J’ai rarement vu un film aussi frais et aussi coloré émotionnellement que Signes, avec toujours cette même justesse, dans chacun des registres, dans chacune des émotions qu’il donne à ressentir. C’est un véritable tourbillon de toutes les émotions possibles, décuplées avec tout le génie et la sensibilité de son auteur, et agencées en une œuvre prodigieusement, miraculeusement cohérente. On frissonne, on rit, on sursaute, on pleure… Mais Signes a quelque chose de singulier, de fascinant, et qui se situe au-delà de son apparence de divertissement. Il cache en lui un film passionnant, complexe et d’une richesse ahurissante, qui se révèle un peu plus à chaque vision. La pureté de ses plans étranges et le velouté de ses couleurs font penser aux images d’un songe, la simplicité de ce qu’il met en place dans sa narration lui donne les qualités d’une fable. Shyamalan met en image cette quête touchante et universelle de ces personnages qui cherchent à mettre des mots sur des émotions, des souvenirs, à donner la parole aux sentiments, à injecter du sens (les signes) à leur malheur, à leur existence, à se trouver un rôle, une place dans ce petit monde qu’est la famille. Bref, à travers Signes, Shyamalan s’exprime, avec inquiétude, sur la foi, sur la religion, dans ce que ces notions signifiaient au départ, dans ce qu’elles sont des liens, ce qui relie les êtres entre eux, indépendamment d’une forme de croyance en un divin. Le divin, c’est ce qui nous lie, semble nous dire le film. Le temps de faire un film sur une invasion extra-terrestres dans un champ de maïs et Shyamalan nous propose une très belle métaphore sur l’humanité, la civilisation et son histoire, l’éclosion de la parole, l’ouverture au monde, la consolidation des liens familiaux, l’expérience du deuil, la place de l’enfance, la transmission des souvenirs, le rapport à l’imaginaire, la foi…A mes yeux, Signes est un film immense. Mon Shyamalan préféré.