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    Deauville 2014 - Jour 3 : le Chef Jon Favreau régale
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    Retour en cuisine pour Deauville, avec la présentation du "#Chef" de Jon Favreau, et suite de la compétition avec "Cold in July" de Jim Mickle. Sans oublier de parler de cinéma américain avec l'un des membres du jury.

    Après Les Recettes du bonheur samedi, Deauville offre le deuxième service avec #Chef et son réalisateur Jon Favreau. Pour ceux qui préfèrent manger froid, Jim Mickle présentait son quatrième long métrage, Cold in July. Sinon Jean-Pierre Jeunet nous parle de cinéma américain et de ses projets. Ce qu'il ne fallait pas manquer de cette troisième journée du Festival 2014, c'est maintenant.

    Le film du jour

    Sony Pictures Releasing France

    #Chef de et avec Jon Favreau - Avec aussi Sofia Vergara, John Leguizamo… - Avant-première - Sortie le 29 octobre

    On l'avait laissé chez Iron Man : acteur et réalisateur des deux premiers épisodes, puis simple comédien dans le troisième volet, où il manquait d'y rester. Aujourd'hui, c'est derrière les fourneaux que l'on retrouve Jon Favreau grâce à #Chef. Écrit, produit, mis en scène et interprété par ses soins, le film nous emmène dans les coulisses d'un grand restaurant, puis à l'arrière d'un food-truck, en compagnie d'un chef qui a décidé de rendre son tablier plutôt que de compromettre son intégrité artistique en suivant les directives de son patron.

    Feel-good movie sympathique malgré quelques passages un peu convenus, #Chef, à l'instar d'un bon plat, possède une deuxième couche des plus intéressantes : il est en effet impossible de ne pas voir un aspect autobiographique dans ce long métrage. Si vous remplacez le chef du titre et le restraurant par un réalisateur et un grand studio, et certaines scènes n'en seront que plus savoureuses. Sans amertume ni règlement de compte pour autant, puisque Jon Favreau, avec sa bonhommie habituelle, reste positif de bout-en-bout. Et donne sacrément faim lors des nombreuses séquences qui le montrent en cuisine.

    Étaient également présentés :

    BSM Studio

    Cold in July (Compétition) - Il y a pile un an, Jim Mickle divisait la salle du C.I.D. avec We Are What We Are, film d'horreur doté d'une fin surprenante. De retour pour cette 40ème édition, il s'est vu réserver un accueil un peu plus uniforme (et positif) à l'issue de la projection de Cold in July. Un polar très 80's qui convoque coupe mulet et synthé, mais aussi la noirceur, la violence et l'humour qui caractérisent son cinéma.

    Alternant les tons, le quatrième long métrage du réalisateur plonge Michael 'Dexter' C. Hall dans un engrenage à la suite d'un acte de légitime défense, et en profite pour tacler la libre circulation des armes au Texas. Inquiétant lorsque Sam Shepard est dans les parages, rock'n'roll quand Don Johnson occupe le devant de la scène, le récit prend son temps pour avancer et dénouer les noeuds d'un mystère dans lequel les méchants ne sont pas ceux que l'on croit, jusqu'à l'explosion finale. Après l'horreur, Jim Mickle prouve donc qu'il est aussi doué pour le polar.

    Things People Do (Compétition) - Si le week-end était culinaire à Deauville, la journée de dimanche était vouée au thriller en compétition. Après Juillet de sang, Things People Do s'attaque lui aussi au genre, avec la même actrice (Vinessa Shaw, épouse de Michael C. Hall chez Jim Mickle) mais un enthousiasme nettement moindre, puisque beaucoup évoquent leur ennui face au long métrage, malgré les quelques idées qu'il contient.

    Land Ho ! (Avant-première) - Enfin direction l'Islande pour l'autre avant-première du jour : si la concurrence de la masterclass de John McTiernan, calée au même moment, a nui au taux de remplissage de la salle, les quelques spectateurs présents semblent avoir été séduits par la beauté de ses décors.

    La star du jour

    Maximilien Pierrette / AlloCiné

    Jon Favreau n'est peut-être pas le plus connu des réalisateurs, mais la sympathie qu'il suscite est indéniable et suffisante pour faire de lui la star de ce dimanche deauvillais. Très loin des Iron Man, ou même de Cowboys & Envahisseurs, le metteur en scène fait ici un retour remarqué vers le cinéma indépendant, que les spectateurs semblent avoir apprécié comme l'ont prouvé les rires fréquents pendant la projection, et les applaudissements à son issue.

    Avec ce "taste-good movie" (expression signée Favreau à notre micro et que l'on pourrait traduire par "feel-goût movie"), le metteur en scène a ainsi pu se rendre en France pour "vous montrer ce que nous faisons aux États-Unis avec votre cuisine", comme il l'a expliqué sur scène. Et pour se faire, il n'a pas lésiné sur les moyens : "Je me suis entraîné pour devenir chef en vue du rôle", nous raconte-t-il. "C'est ce qui est amusant lorsque l'on est acteur : vous pouvez apprendre auprès de gens des techiques que vous garderez pour toujours."

