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    Trains étroitement surveillés
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    14 critiques spectateurs

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    cylon86
    cylon86

    2 255 abonnés 4 430 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 22 octobre 2014
    Premier long-métrage de Jiri Menzel, "Trains étroitement surveillés" s'inscrit directement dans la mouvance de la nouvelle vague tchèque et obtint en 1968 l'Oscar du Meilleur Film Étranger. Racontant l'histoire de Milos, jeune homme travaillant dans une petite gare pendant la seconde guerre mondiale qui se retrouve incapable de satisfaire la femme qui le séduit, le film réussit le pari osé de mêler la guerre et la sexualité. Car si la guerre est tout de même importante (ce que montre la fin du film), c'est avant tout de sexualité dont il est question. La plupart des personnages ne pensent qu'à ça, les femmes y compris ! Avec une certaine liberté de ton qui confine souvent à l'humour, Jiri Menzel n'hésite pas à aborder le sexe avec les tabous contraints par l'époque mais en y ajoutant tout de même une bonne dose de sensualité comme en témoigne la scène où le sous-chef de gare utilise des tampons pour marquer les fesses de l'employée de garde cette nuit-là. Quasiment sans détour, en posant un regard tendre sur son personnage principal qui cherche désespérément une femme mûre pour l'aider à prendre confiance en lui, le réalisateur parvient à parler de sexe sans choquer mais avec une modernité qui surprend encore aujourd'hui. Un film vraiment réjouissant.
    brunocinoche
    brunocinoche

    69 abonnés 1 072 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 13 novembre 2014
    C'était la grande époque du cinéma tchèque avec les premiers chefs d'œuvre de Milos Forman "Au feu les pompiers" ou "Les amours d'une blonde" et cet ovni signé Jiri Menzel, "Trains étroitement surveillés", pur joyau de comédie dramatique au ton totalement décalé. Comme son collègue et compatriote Milos Forman, Jiri Menzel était fort inspiré par l'influence de la Nouvelle vague française et sa liberté de ton est enchanteresse. "Train étroitement surveillé", certes parfois naïf, reste une rareté à découvrir absolument.
    chrischambers86
    chrischambers86

    11 958 abonnés 12 157 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 23 octobre 2011
    Un langage nourri de symboles mais tout autant d'observation malicieuse, une ècriture fluide ont très rapidement classè Jiri Menzel (qui avait d'abord ètè acteur) parmi les meilleurs rèalisateurs tchèques de la gènèration des annèes 60 pour cette façon qu'il eut d'èvoquer les èmois de l'adolescence dans ce très beau "Trains ètroitement surveillès" qui reçut l'Oscar du meilleur film ètranger! Une histoire pleine d'humour sur la guerre vue d'un quai de gare de Tchècoslovaquie pendant l'occupation! A noter qu'après l'intervention soviètique de 68, Menzel resta plusieurs annèes sans travailler (on le verra comme comèdien dans des films hongrois) et ne retrouva qu'au milieu des annèes 70 le chemin des studios pour renouer, plus de vingt ans après "Trains ètroitement surveillès", avec le romancier auquel s'accordait le mieux sa verve dèsabusèe, Bohumil Hrabal. Beaucoup d'originalitè donc, de tendresse aussi pour les personnages, qui n'est pas sans charme, malgrè deux thèmes qu'on associe rarement au cinèma: la guerre et la sexualitè...
    il_Ricordo
    il_Ricordo

    94 abonnés 407 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 4 février 2012
    Trains étroitement surveillés est un pur chef-d'oeuvre du Cinéma tchécoslovaque. Il présente des personnages pittoresques, depuis Milos qui se prend pour un roi lorsqu'il est couronné de sa casquette pour la première fois, son impressionnante timidité avec les femmes, le chef de gare jaloux de son subordonné, le vieil oncle lascif, et même les nazis qui se révèlent des bureaucrates complètement ridicules. Le film abonde de scènes burlesques désopilantes : Masa et Milos veulent s'embrasser, mais le train repart et leur tentative échoue comiquement. Le sofa que l'on déchire périodiquement (il représente le dépucelage de Milos) ; l'affaire la sténographe tatouée sur les fesses qui termine aux assises, etc. La timidité même de Milos est le sujet de la plupart des actions du film, et son amour pour Masa qu'il n'arrive pas à satisfaire est le prétexte de son suicide raté, cœur d'une intrigue sinon complètement décousue. Tout le monde prend Milos pour un enfant, en témoigne la scène tordante des Allemands qui s'invitent dans le wagon des infirmières. Milos cherche à y pénétrer, et on le rejette comme gamin. Jiří Menzel réalise une merveille du Cinéma européen, et, partant d'un sujet grave (la Seconde Guerre mondiale, les Allemands qui occupent l'Europe), il raconte une histoire touchante sur le malaise, la timidité, l'héroïsme, le tout baignant dans un humour touchant.
    QuelquesFilms.fr
    QuelquesFilms.fr

