Intolérance, misogynie, homophobie, poids du regard social et amour plus fort que tout (ou presque), sur fond de petite musique commémorative rappelant que le présent n’en a pas fini avec ces fléaux : rien ne manque à ce catalogue (télé)filmé des paradoxes de la raison et de la passion.
Loin de la philosophie qu’il prétend enseigner, Wenders propose deux heures d’escapism dans un Japon fantasmé, où les dominés seraient bien culottés de se plaindre.
Bas les masques : la pièce importe peu, les comédiennes s’appellent par leur véritable prénom, et ce qui s’essaie, ce qui se répète au cours de cette parenthèse bucolique, c’est une coïncidence à la fois plus intime et plus frontale, de soi à soi, nourrie de matière documentaire.
Le projet achoppe sur ce défilé démonstratif de visages absorbés : la possibilité d’une résonance entre les personnages se fracasse sur un mur d’interfaces de smartphones.
Contre le sentiment de continuité qui irrigue toute vie, cette croissance progressive qui fait que l’on change sans savoir, Mandico reconstitue toute la barbarie du coming of age : la violence du reniement, l’oubli plus ou moins décidé de ses convictions d’autrefois, la versatilité cynique où chaque âge a ses raisons et tout pouvoir de trahir son passé.
S’il est bien question de récit d’aprentissage, d’ascension sociale et de transgression, la vision quasi dystopique d’un monde du travail déshumanisé [...] finissent par interroger. En quoi ce monde de la finance [...] est-il si tentant ?
Par sa manière tranquille de faire entendre la colère et la désillusion sans jamais céder au catastrophisme, et sa troublante attention aux signes d’un désastre ici presque invisible, La Rivière est autrement plus convaincant.
Face à Virginie Efira, dont le jeu, entre ébahissement et révolte maternelle, fascine par sa capacité à faire surgir la violence de l’accablement du quotidien, se tient une non-moins étonnante India Hair dont la candeur habituelle, en un quasi-contre-emploi, s’accommode de l’intransigeance pavée de bonnes intentions de son personnage d’assistante sociale.
De ces dessins volontairement naïfs émanent souvent inquiétudes et douleur. Les traces persistantes de crayon et de gomme apparaissent comme le sillon d’un passé dont on ne se dépêtre jamais tout à fait
Vu l’évident rapport autobiographique entre le cinéaste et Koffi, émane de cette surcharge le même sentiment que dans certains albums musicaux : une urgence intime poussant à faire plusieurs gestes en un seul.
[...] Ça passe ? Contre toute attente, oui, l’introduction d’une star dans le dispositif documentaire venant matérialiser la nécessité de la fiction lorsqu’on tente de guérir l’incurable et reconstituer une existence à trous.
Dans la longue traîne des documentaires sur les Gilets Jaunes, de J’veux du soleil de Gilles Perret et François Ruffin à Boum Boum de Laurie Lassalle, le film de Sylvestre Meinzer semble marquer une bascule, l’accompagnement en (quasi-)direct du mouvement cédant la place à la commémoration.
Le cinéaste parvient assurément à créer un climat d’incertitude et d’angoisse, décrivant un monde contaminé par une hyperviolence gratuite, qui détruit l’essence même de la vie en communauté.
L’amitié entre les deux hommes autorise le cinéaste à entrer dans le cadre, et on sent le bonheur qu’il a, lui qui a connu tous les modes de production, y compris ceux du blockbuster hollywoodien, à s’accorder à cet artisanat, mais aussi sa crainte de trop déranger les choses.
Le quotidien est embrassé par un regard amical qui, en investissant des scènes intimes et en accompagnant par-delà l’étape du diplôme ses trois complices, Benjamin Aaron et Nestor, laisse la vie se confondre avec son sujet.
Il ne fait pas de ces éléments réels les sujets d’un film-dossier, mais les constitue plutôt en fond politico-social d’un film hanté par une question plus vaste [...] : comment faire en sorte que les fins puissent aussi être des recommencements, ou les morts des naissances ?
Nous ne sommes pas chez John Waters, ni même chez Étienne Chatiliez, et ce qui rate ici, ne serait-ce que d’un simple point de vue comique, c’est l’incapacité à faire en sorte que le rire dépasse le mépris de classe.