Devil's fire : les secrets du tournage

Martin Scorsese revient sur les origines de cette série de films sur le blues qu'il a initiée : "Le projet est né alors que Margaret Bodde, productrice chez Cappa productions, et moi travaillions à un documentaire avec Eric Clapton : Nothing but the Blues. Nous faisions un montage parallèle d'Eric interprétant des standards du blues et de métrage d'archives de bluesmen plus anciens. Nous étions tous frappés par la présence et la force primitive de ces juxtapositions (...) A partir de là, il semblait naturel de demander à un certain nombre de réalisateurs dont j'admirais le travail, chacun ayant un lien profond avec la musique, de donner leur exploration personnelle de l'Histoire du blues. Chacun abordant le sujet selon son propre point de vue, je savais que nous obtiendrions quelque chose de spécial, pas un sec énoncé des faits, mais une mosaïque authentiquement passionnée."

Devil's fire est le quatrième volet d'une série sur le blues. Il sort en salles quelques semaines après The Soul of a man de Wim Wenders, et La Route de Memphis de Guy Pearce, et Du Mali au Mississippi, de Scorsese. Les films suivants sont Red, white and blues de Mike Figgis, Godfathers and sons de Marc Levin, et enfin Piano blues de Clint Eastwood.

"Le son du blues a toujours fait partie de mon environnement. Tandis que les années passaient, cette musique a lentement émergé comme une source essentielle d'images, d'humour, d'ironie et de réflexions sur la condition humaine. J'ai toujours eu envie de raconter une histoire sur le blues qui non seulement reflète sa nature et son contenu, mais qui s'intéresse aussi à sa forme elle-même."

Devil's fire présente la particularité de mêler des personnages de fiction - l'enfant et l'Oncle Buddy - à des images d'archives. Charles Burnett justifie ce choix, en évoquant la dimension autobiographique du film : "La narration pour le film n'est pas strictement autobiographique, mais a une base réelle. J'ai utilisé ces expériences comme points de repère. Mon oncle ressemblait beaucoup à Buddy. Comme le trickster"(l'escroc) du folklore, Buddy fait vivre à son neveu des expériences qui l'aideront à construire sa personnalité. Je voulais raconter une histoire dont la forme fasse écho au blues. Il y a du jeu à l'intérieur du matériau ; on essaie de garder une certaine liberté. Le personnage joué par Tommy Redmond Hicks - Oncle Buddy - incarne le feeling du blues et toutes ses contradictions."

Le titre original, Warming by the devil's of fire, provient d'un sermon qu'on entend dans le film.

Parmi les artistes dont on peut voir des archives dans Devil's fire, on peut citer Muddy Waters, Bessie Smith ou encore Willie Dixon.

Charles Burnett revient sur les relations entre le blues et l'église, un des thème scentraux de son film. "Historiquement, il y a une relation complexe, voire un antagonisme entre le blues - la musique du diable, de Satan - et l'Eglise au sein de la communauté noire. Beaucoup d'interprètes, des femmes en particulier, ont quitté l'Eglise pour faire carrière dans le blues, puis revenir à l'Eglise sur la fin de leur vie. Dans Devil's fire, nous mentionnons Son House, qui fut un temps prédicateur, fit de la prison pour meurtre - légitime défense -, tenta à sa libératon de redevenir prédicateur, pour finalement revenir au blues. "Georgia Tom" (de son vrai nom Thomas Dorsey) écrivit des chansons au contenu ouvertement sexuel pour Bessie Smith et d'autres avant de signer quelques magnifiques religieuses. Sister Rosetta Tharpe et le révérend Gary Davis ont fait de même."