    224 abonnés 1 597 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 18 novembre 2014
    À la recherche d'une authenticité très inspirée par la Nouvelle Vague française, Jirí Menzel s'attache ici à des personnages du quotidien, dont il cerne les petites prétentions, les désirs, les désespoirs... Son personnage principal est à ses yeux un "adolescent maladif et attardé", un "martyr de l'amour" lancé dans un apprentissage sexuel compliqué. Portrait d'un jeune homme timide et naïf, en proie à des tourments qui le dépassent (impuissance, éjaculation précoce...) et qui le poussent même à faire une tentative de suicide. Portrait croqué avec un mélange de tendresse et de bouffonnerie légère. Mais aussi avec une ironie "en coin" qui transparaît dans les dialogues, dans la musique et dans une mise en scène truffée d'allusions sexuelles (notamment la fameuse "branlette" du cou de l'oie par la femme du chef de gare). D'autres scènes sont plus explicites et tout aussi savoureuses, comme celle où la jeune télégraphiste se fait littéralement tamponner les cuisses et les fesses par le sous-chef de gare. Tous ces moments célèbrent, avec une liberté de ton propre au cinéma des années 1960, le désir de vivre et de jouir d'une jeunesse prise, malgré elle, dans les affres de la guerre de 1939-1945. Le badinage laisse place étonnamment, dans le dernier quart du film, à l'idée d'une résistance face à l'occupant allemand. Et c'est dans cette association entre sexualité et guerre, dans ce contraste entre légèreté et gravité, que le film trouve son originalité douce-amère. Sans prétention et sans vulgarité, il n'atteint peut-être pas des sommets, mais touche au final par son humanisme discret et son sens de l'absurde.
    Plume231
    Plume231

    3 472 abonnés 4 639 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 30 mai 2009
    Un des films majeurs du cinéma tchèque qui a même remporté l'Oscar du meilleur film étranger en 1967. Cette oeuvre à la fois grave et légère dénonce à travers le contexte de l'Occupation de la Tchécoslovaquie pendant la Seconde guerre mondiale dans lequel se déroule l'action du film la dictature communiste qui sévissait à l'époque du tournage du film. La réalisation de Jiri Menzel est très soignée et insuffle beaucoup de charme et de poésie au film et les « problèmes sexuels » du personnage sont mis en avant avec beaucoup de subtilité. La distribution y est pour beaucoup dans la réussite du film en incarnant à merveille des personnages qui se révèlent au fond très complexes et en les rendant très attachants, même le personnage de collabo l'est car au final il est plus bête que méchant. Un grand film.
    Pascal
    Pascal

    117 abonnés 1 395 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 3 mars 2022
    Pendant la seconde guerre mondiale, en Tchécoslovaquie, un jeune homme prend ses fonctions de sous-chef de gare, dans une petite ville. Il tombe avec des collègues qui malgré le contexte, vivent préoccupés essentiellement par les sources de joie de l'existence. Mais l'Histoire et sa tragédie vont les rattraper. Le film est ressorti en salles en copie rééditée avec deux autres opus de son réalisateur J.Menzel, un des acteurs de la nouvelle vague tchécoslovaque avec notamment M.Forman et I. Passer ( ces derniers finiront par aller à l'Ouest à la différence de Menzel. C'est tres bien filmé et interprété. Par-delà l'histoire en elle-même, mon hypothèse est que le film propose une allégorie de l'existence et expose avec adresse le déterminisme historique sur les parcours individuels. Le film s'adresse au spectateur qui s'intéresse au cinéma d'auteur et particulièrement de celui en provenance de l'europe de l'Est.
    foch1800
    foch1800