    Ce afin d'aborder un sujet qui le passionne depuis longtemps : "la culture de la cuisine et du chef aux États-Unis", qu'il juge "très cinématographique."

    Au micro

    Maximilien Pierrette / AlloCiné

    Outre la cuisine, Jon Favreau a également évoqué l'un des sujets sous-jacents de #Chef : sa propre histoire. Mais en assurant que le long métrage n'était pas une façon déguisée de vider son sac. "Je comprends pourquoi les gens pensent ça", nous dit-il. "Mais je pense que je suis très différent de [mon personnage], car il arrête de travailler dans un grand restaurant, alors que moi je vais bientôt faire Le Livre de la Jungle et que j'aime bosser sur des gros projets (...) J'aime aborder différents types de films, et #Chef m'a permis de respirer."

    "J'ai cependant été toujours chanceux par rapport aux critiques", poursuit-il. "J'ai été traité de façon juste alors que mon personnage dans #Chef a le sentiment d'être une victime. Moi je n'ai jamais pensé ça dans ma carrière."

    Juillet de sang, septembre de… ?

    Dans un tout autre registre, Jim Mickle a fait son grand retour sur les planches, un an tout juste après la présentation mouvementée de We Are What We Are, pour présenter son Cold in July, accueilli un peu plus calmement : "Que c'était ennuyeux", nous déclare en riant un réalisateur qui s'estime lui aussi "plus détendu" que l'an dernier, dans la mesure où il avait débarqué en Normandie juste après la dernière prise de vue de ce thriller, dans lequel il évoque notamment le port d'armes aux États-Unis.

    Lorsqu'il a découvert et acquis les droits du roman de Joe R. Lansdale, Mickle venait de finir son premier long métrage, Mulberry Street. Mais il lui aura fallu attendre un peu avant de le porter à l'écran, ce qui lui a laissé le temps de se rapprocher un peu du personnage : "À l'époque, je ne possédais pas d'arme à feu, donc je me sentais un peu étranger au sujet. Mais j'ai fini par en avoir un peu avant le tournage (...) Une marmotte dévorait les légumes de mon jardin, et je suis allé acheter un piège. Mais le vendeur m'a dit qu'il fallait l'abattre donc j'ai acheté une arme."

    La pire expérience de ma vie

    "Je me suis dit que c'était une super opportunité au moment de faire Cold in July. Je l'ai donc achetée et j'ai appris comment m'en servir, les règles de sécurité, et un mois avant le tournage, j'ai pris la marmotte sur le fait donc je l'ai tuée et ça a été la pire expérience de ma vie (rires) Depuis je l'ai rangée et je ne l'ai plus utilisée, mais j'ai raconté l'histoire à Michael [C. Hall] en lui disant que c'était, à plus petit échelle, ce que son personnage traversait."

    Pour ce qui est de la coupe mulet du héros, l'idée vient aussi bien de l'époque du récit (les années 80) que de Michael C. Hall, afin d'avoir un look le plus éloigné possible de celui de Dexter, dont il venait tout juste de boucler le tournage.

    Enfin la phrase du jour, on la doit à John McTiernan pendant sa longue masterclass : "Toutes ces théories sur la place de la caméra me dépassent, posez la caméra sur une chaise et filmez tout simplement."

    Parole de juré

    Maximilien Pierrette / AlloCiné

    Être au Festival de Deauville, c'est l'occasion de voir des films bien sûr, de rencontrer ceux qui les ont faits, mais aussi de discuter avec les membres du jury. Quasi-intégralement composée d'anciens présidents, la fournée 2014 comprend notamment Jean-Pierre Jeunet, premier à répondre à nos questions autour d'un cinéma américain qu'il connaît pour l'avoir vu de près.

    Le film que vous aviez récompensé en tant que président

    The Messenger d'Oren Movermann

    "Il était terriblement dramatique car c'est l'histoire de deux messagers qui vont annoncer la mort des soldats en Irak, à leurs parents ou à leurs familles. Donc c'est terrible, mais le film n'est jamais sorti alors qu'il avait aussi eu le Prix de la Critique : c'est rare que les critiques soient d'accord avec les metteurs en scène. Pour une fois il fallait le signaler."

    L'état du cinéma américain

    "Le cinéma américain est de plus en plus tourné vers le profit. Quand j'ai fait Alien, on m'a dit qu'on était la deuxième industrie d'exportation après l'armement, et qu'il faut donc que ça marche pour tout le monde, y compris le spectateur le plus stupide. Aujourd'hui c'est encore pire mais j'ai eu pas mal de libertés quand j'ai fait Alien. Je m'en rends compte aujourd'hui, même si j'ai eu à me battre pour le montage, car tout ce que j'entend, c'est terrible."

