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    Ad Astra
    Ad Astra
    4,0
    Publiée le 17 novembre 2021
    Il apprécie la diversité, nous autres spectateurs également. Et pourtant, James Gray se revendique comme un auteur, qui explore souvent les mêmes thèmes, à savoir les dilemmes familiaux. Il commence par aborder la fratrie (Little Odessa, The Yards, La Nuit Nous Appartient, The Immigrant). Il bascule ensuite vers la relation de couple (Two Lovers) avant de poursuivre avec la relation père-fils, ou encore l’héritage de l’humanité dans l’inconnu (The Lost City Of Z). Il se rapproche ainsi de sa dernière œuvre, mais n’use plus d’un climat mafieux ou historique. Il cherche un souffle plus épique dans la science-fiction et réussit son pari. Il déverse de la psychanalyse en abondance, qui rappelle sans effort un « Apocalypse Now » en orbite. L’odyssée d’un homme devient existentielle et ce dernier devrait se confronter à lui-même, au bout d’un parcours Freudien.

    Roy McBride, incarné par un Brad Pitt serein et toujours doté de con charisme légendaire, est mis dos au mur. Il touche le fond dans une entrée en matière, frisant les hautes sensations de la mélancolie. D’entrée, on ne nous cache rien, si ce n’est la mission confuse qui le ramènerait à son père Clifford (Tommy Lee Jones), héros national sur le papier. On comprend rapidement un sentiment de solitude, qui nous traversera le long d’un périple, non sans danger. La mise en scène sert d’ailleurs magnifiquement ce détail. On nous projette dans le scaphandre avec une telle facilité, qu’on se fait entraîner à l’intérieur de l’esprit de Roy. Mais l’astuce abuse parfois de ces voix-off, qu’on l’on préférerait absente lorsqu’il est trop explicatif. Le spectateur n’est pas toujours baby-sitter tout le long du voyage, mais ces voix peuvent en garder certains à la surface du projet, en brouillant les lignes sur les multiples couches de lecture possible.

    Par ailleurs, ce film souligne ce qui fait défaut à notre espèce, encore primitif. Les hommes ne sont pas préparés mentalement ou sentimentalement afin de coexister dans un environnement plus hostile que la Terre, d’où les échecs d’explorations que l’on mentionne avec parcimonie. Le problème est déplacé, que ce soit ici ou là-haut. Roy le démontre à travers les obstacles qu’il rencontre, rappelant ainsi le parcours hasardeux de son père. Mais il reste l’ombre de cette figure, qu’il admire et qu’il attend. Mais attendre, ce n’est pas avancé. Il se doit donc d’explorer son cocon émotionnel afin d’agir. On traite ici deux facettes du personnage, le premier dépourvu de sentiment, car cela permet de garder le contrôle sur ce qui l’entoure. Mais lorsque l’on commence à douter ou à avoir peur, c’est le vide qui s’empare de nous et de tout ce qu’on connaît. Les repères restent derrière nous et le spectateur lui-même devrait se doter des compétences d’explorateur aguerri pour sortir guéri de ce voyage funambulisé.

    L’exploration est caractéristique de l’Homme et de ses ambitions les plus profonds. Le pas vers l’avenir semble inévitable, mais Gray pose tout de même un frein considérable sur les conquêtes qui nous déchirent de l’intérieur. Bien qu’il ne puisse s’agir que d’un support pour lancer « Ad Astra » (« Vers les étoiles »), il n’optera que pour la face pessimiste, qui ne rime pas avec le lot de nuances et des cohérences sentimentales dans sa globalité, du moins cela ne sonne pas toujours juste. Mais pour ce qui est du voyage personnel, intime et décalé, il est évident que l’espace reste le territoire de jeu idéal pour se confronter à la perspective même des limites de soi, tout en flirtant entre la vie et la mort.
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