    28 abonnés 132 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 6 novembre 2010
    film culte mondial, dans l'esprit du printemps de prague, mais qui reste un peu trop léger pour moi
    Arthur Debussy
    Arthur Debussy

    128 abonnés 675 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 18 septembre 2022
    Un film assez incroyable et inclassable... D'apparence tout à fait mineur, c'est en fait un long métrage à l'esthétique très travaillée, avec une histoire à tiroirs, aux degrés de lecture multiples, malgré un scénario qui paraît simple au possible. Récit de l'éveil sexuel d'un jeune homme un peu benêt, c'est aussi l'évocation d'une perte d'innocence, celle d'un garçon candide... mais aussi et avant tout celle d'un pays, la Tchécoslovaquie, face à l'Allemagne nazie... puis l'URSS.

    Ce film se regarde comme une comédie de mœurs d'une grande tendresse, un peu loufoque, avec des personnages imparfaits et terriblement attachants à la Lubitsch. Jiri Menzel dépeint ses compatriotes avec un regard à la fois amusé et piquant, n'hésitant pas à pointer leurs travers... Ce qui amène au deuxième degré de lecture, ces personnages symbolisant la nation tchèque face à l'envahisseur (allemand ou soviétique d'ailleurs, même si nous sommes ici très clairement durant la Seconde Guerre Mondiale).

    Tout le monde en prend gentiment pour son grade... Mais pourtant, les Tchèques, du moins certains d'entre eux, se révèlent beaucoup plus héroïques qu'on le pensait. Sorte de pied de nez à ceux qui ont tenté d'asservir, voire détruire ce pays, sa population, son histoire et sa culture.

    Un troisième niveau de lecture, enfin, peut être le récit de l'apprentissage cinématographique de Jiri Menzel. En effet, il s'agit de son premier long métrage, et il attribuera lui-même sa réussite à l'insouciance et à la légèreté du débutant. Il faut en effet un certain aplomb et une certaine confiance en soi, ou au contraire une ingénuité totale pour réaliser un film aussi libre et insolent, aussi brillant formellement et aussi riche sur le fond.

    Mais ce film, c'est aussi une photographie sublime, des cadrages magnifiques, d'excellents interprètes... et une flopée de scènes cultes (je n'en dis pas plus). Cela faisait une éternité que je comptais le voir, c'est maintenant chose faite. Je regrette juste de ne pas l'avoir fait du vivant de Menzel, qui était passé à Paris pour la ressortie en salle de certains de ses films... Reste ce magnifique long métrage, un petit chef-d’œuvre qui mérite sa flatteuse réputation.
    Bertie Quincampoix
    Bertie Quincampoix

    73 abonnés 1 737 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 29 mai 2022
    Premier long-métrage de Jirí Menzel, réalisé en 1966 c’est-à-dire deux ans avant le Printemps de Prague qui fut réprimé par les chars soviétiques, Trains étroitement surveillés est l’une des plus belles réussites de la Nouvelle vague tchécoslovaque. À la fois comique, ironique et tragique, le film nous plonge au cœur d’une petite gare de campagne, pendant la Seconde guerre mondiale, où le jeune stagiaire Milos vient de débuter un emploi. Très tourmenté par sa sexualité, alors que ses collègues plus âgés ne cessent d’étaler leurs pulsions libidineuses, il va découvrir les tracas de l’amour en même temps qu’il va se découvrir lui-même, dans un environnement fortement perturbé par vicissitudes de l’histoire. Dans un ton très libre, superbement mis en scène, ce Trains étroitement surveillés compte parmi les pépites du cinéma d’Europe de l’est des années 60.
    anonyme
    Un visiteur
    3,5
    Publiée le 8 octobre 2017
    « Trains étroitement surveillés » relève d’un atavisme des plus touchants, eu égard tant à ses intentions et à sa réalisation, qu’à sa réception. Pour qui connaît un peu la Tchécoslovaquie, ou plutôt la Tchéquie et l’esprit morave, ce film incarne en effet l’âme éternelle tchèque dans tout ce qu’elle a de délicieusement naïf, de gentiment poétique, mais aussi de modeste jusqu’à une servilité que Milan Kundera tancera souvent dans ses écrits. Car il existe bien une manière de voir nationale que le cinéma parvient ici à rendre presque malgré lui, une manière de voir que des productions internationales, multiculturelles et en définitive, désincarnées, nous empêchent souvent d’appréhender aujourd’hui. Mais alors, en quoi consiste donc cette idiosyncrasie tchèque ?