    J'ai un rapport amour/haine avec le cinéma américain

    Le cinéma américain et vous

    "J'ai un rapport amour/haine avec le cinéma américain : j'ai fait un film chez eux, et un autre qui se passe là-bas mais qui es franco-canadien [T.S. Spivet, ndlr], pour éviter d'avoir à faire aux Américains. Mais on ne les évite jamais car Gaumont l'a vendu à M. Harvey Weinstein qui veut le remonter, question de principe et de pouvoir, comme tous les films qu'il distribue. Mais moi je m'y oppose, car j'ai la loi avec moi, donc pour me punir il ne sort pas le film (...) Il avait déjà essayé avec Delicatessen et Amélie, donc ça n'est pas nouveau. Mais là, malgré le contrat… Il se torche avec les contrats."

    Un film américain que vous adorez

    "Il n'y en a pas qu'un : Le Parrain, comme tout le monde, La Nuit du chasseur comme tout le monde et Citizen Kane comme tout le monde. Je rajouterais aussi Will Hunting, qui n'est pas un grand film mais que j'adore. Et puis je n'ai pas cité Scorsese, mais il y a Taxi Driver, Raging Bull. Et puis il y a Apocalypse Now. Et Conversation secrète."

    Un réalisateur que vous adorez

    "Scorsese, Coppola. C'est les principaux pour moi."

    VISU

    Un film que vous êtes le seul à ne pas aimer

    "Y a tous les films d'un certain Wes Anderson : on le compare souvent à moi car il fait des trucs graphiques, et j'essaye à chaque fois, mais je n'arrive jamais au bout. Ça me torpille d'ennui et je ne sais pas de quoi il parle. Je fais pourtant l'effort, mais je ne comprends pas même si je reconnais que c'est beau."

    Un film que vous êtes le seul à aimer

    "J'ai une grande affection pour un film qui a été oublié et qui s'appelle L'Homme qui rétrécit. Mais c'est surtout parce qu'il a été oublié."

    Vos projets

    "J'en ai trois ou quatre en ce moment : j'écris un truc sur l'intelligence artificielle avec Guillaume Laurant [son co-scénariste d'Amélie ou Un long dimanche de fiançailles, ndlr] et sous forme de comédie ; plus un projet d'animation avec Laurent Witz qui a gagné l'Oscar du Meilleur Court Métrage d'Animation cette année avec Mr Hublot. Il voudrait faire son film avec moi donc voilà. Plus je suis en train de ramasser tous mes souvenirs de cinéma mais je ne sais pas ce que je vais en faire : des modules sur internet ou peut-être un film. Je n'en sais rien mais je me sens libéré avec ça car c'est comme si je refaisais mes premiers courts métrages. Ce sera auto-produit, avec une liberté totale, et j'ai des centaines d'idées ludiques, toutes marrantes."

    "Et j'ai récemment remarqué ce que j'appelle "Syndrome Mona Lisa", c'est-à-dire que quand on va au Louvre, tout le monde regarde la Joconde parce que c'est connu. Dans le cinéma c'est pareil : on aime bien aller voir des sujets que l'on connait car il y a tellement de films par semaine que le spectateurs, comme ça coûte cher, est rassuré de voir un sujet qu'il connaît déjà. Donc j'ai trouvé un sujet que j'adore sur un personnage très connu, déjà abordé souvent au cinéma, et ça m'exciterait d'en refaire un autre, même si ça coûterait très cher. J'ai vingt pages qui m'ont été proposées par deux auteurs, et je vais voir si ça séduirait les financiers."

    Le réalisateur n'a en revanche pas voulu dévoiler le nom de ce mystérieux personnage. Il nous a également confié être de plus en plus fan de séries (Breaking Bad et True Detective notamment), mais ne pas avoir prévu de s'y essayer prochainement.

    Ça tweete sur les planches

    Et sinon…

    • Au lendemain de sa projection à Deauville, Jean-Pierre Jeunet nous a révélé qu'il avait été approché pour réaliser Les Recettes du bonheur. Un poste qu'il a refusé sur les conseils de sa femme qui, après avoir lu le scénario, lui a dit "Si tu fais ça, je divorce !"
    • La Villa Cartier s'était mise aux couleurs de #Chef en ce dimanche 7 septembre. Il faut dire qu'il était difficile de ne pas exploiter le food truck présent sur le lieu à cette occasion.
    Maximilien Pierrette / AlloCiné
    • Enfin John McTiernan a projet qu'il pourrait tourner très bientôt. Mais ça on en reparle demain, à l'occasion de son hommage.

    Demain toujours, vous aurez rendez-vous avec Kristen Stewart à Guantanamo, la suite de la compétition et un autre membre du jury au micro.

    La bande-annonce de "#Chef" :

    Chef, oui chef

    Jon Favreau

    Cold in September ?

    Jim Mickle, réalisateur de Cold in July

    Après la compétition…

    … l'avant-première de #Chef pour Saar Klein, réalisateur de Things People Do

    Clara Sheller à Deauville

    Zoé Félix

    Huppert's Girl

    Lolita Chammah

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