Très classique, mièvre, rempli de déjà-vus concons et non dénué de défauts techniques, ce petit film joliment sentimental, sorti en fin d'année, peut se regarder plaisamment mais il ne fait pas rêver ou si peu et n'a rien de bien original. On se retrouve vite recouvert par un sentimentalisme de pacotille. Toute la première partie, autour de François le-chouette-mec (Pio Marmai), aurait pu être évacuée et l'histoire aurait pu commencer au cimetière. On n'a pas vraiment besoin de se taper la micro-story de départ sensée faire ressentir la peine de l'héroïne; c'est à la fois un peu longuet, bébête et coupé aux ciseaux. Le tout ne se suit pas désagréablement mais c'est convenu, quasi sans surprise! D'ailleurs, toute l'histoire se trouve résumée dans le pitch. David Foenkinos, le prof de lettres qui l'a écrite, offre une réalisation épurée pour ne pas dire platement télévisuelle, manquant de rythme, et il tente de rattraper ce manque de relief en égrainant tout un jeu d'émotions et d'humour. Soit, "une seconde, c'est un discours" mais la banalité des situations n'empêche pas l'effet soporifique; d'ailleurs, l'héroïne tient grâce au café! Certaines réflexions spirituelles du roman (bon, ça reste de la camelote à la Marc Levy ) n'apparaissent pas. Foenkinow s'efforce de donner au personnage principal, incarné par Audrey Tautou, une dimension gentiment romantique, entre pavés, demande en mariage stupide, Tour Eiffel, vieux souvenirs et petits cadeaux, plus la voix off pour le côté Amélie Pouliche: ça tombe un peu à l'eau vu que l'actrice, maigrichonne et pas top, offre de rares sourires au milieu d'un tirage de gueule effroyable. Certes, elle a le cœur brisé, mais la tendance Entreprise des Cœurs Brisés, c'est lourd! Surtout que niveau personnages, on rue dans les clichés. Audrey Tatou est la fille simple-équilibrée-sympa mais meurtrie, légèrement naïve, néanmoins dotée d'un caractère bien tranché; son prénom, Nathalie, ne lui sied pas, mais comment ne pas faire le rapprochement sans doute volontaire avec Amélie? François Damien joue (tout à fait dans le rôle) Markus le Suédois désabusé, un gars esseulé extrêmement niais mais bon, simplet mais délicat, lourdaud mais sensible, ringard mais lucide (on a toutefois du mal à imaginer qu'il lise Cyoran, comme le dit le roman - l'auteur s'y retrouve-t-il?) Et puis il y a le con de boss pervers, sa pétasse de secrétaire, les parents bien gentils, la grand-mère adorable (plus crédible qu'Ariane Ascaride et son nez) et la bonne copine enfin-pas-si-bonne-que-ça, toute la tribu des stéréotypes. Bruno Todeschini est épatant en vil patron harceleur. Le film, très mineur (tout aussi mineur pour Audrey, avant Thérèse D. et l'Écume des jours) reste trop raisonnable et s'étend toute en délicatesse mais sans ampleur. Côté lumière, l'artifice jure (ah, les faux éclairages de nuit chez la grand-mère!); les plans en lumière naturelle s'avèrent en revanche réussis. On pourra apprécier les quelques chansons d'Emilie Simon (au style musical si shrilling Kate Bush que c'en est troublant), qui donnent du peps et un peu de rêve à cette expérience passablement ennuyeuse, improbable sur les bords et tout à fait désuète. En tous cas, le cinéaste littéraire assume parfaitement ses choix à contre-courant, en exposant cette attraction des corps où la sensualité damne le pion à la sexualité, où les moments de complicité partagée sont préférés au grand élan amoureux. Malheureusement, c'en devient presqu réac-compatible. Même le premier baiser que Markus donne à Nathalie n'a rien de vrai (il l'embrasse au-dessus des lèvres). Beaucoup de choix "ridicules", d'ailleurs ce mot revient plusieurs fois dans le film. Bref, cette romance pov' mec included, sans grands éclats, garde le potentiel d'émouvoir les esprits fleur-bleue mais sonne niais, ringard et toc.