Les Trois Fantastiques se déroule en Région Grand Est, entre Charleville-Mézières et Revin, comme pour Pollux, le précédent court métrage de Michaël Dichter. Le réalisateur explique : "Cette région, et plus précisément cette zone des Ardennes, me parle énormément. J’ai eu le sentiment, dès les premiers instants à Revin et avant même d’y tourner le court-métrage, que cette ville était la jumelle de condition sociale actuelle de la ville de région parisienne dans laquelle j’ai grandi au début des années 2000."
"Toutes les rencontres que j’ai faites dans les Ardennes allaient dans le même sens : les personnes qui y vivent ont une âme battante et généreuse, mais elles se sentent laissées pour compte, isolées. À cause de la désindustrialisation, à cause du chômage, à cause du manque de perspectives. Une ville comme Revin a compté jusqu’à 12 000 habitants à la fin des années 60. Il en reste à peine plus de 5 000 aujourd’hui. Presque deux voisins sur trois ne sont plus là. Ceux qui sont restés ont été très marqués par ces départs."
Les Trois fantastiques tourne autour de la question de l’abandon : un père absent qui a abandonné ses enfants, une mère qui abandonne son rôle de mère, un grand frère qui abandonne son petit frère, un ami qui abandonne ses amis, etc. Le tout dans une ville où les habitants ont abandonné la lutte et où l’usine qui les fait vivre abandonne le territoire. Michaël Dichter précise : "Ce sont des choses qui me parlent. Quand le système est trop écrasant pour lutter, il faut trouver d’autres manières pour vivre et survivre, c’est ce que je raconte dans ce film."
"Et en plus, les Ardennes sont tellement cinématographiques, à toutes les saisons ! Je ne remercierai jamais assez Léo Pignaud, du bureau d’accueil des tournages de la Région Grand Est qui, en 2017, m’a conseillé d’aller visiter Revin en ayant l’intuition que c’était l’endroit que je cherchais pour implanter mes histoires."
Raphaël Quenard, qui joue le frère Max, a été découvert par Michaël Dichter dans le court métrage Les Mauvais garçons d’Elie Girard et dans la série Family Business, dans des rôles qui n’ont rien à voir avec celui des Trois fantastiques. Le metteur en scène confie : "J’ai tout de suite décelé chez lui une humanité particulière. J’ai ressenti une forme d’évidence."
"À l’époque, il n’était pas connu comme aujourd’hui. On s’est rencontré, je lui ai très vite dit que c’était lui le rôle, je n’avais pas besoin qu’il passe de casting. On est resté deux heures à parler et ça s’est fait naturellement."
Côté références, Michaël Dichter cite Stand By Me et Les Goonies. Il explique : "Ce sont des films marquants, des films qui viennent de l’enfance, que tu ressasses. Ils reviennent automatiquement. Je fais partie d’une génération qui a été élevée par ce cinéma-là. Il y a aussi Northwest de Michael Noer, notamment en ce qui concerne la relation fraternelle, à quel point elle peut avoir une influence déterminante."
"Little Odessa a aussi été important. James Gray est quelqu’un qui m’inspire beaucoup. À la question : « comment envisagez-vous le cinéma ? », il a un jour répondu « c’est un mélange entre la vérité et le spectacle ». Il a mis le doigt sur quelque chose qui va me suivre très longtemps."
Chercher les trois adolescents a duré plusieurs mois. Michaël Dichter a reçu des centaines de candidatures, comme il s'en remémore : "On est allé à la fête de Noël de Charleville, par exemple, il fallait qu’on se fasse remarquer, alors j’avais scotché sur moi des annonces pour casting en mode homme-sandwich !"
"On a reçu beaucoup de tapes, des vidéos via lesquelles je voulais qu’ils me parlent de leur meilleur copain, qu’ils me racontent un souvenir marquant, une histoire qui leur procurait une vive émotion. Le processus a été long parce qu’on recherchait des individus, des natures mais aussi l’alchimie d’un groupe, un lien fort."
"Le trio s’est trouvé comme ça. Jusqu’à la dernière minute ça a beaucoup bougé, puis je les ai vus tous les trois et c’était évident qu’il se passait quelque chose. On a ensuite fait des mois de préparation avec les gamins. Les dialogues étaient très écrits mais au cours de ces répétitions, certains sonnaient faux."
"Ces adolescents n’ont pas la même façon de parler que moi. Je leur demandais souvent : comment toi tu le dirais ? J’enregistrais tout et, au fur à mesure, je réécrivais puis je leur envoyais une nouvelle version du scénario. La version finale est une version qu’ils ont quasiment écrite, pour ce qui est des dialogues."