    En 2005, un sondage lancé par la télévision publique afin d’élire « le plus grand Tchèque de tous les temps » consacre le personnage de Jára Cimrman, damant le pion à Vaclav Havel, Tomáš Garrigue Masaryk, ou encore Ivan Lendl. Jára Cimrman, parfaitement inconnu du reste de l’Europe, aurait élaboré les plans de la Tour Eiffel, proposé la construction du canal de Panama aux Américains, inventé le yaourt, le CD (le Cimrman Disque, comme chacun sait), écrit une nouvelle de Tchekhov, presque découvert le Pôle nord… mais en raison de malheureux concours de circonstances, d’une malchance congénitale, l’illustre génie échoue sans cesse aux portes de la reconnaissance internationale. Ce que les Tchèques ont ainsi parfaitement compris dans les années post-communistes, c’est que ce personnage fictif et canularesque définissait bien mieux leur identité nationale que n’importe quelle statue hiératique du passé, n’importe quel héros historique au visage grave. Avec un sens de l’humour et de l’autodérision très aiguisé, « le complexe tchèque » est ainsi identifié, un petit pays certes ballotté entre les expansions impérialistes, les désirs d’assujettissement des Habsbourg, de l’Allemagne nazie, de la Russie communiste, de la démocratisation à l’américaine, mais qui frôle le tragique historique avec insouciance et légèreté, maladivement conscient que malgré un riche héritage culturel, il restera un peu en marge de l’Europe.

    « Trains étroitement surveillés », qui présente la vie quotidienne d’une gare de Moravie du Sud sous l’Occupation allemande, est indéniablement habité par ce complexe, dans tout ce qu’il a de gentiment burlesque mais aussi de frustrant. Reprenant des éléments du récit de Bohumil Hrabal, écrivain beaucoup plus « tchèque » encore que Kundera, les premiers plans du film ne nous trompent pas. Une succession de vignettes retrace la généalogie maudite du personnage principal, Milos Hrma, aspirant sous-chef de gare : un arrière-grand-père tambour major blessé lors de combats sur le pont Charles, pensionné et alcoolique, molesté à mort par des tailleurs de pierre dont il moquait l’activité ; un grand-père hypnotiseur qui tenta en vain d’exercer son art sur les tanks allemands aux portes de Prague ; un père mécanicien retraité à quarante-huit ans qui passe ses journées à se tourner les pouces. C’est avec cette même insouciance guillerette, plus ou moins consciente, que Milos Hrma aborde sa nouvelle carrière spoiler: et gagne une autre station de la grande Histoire, la Résistance à l’occupant allemand.


    Cependant, avant d’aborder cette rencontre quasi fortuite, « Trains étroitement surveillés » s’attache à une galerie de portraits gentiment loufoques. Le personnel de la gare de Loděnice est ainsi composé de fainéants sympathiques et de personnages moins détestables que ridicules : un chef de gare obnubilé par sa promotion d’inspecteur, son antithèse en la personne du sous-chef jouisseur, un vieillard poète (« Comme cette pendule sonne bien ! »), des visiteurs nobles aux traditions désuètes, un chef de district qui collabore avec ferveur, et une pléthore de créatures de charme, contrôleuse, télégraphiste, infirmières… Au milieu de tout ce tintouin, Milos se forme sans efforts, assimile les codes professionnels sans apprentissage contraignant, glissant sur les événements en Pierrot lunaire, réceptif aux surprises qu’il contemple avec les yeux ébahis de Buster Keaton. Il y a dans ces premières séquences une agréable concordance de ton et de propos. Car le réalisateur Jiří Menzel assimile lui aussi, pour son premier long-métrage, les codes stylistiques de la Nouvelle Vague française, mais sans l’esprit de pesanteur et de sérieux agaçant chez la plupart de ses modèles. A l’instar du scénariste et écrivain Bohumil Hrabal, les portraits sont brossés avec un humble humanisme, attentif aux petites gens, sans la moquerie, la condescendance, le mépris farcesque des élites intellectuelles qui cherche à faire peuple, ou à rire du peuple plus qu’avec le peuple. Ce premier mouvement louable est paradoxalement aussi la limite du film, comme s’il y avait une complaisance dans cette légèreté, une honte à hanter le propos d’un quelconque tourment. Ce que les Russes parviennent à faire dans le rendu des visages, de la foule, dessinant une épopée nationale fière et lyrique, se joue ici en mode mineur.

