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    "Quantum of Solace" selon Daniel Craig et Marc Forster

    James Bond revient... pour se venger ! Première interview de l'acteur Daniel Craig et de Marc Forster, le réalisateur de "Quantum of Solace", 22ème aventure de l'agent 007...

    L'intention de "Casino Royale" était de rétablir Bond dans une certaine réalité. Quelle est la vôtre avec "Quantum of Solace" ?

    Marc Forster : L'interprétation de Daniel (ndlr : Daniel Craig) dans Casino Royale a inscrit Bond dans un certain réalisme et lui a amené une part d'humanité qui me parle. A la fin de Casino Royale, James Bond est dans un tel état de vulnérabilité, c'est justement ce qui m'intéressait et ouvre de nouveaux horizons pour 007.

    En quoi ce James Bond diffère des précédents ?

    J'avais le sentiment qu'il fallait que je crée ma propre version, ma propre interprétation de James Bond. Visuellement également, une nouvelle approche était nécessaire. Je me suis énormément inspiré des Bond des années soixante et j'ai tenté en même temps de le moderniser. Le film a un look un peu rétro, qui peut rappeler par exemple les décors créés par Ken Adam pour Bons baisers de Russie et Au service secret de sa Majesté. Ce qui est fascinant également, c'est ce choc entre la carapace de Bond et son état de vulnérabilité émotionnelle.

    Et à propos de l'humour, est-il très présent dans "Quantum of Solace" ?

    Bien entendu. C'est un élément important des films de James Bond, qui ne doivent pas se prendre trop au sérieux. Même s'il s'agit dans le cas de Bond d'un équilibre dur à trouver.

    Envisagez-vous de réaliser le prochain James Bond, le 23ème ?

    Barbara Broccoli et Michael G. Wilson me l'ont proposé et je dois avouer que même si Quantum of Solace a été une expérience créative incroyable, je ne veux pas faire un nouveau gros film dans l'immédiat. J'aimerais revenir à quelque chose de plus simple et petit.

    Vous n'aviez pas réalisé de film d'action jusque-là, qu'est-ce qui vous a poussé à passer le pas et à réaliser un film comme "Quantum of Solace" ?

    En réalité, j'ai toujours voulu réaliser un film d'action ! En ce qui concerne Bond, c'est la première fois que je collabore avec un réalisateur de 2ème équipe et également la première fois que je tourne dans autant de décors, tout autour du globe. En même temps, tout s'est fait en douceur, grâce notamment à la fantastique équipe de production. Mais Les Cerfs-volants de Kaboul reste le film le plus dur que j'ai tourné, parce que je n'avais par exemple aucun soutien financier. La production de Bond m'a permis de réaliser la vision que j'avais tête. Pour moi, la phase la plus compliquée pour un film comme Bond, c'est la pré-production, être à tous les endroits au même moment. Je contrôle tout sur un plateau parce que je sais précisément ce que je veux que vous voyez à l'écran. Au final cela a parfois été difficile mais on m'a vraiment permis d'arriver là où je voulais.

    C'est le premier James Bond qui est une suite directe du film précédent, comment avez-vous géré cette contrainte de la continuité ?

    Je ne pense pas que cela soit un désavantage ou un challenge particulier. La vulnérabilité ressentie par Bond est un point de départ intéressant pour Quantum of Solace et cela nous a permis à Daniel et moi d'avoir une idée précise de la direction que nous voulions donner au personnage. Cela nous a permis d'aller encore plus loin, plus en profondeur et également de donner plus d'importance à M (ndlr : interprétée par Judi Dench) que je trouvais vraiment sous-exploitée dans les épisodes précédents. M est la seule femme de l'univers bondien avec laquelle il n'y a aucune tension sexuelle. Judi Dench est une actrice fantastique qui me ferait rêver rien qu'en lisant l'annuaire. Je sentais qu'il fallait lui donner plus d'espace, de scènes, afin notamment de voir Bond face à cette femme si différente et au comportement si singulier.

    Comment avez-vous géré l'héritage de "Casino Royale" ?

    Je n'ai repris que l'état émotionnel dans lequel se trouve Bond dans les 3 dernières minutes de Casino Royale, durant lesquelles Bond perd Vesper. C'est tout ce qui m'intéressait. Tout ce qui s'est passé avant n'avait pas tant d'importance dans le sens où on l'avait déjà vu dans 21 James Bond. Mais ce moment, cet instant où il perd Vesper, l'amour de sa vie, son seul amour, qui m'intéresse et ce qui était important pour Quantum of Solace.

    Pensez-vous que la volonté de faire de Bond un personnage plus sombre et plus complexe peut se faire sans perdre un quelconque aspect du personnage ?

    Le danger de la noirceur est de perdre la légèreté inhérente au personnage, c'est pour cette raison qu'il était nécessaire d'y apporter autant d'humour que possible. C'est la recette pour ne pas se prendre trop au sérieux, mais le risque inverse est d'en faire un film dénué de sens. C'est un équilibre très précaire. Selon moi, il était capital de conserver cet humour, j'espère y être parvenu.

    Comment avez-vous collaboré avec le scénariste Paul Haggis pour "Quantum of Solace" ?

    Nous nous sommes rencontrés pour parler du genre de film que nous voulions faire réellement. Je commençais à peine les repérages, je lui ai donc demandé d'intégrer au scénario les décors et les endroits que je trouvais. Nous avons eu beaucoup de discussions très détaillées. Paul Haggis s'est ensuite mis au scénario mais malheureusement il était trop occupé avec son propre film (ndlr : Dans la vallée d'Elah). Nous avons donc retravaillé avec Daniel son script, qui comportait encore quelques trous et pistes inexplorées. Le travail a été très positif car nous avons des sensibilités proches.

    Quel est votre point de vue sur les gadgets, qui ont pris de plus en plus d'importance au fil des films ?

    J'aime les gadgets mais ils ont perdu un peu de leur impact de nos jours car nous en avons tous ! Ils ne sont donc plus aussi pertinents qu'avant. Le monde est également devenu beaucoup plus complexe qu'il ne l'était lors de la Guerre Froide et ce n'est pas toujours évident de déterminer qui est le bon et qui est le méchant. Il est impossible ou presque de dire qui fait quoi et pour qui. La distinction entre le Bien et le Mal est devenue tellement floue. On ne peut plus créer un grand méchant diabolique tentant de conquérir le monde. Quantum of Solace creuse ce sillon. Un méchant peut en réalité être bon et le gentil faire des choses aussi inacceptables que le méchant.

    Comment s'est passée votre collaboration avec Giancarlo Giannini ?

    Tout simplement fantastique ! C'est une légende et je suis un fan de ses films. C'est aussi un homme drôle, chaleureux et agréable. Giancarlo a un grand coeur et il aime profondément ce qu'il fait. C'est appréciable d'avoir sur le plateau un acteur qui aime autant son métier.

    Avez-vous eu toute lattitude pour présenter dans "Quantum of Solace" votre propre vision de 007 ?

    Oui, j'avais le sentiment qu'il fallait montrer ma vision de James Bond et Barbara Broccoli et Michael G. Wilson m'ont beaucoup soutenu dans cette démarche. J'ai pu travailler avec mon équipe habituelle et créer visuellement le 007 que je voulais. J'ai eu toute la liberté de faire le film que je désirais.

    Propos recueillis par Thomas Destouches le 18 septembre 2008 à Londres

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