me range clairement dans une très fine minorité. Ce film, quelques soient les sites de critiques et de notations, se fait tailler des costards à tout bout de champ. Et le pire c’est que je comprends pourquoi. Parce que s’il y a bien un point sur lequel je m’accorde avec les détracteurs de ce « The Dead Don’t Die », c’est que ce film est effectivement un très mauvais film de zombies… Mais étonnamment, moi je ne vois pas le souci que ça pose. En même temps c’est sûrement parce qu’il me parait assez manifeste que, par ce film, Jim Jarmusch, n’a pas cherché à faire un film de zombies du tout. Ce film – quand on y regarde bien – c’est juste une immense blague. Dès la scène post-générique, Jarmusch tourne en ridicule son propre scénario ainsi que les codes du genre. Il ne fait aucun effort pour crédibiliser son édifice. Il s’amuse à tout jouer en dehors du rythme convenu. Il va même jusqu’à briser le quatrième mur ! C’est une attitude très ouvertement moqueuse. Difficile d’ailleurs de ne pas sentir un léger mépris face à ce genre qui se répète ad nauseam. Un peu à l’image de certains spectateurs, les personnages sont lassés et peu convaincus par la routine imposée par les derniers films de zombies. Chacun sait ce qu’il a à faire. Personne n’a peur. On sait déjà comment ça va finir, alors on y va un peu en trainant les pieds… Et autant je peux comprendre que cette attitude agace les fans du genre qui étaient venus se taper un bon film de zombies, autant il faut aussi que ces mêmes fans comprennent que cette démarche peut aussi émoustiller celles et ceux qui, comme moi, en ont ras la casquette de ce type de films usé jusqu’à la corde. Par contre le seul risque avec ce genre de démarche c’est de jouer tout le temps des mêmes ficelles et cela du début jusqu’à la fin. Or je trouve que sur l’essentiel de son film, ce « The Dead Don’t Die » parvient à se revitaliser régulièrement.
Personnellement je suis très fan de la scène au diner. Pour moi c’est festival. L’arrivée abusivement nerveuse de la voiture du police, Adam Driver qui arrive très sérieusement dans une improbable Smart, Chloë Sevigny qui casse la tension dramatique en faisant des remarques sur les pare-terres de fleur. Répétition de la scène de découverte des corps. Appel de Bill Murray a gérer la « foule » composée de trois personnes. Et puis l’hypothèse zombie qui tombe comme un cheveu sur la soupe. Tout à marché sur moi. Un vrai régal.
De plus ce film parvient à développer ses propres running jokes contribuant par là-même à générer une identité sympathique qui lui est propre. A certains moments, j’avais l’impression d’être dans une parodie des Nuls, mais avec la réalisation très dandy de Jim Jarmusch. Franchement, ce film aurait pu marcher du tonnerre sur moi s’il ne s’était pas essoufflé sur son dernier tiers. Et si une idée assez amusante survenant dans les dernières minutes aurait pu sauver tout ce final mollasson (
l’arrivée de la soucoupe
) celle-ci est malheureusement désamorcée par une narration conclusive atrocement caricaturale. D’ailleurs, ce discours final est-il à prendre au premier degré ? Vu le ton du film je ne pense pas. Au contraire, je pense même que c’est encore une manière de se moquer des codes du genre. Seulement voilà, je trouve que ça tranche avec la tonalité globale du film. C’est trop abrupt. Pas assez subtil. Maladroit. Dommage quoi… Dommage parce qu’au-delà de ça, Jarmusch est parvenu à faire ce genre de blague que j’affectionne le plus : il a mis tout son savoir-faire formel au service d’un truc pas sérieux. Parce que oui, l’air de rien ce film est quand même vraiment bien ficelé formellement parlant. Et il sait manipuler ses étrangetés et ses Mcguffin avec suffisamment d’habilité pour ne pas ennuyer malgré le manque de sérieux évident de sa démarche. Alors je comprends que ça en ai perturbé plus d’un. Mais moi, en tout cas, ça m’a clairement réconcilié avec l’ami Jarmusch. Chouette… Bon après, ce n’est que mon point de vue. Donc si vous n’êtes pas d’accord et que vous voulez qu’on en discute, n’hésitez pas et venez me retrouver sur lhommegrenouille.over-blog.com. Parce que le débat, moi j’aime ça… ;-)