    « Trains étroitement surveillés » met pourtant en scène une petite tragédie de mœurs, qui au gré des tâtonnements, a le mérite de produire une image iconique du cinéma tchèque. spoiler: Milos Hrma, sensible à l’atmosphère de marivaudage et de liberté sexuelle qui règne au sein de la gare, se trouve vite et sans le comprendre dans le lit d’une jolie contrôleuse, mais « se flétrit comme un lys ». Après une tentative de suicide bien convenue, le jeune apprenti entame une quête autour du désir pour vaincre son impuissance. Cette quête est d’abord discursive, Milos pose des questions, s’interroge, étale son cas et attend des réponses. Nous repensons alors à certains développements de Milan Kundera sur l’art du roman et François Rabelais. Dans « Le Tiers Livre », Panurge se pose la question du mariage et cherche conseil au gré de ses pérégrinations. Ces conseils sont souvent décevants en eux-mêmes, mais leur somme permet au personnage d’explorer divers horizons et d’éviter tout dogmatisme pesant. Milos se confronte de même aux prescriptions déconcertantes du docteur interprété par Jiří Menzel lui-même, comme penser au foot lors du coït, à la colère de son supérieur de district, à l’incompréhension de son père, et même à une certaine gêne chez le sous-chef viveur incapable de transmettre ses recettes de séduction. En fait, le remède à l’impuissance de Milos ne viendra donc pas des agélastes (littéralement en grec, « ceux qui ne rient pas »), ne viendra pas d’un discours sérieux ou d’un déroulé narratif qui ferait de « Trains étroitement surveillés » l’adaptation ratée d’un roman d’apprentissage.


    Au contraire, ce que Jiří Menzel propose sans le savoir d’abord (certains entretiens avec le réalisateur attestent d’une compréhension postérieure à la création de l’œuvre), c’est une réponse purement cinématographique. spoiler: Le désir recherché en vain par Milos est suscité depuis le début du film chez le spectateur au moyen d’une multiplication d’images parfois lourdement suggestives, et néanmoins non perçues par le personnage en un procédé assez subtil d’ironie tragique. L’érotisme léger et onirique qui parcourt le film, un entrejambe de cavalière, un crayon se promenant sur un décolleté, une orgie dans un wagon entre infirmières et soldats allemands, un oncle photographe et tripoteur, une branlette de cou d’oie, achoppe toujours sur un obstacle au regard de Milos : caractère serré d’un plan, rideau, avion en carton-pâte. La réussite finale du jeune homme, sa jouissance avec une résistante allemande, viendra quand il se taira, ne cherchera plus à philosopher et deviendra sensible aux signes. Cependant, en devenant homme, il rentre aussi dans l’Histoire, perd sa naïveté, et entreprend un acte viril de résistance qui se soldera par une mort aussi tragique que ridicule, vaine. Et c’est avec une nouvelle ironie, presque une heureuse déconvenue, que le spectateur se rend compte que le véritable propos du film nichait dans cette quête de la sexualité, du « devenir homme », et non dans la nécessité d’une résistance nationale à l’envahisseur. La réhabilitation voulue par Menzel n’est aucunement historique mais morale, « Trains étroitement surveillés » offrant une réponse cinglante à l’agélaste Zednicek : « Savez-vous ce que sont les Tchèques ? Des brutes qui ricanent. » Le film de Menzel offre une autre voie, poétique, légère, faite de désengagement et de licence : la grande Histoire nous condamne, Tchécoslovaques, mais notre recherche du bonheur n’a rien de ridicule, elle suit des incertitudes, elle commence à saisir des abysses qu’il faut nous laisser le temps de creuser, à notre sauce.


