J'ai beaucoup aimé ce film, très riche, sur lequel il y a beaucoup à dire, et qui ne raconte pas qu'un histoire de gangs. Je ne connaissais pas la New York du XIX ème siècle sous cet angle, c'est à dire celui d'une tension sociale et ethnique extrême. L'univers dans lequel vivent les plus fortunés et ceux qui le sont (beaucoup) moins est totalement différent; ce n'est pas quelque chose que l'on s'attend à voir aux Etats Unis, pays du fameux self made man. Par ailleurs, on reste dans la ville, là où les Européens débarquent et semblent rester, à rebours de l'idée du pionnier et de la Frontière. Les Etats Unis n'y apparaissent pas comme un pays de liberté. Par ailleurs, ce film nous montre aussi ce qu'était un "carnaval" à l'époque, c'est à dire un exutoire violent et anarchique, bien loin des festivités pacifiques que l'on connait de nos jours. Le maintien de l'ordre est lui-même une affaire de rapport de force dont il est assumé qu'il va entrainer de nombreux morts. Par ailleurs, dans ces milieux populaires, l'idée de "religion" est différent de celle que l'on connait de nos jours: on y voit des rites plus ou moins sanglants comme venus de la nuit des temps, avec un Dieu vengeur et qu'on prie pour qu'il nous donne la force d'abattre nos ennemis. L'épisode de la prière est à ce titre totalement significatif, avec la différence de contenu entre les deux chefs de gang et le bourgeois. De manière générale, le film nous parle aussi de Nation, de modernité, et de ce que recouvre ce terme, et de toutes les hypocrisies que cela peut cacher. Il y a pas mal de temps forts, de la scène du théâtre à l'épisode des élections, truquées comme il se doit, de défense des minorités etc...Le film arrive à nous montrer tout cela sans être manichéen; en définitive personne n'y est sympathique, la violence (justifiée ou non) est partout, dans tous les partis, dans tous les camps. Donc au total, un immense film, sémiologiquement très riche.