Déroutant, intriguant de prime abord. Et finalement charmant et franchement mélo… Mais pourquoi pas ! J’ai marché dans l’affaire, avec une petite pointe d’agacement, peut-être, lors d’un final quasi lacrymal, si j’en croyais mon émotion étouffée... Et pour une fois qu’un réalisateur ne transforme pas de vénérables bonnes sœurs en monstre de perversité.
Sur les premières séquences, on croit se retrouver dans un scénario à la Raoul Ruiz. Et puis non, le récit se structure, se linéarise entre road movie et thriller. Pas de malentendu ! Ce qui prime dans Fermer les yeux, c’est l’écrit et les dialogues, au plus près des visages. De la littérature en images, les personnages, servis par de sobres et grands acteurs (inconnus de moi, souvent ceux que je préfère), ont une vraie épaisseur et complexité. Et bien sûr, une vraie difficulté, vraie douleur, qui leur est commune : la perte, la disparition, réelle ou symbolique, subie ou volontaire, d’un enfant, de la mémoire, de sa propre histoire…
J’ai bien aimé l’idée, suggérée par le film, que le cinéma pouvait nous soigner, nous soulager, nous guérir peut-être pas, mais pas loin !
En sortant de la salle, je voulais prendre un verre dans mon bar habituel, seul en terrasse histoire de léviter quelques minutes encore parmi des scènes clefs du film. Le bar retransmettait un match de rugby. J’ai fui pour regagner mon lit et fermer les yeux à mon tour en direction du Triste Roi, d’une falaise la nuit, d’une maison de retraite havre de bonté et de cette projection dans une salle de cinéma désaffectée où un miracle pourrait peut-être advenir. Peut-être... Le plus simple, c’est que je retourne retrouver dans l’obscurité tout ce petit monde à l’écran lié par… « Le cinéma, disait André Bazin, substitue à… » Vous connaissez la suite.