    J’avais promis une image iconique du cinéma tchèque. spoiler: Dans une belle séquence, le sous-chef de gare Ladislav Hubička s’amuse avec une télégraphiste simplette, suggérant cache-cache, « Pigeon vole » et autres jeux innocents… dévidant le fil de l’innocence, l’idée saugrenue mais consentie vient au jouisseur de tamponner le magnifique postérieur de la télégraphiste avec un sigle de gare allemand. Voilà ce que fait un Tchèque du poids de l’Histoire, et c’est une idée sublime ! Le procès kafkaïen (référence obligée, hélas) qui s’ensuit ne fera que développer, pompeusement, le masochisme tchèque, forcé à l’aveu, à partir de situations légères et plaisantes, inhérentes à leur manière de saisir le monde. Ce tamponnage de fesse, création cinématographique à part entière, est donc le véritable acte de résistance du film et le chant de liberté de tout un peuple.


    « Trains étroitement surveillés », malgré certaines faiblesses, a le charme des premières fois, d’une initiation de concert du réalisateur et du personnage, dégagée de toute pesanteur didactique intentionnelle, laissant le champ libre à une ouverture, à une disponibilité aux possibilités et aux trouvailles les plus surprenantes. Parfois complaisant dans sa vanité et sa légèreté, le film trouve cependant par là-même l’essence du peuple tchèque et il ne le fait que par des moyens proprement cinématographiques. La difficulté à juger un tel film vient de divers malentendus, notamment celui d’un crédit surprenant dans l’histoire du cinéma, comme un rattrapage un peu maladroit de la place en marge du peuple tchèque dans la grande Histoire. Récompensé en 1968, en pleine Guerre Froide, d’un Oscar du meilleur film en langue étrangère, le soupçon pèsera cependant toujours sur la pertinence de cette reconnaissance : alors qu’Andreï Tarkovski crée ses premiers chefs-d’œuvre, comment ne pas y voir avant tout une intention politique américaine, un encouragement à la résistance tchécoslovaque et au printemps de Prague ? L’épopée tragi-comique de Jára Cimrman devait-elle s’achever sur une reconnaissance nimbée de doutes ? Au fond, n’attribuons pas à « Trains étroitement surveillés » un orgueil « artistique » qu’il ne saurait soutenir. Ce n’est pas un grand film porteur d’un message universel de paix et de démocratie, lecture selon laquelle il deviendrait détestable, plutôt un essai cinématographique imparfait, fait de tâtonnements heureux, qui par un hasard merveilleux retrouve l’âme de tout un peuple. spoiler: Et sa place dans l’histoire du cinéma doit se juger, et c’est déjà beaucoup, à l’aune d’un merveilleux tamponnage de fesse.
    In Ciné Veritas
    In Ciné Veritas

    80 abonnés 922 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 1 octobre 2020
    Jirí Menzel livrait en 1966 son premier long-métrage sous le titre Trains étroitement surveillés. Un coup de maître puisqu’en 1968 le cinéaste se vît décerner l’oscar du meilleur film en langue étrangère pour cette primo réalisation singulière et poétique. A ces deux caractéristiques ajoutons celles portées par une narration libre et franche. Ces éléments ont permis à Menzel d’être immédiatement reconnu comme cinéaste majeur de la Nouvelle Vague tchécoslovaque aux côtés de Milos Forman ou Ivan Passer. Critique complète sur incineveritasblog.wordpress.com/2020/10/01/trains-etroitement-surveilles/
    Fabien N.
    Fabien N.

    5 abonnés 56 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 9 mars 2022
    Le jeune Milos, cheminot débutant dans la République Tchèque annexée ne sait comment satisfaire sa petite amie. Il cherche qui va pouvoir l'aider. Mais la guerre rode...
    Le film est de toute beauté, porté par la grâce fragile du personnage, la verve de ses collègues, oscillant entre légèreté et gravité, jusqu'au sacrifice.
    Pierre D.
    Pierre D.

    12 critiques Suivre son activité

    5,0
    Publiée le 12 novembre 2014
    Ce film est un monument. Tout le génie de Menzel s'y trouve! Cette ressortie en copie restaurée est une aubaine.
    Vivement une intégrale Menzel en salle.
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