La Délicatesse est une comédie romantique assez banale si on s’en tient à son pitch (une jeune femme doit se reconstruire en amour, et finit par rencontrer un homme auquel elle ne se destinait pas au départ). Oui mais voilà, le film possède une french touch des plus agréables. Les allergiques au « cinéma français », comme je n’aime pas l’appeler, risquent de faire une poussée d’urticaire, les autres se délecteront de la poésie, de l’humour et du romantisme du film, tout en délicatesse (oui je sais elle est facile celle-ci, mais néanmoins très représentative du film).
Attention, la suite de la critique révèle un certain nombre de spoilers.
La Délicatesse débute dans un romantisme exacerbé, Audrey Tautou et Pio Marmaï formant un couple parfait de cinéma. La complicité des deux acteurs et une mise en scène un brin tape à l’œil, mais tellement juste pour ces moments-là, impose forcément l’adhésion du spectateur pour cette histoire d’amour qui sonne comme une évidence. En témoigne la douceur qui se dégage de la très simple scène du lit, faite de gros plans au dessus de l’épaule sur les visages d’Audrey Tautou et Pio Marmaï, pleins de tendresse. Une introduction d’autant plus délicate que c’est sur elle que repose toute la justesse de la suite du film. Ainsi le décès de François crée l’impact voulu et le déchirement de Nathalie est palpable (merci aussi au talent d’Audrey Tautou). La période de deuil est d’ailleurs très réaliste, et passe outre les clichés.
David et Stéphane Foenkinos, après avoir posé les bases de leur récit, et avoir très habilement manié des ellipses, peuvent alors entrer dans le vif du sujet : la reconstruction d’une femme qui ne semble plus pouvoir ? vouloir ? ressentir quelque chose pour quelqu’un. Le seul moyen qu’à l’amour de franchir ces barrière est alors de surgir par surprise, là où Nathalie ne l’attendait pas (c’est beau le cinéma…). Il surviendra donc sous les traits de Markus, le vieux garçon pas franchement beau gosse, un peu timide, un brin gauche, interprété par un François Damiens fait pour le rôle. L’acteur joue, comme d’habitude, magnifiquement le registre de l’humour, mais peut enfin aussi dévoiler un côté plus émouvant et attendrissant. Là est d’ailleurs tout l’intérêt de ce jeu de séduction entre les deux personnages, plus réaliste qu’à l’accoutumé dans la comédie romantique. On y retrouve les hésitations, les élans incontrôlés, les doutes, les certitudes des premiers instants d’une relation, et un vrai romantisme faits de petits gestes et d’attention. Alors on regrette, oui on regrette vraiment, que David et Stéphane Foenkinos se lâchent parfois à en rajouter des caisses sur le physique de Markus (les interventions de l’amie de Nathalie, du patron ou encore de l’homme du bar sont les plus détestables). On a compris dès l’apparition du personnage qu’il ne doit pas être sûr de lui en amour car en marge des codes actuels, alors pourquoi ce triple surlignage ? Les doutes de Markus sont clair, ceux de Nathalie aussi, liés à son passé ; alors pourquoi faire intervenir en plus des éléments extérieurs pour faire obstacle au couple, plutôt que de se centrer sur lui ? Un bémol qui n’enlève rien à l’atmosphère très empreinte de douceur, de tendresse et d’humour du film, mais qui entache un peu ce qui aurait pu être un très bon film. La Délicatesse reste quand même un (petit) coup de cœur.
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