Avis sur Moïse et Aaron

Je continue la filmographie de Straub et Huillet et on peut dire que ça va de mieux en mieux, après le rejet total d'Antigone. En fait le film est très proche formellement d'Antigone que j'avais vraiment détesté, on est très souvent dans le plan fixe, dans des décors épurés avec des longs monologues dits un peu platement.

Sauf que la différence avec Antigone est grande, c'est qu'il y a de la musique, un propos, une vraie mise en scène intéressante... Enfin du cinéma quoi.

Vu que c'est adapté d'un opéra la musique est omniprésente et habite le film, elle comble les vides, rythme les dialogues filmés en plan fixe, etc. Alors je ne connais pas le compositeur, je ne connais pas forcément grand chose en musique de manière générale, cet opéra ce n'est pas forcément ce que je préfère, mais je n'ai pas détesté non plus.

Cependant ce que j'ai le plus aimé c'était le message du film, cette relation entre Moïse et Aaron qui est bien souvent oubliée des autres adaptations de l'Exode. Je n'ai pas le souvenir de l'avoir vu dans les 10 commandements, dans le prince d'Egypte ou dans Exodus. Du coup c'est un angle d'approche vraiment nouveau que le duo de réalisateur nous offre, mais surtout le traitement semble différent de celui de la Bible tout en étant assez fidèle. Aaron propose de faire le veau d'or, si Moïse semble lui pardonner dans la Bible, ici ce n'est pas le cas.

Et en fait c'est toute la relation entre les deux qui est passionnante, je trouve ça génial, entre celui qui est populaire, qui accepte les plaisirs de la vie et celui qui veut respecter Dieu et qui a la lourde tâche de discipliner le peuple hébreux qui fait un peu n'importe quoi.

Je n'avais pas vraiment aimé l'Exode (le bouquin) et cette vision vue par Straub et Huillet me plaît beaucoup plus (alors je ne sais pas si le message vient de l'opéra ou des deux réalisateurs). Il manque cependant le troisième acte, je n'ai jamais vu un film se finir de façon aussi abrupte.

Franchement je suis assez conquis... et il y a des choix de mise en scène que j'adore, comme par exemple le moment où Aaron va céder au peuple hébreux pour faire n'importe quoi, la caméra tourne et passe successivement les différents groupes qui chantent et se répondent. Ou bien au début, lorsque Moïse et Aaron arrivent chez les hébreux, leur arrivée et commentée, mais la caméra filme les commentateurs plus que l'arrivée elle même, ce qui rend leur arrivée finalement que plus impressionnante.

Même si de manière générale c'est un film on ne peut plus minimaliste, et j'aime également cet aspect...

Franchement c'était vraiment bien.

Sorti en 1975, Moïse et Aaron est une adaptation de l’opéra éponyme (et inachevé) de l’Autrichien Arnold Schönberg par le couple de cinéastes Danièle Huillet & Jean-Marie Straub. Entièrement chanté, tourné dans les Abruzzes de manière artisanale, quoiqu’avec plus de moyens que leurs productions habituelles, le film évoque les figures bibliques de Moïse et de son frère Aaron, chargés par Dieu de libérer le peuple d’Israël de l’esclavage en Égypte. Mais rapidement, ils vont se diviser sur la stratégie à adopter pour convaincre leur peuple de l’existence divine, alors que Aaron va leur offrir le veau d’or, ultime symbole de l’idolâtrie. Un long-métrage exigeant, à aborder comme tel afin de pouvoir en apprécier certains passages.

Le sommet de l'élitisme cinématographique? Imaginez la rencontre entre le maître du sérialisme musical et les chantres de l'intégrité appliquée au 7e art à l'occasion d'un opéra filmé... J'ai bien peur que les personnes sachant apprécier à sa juste valeur une telle oeuvre ne soient pas légion, et je n'en fait malheureusement pas partie. Découvrant plus ou moins Arnold Schönberg avec son «Moses und Aron» il n'est pas difficile de concevoir l'embarras dans lequel je me trouve pour émettre un quelconque jugement à propos de ce film. Ayant déjà perdu tous mes repères avec la musique de Schönberg, les images épurées à l'extrême de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet m'ont achevé. Au moins la partie qu'il me sera un tant soit peu possible de critiquer, ce sera l'apport du couple de cinéastes quant à l'oeuvre du compositeur autrichien. Et pour le premier de leurs longs métrages qu'il m'est donné de visionner je suis quelque peu déçu. L'économie de leur art fonctionne et ce dès le début (magnifique plan fixe filmant Moïse de 3 quarts et de dos 5 minutes durant - on est jusqu'au-boutiste ou on ne l'est pas - se transformant en plan séquence par un joli panoramique), mais quand ils en rajoutent (scènes de groupe, de danse, etc.) les limites de leur esthétique n'en deviennent que plus criantes. Leur mise en scène chirurgicale et géométrique, d'une froideur sans nom, est toujours en équilibre entre pertinence de l'approche et vacuité totale (l'exercice de style n'est pas loin). Exigeant, leur cinéma l'est, c'est absolument indéniable. Génial, voire même inspiré, c'est beaucoup moins sûr. L'imagerie traditionnelle associée à Moïse ne nous est d'ailleurs pas épargnée. Néanmoins la forme s'accorde parfaitement avec le propos, et si «Moïse et Aaron» n'enrichit guère l'opéra de Schönberg (quoique), au moins a-t-il le mérite de ne pas le dénaturer. Pour le reste, il est regrettable qu'il n'y ait pas d'autres critiques de ce film sur Allociné (pas étonnant en même temps), car je ne saurais étendre mon analyse vers la partie qui échoit à Schönberg : la musique sérielle ne m'a toujours pas livré ses secrets... [2/4] http://artetpoiesis.blogspot.fr/