Structure narrative classique (une épanadiplose qu'on appelle ça les enfants... non ce n'est pas une maladie !), épanadiplose classique, un peu état des lieux, De Bon Matin est un film éminemment politique et je le traiterais comme tel.
Englué dans un fait divers, il se réduit à l'observation comptable et exhaustive des impacts sociaux du stress professionnel et de la division orchestrée des travailleurs, sans hélas toucher, ni même effleurer cette dernière. Condamnant l'individu à un acte sporadique et tragique, l'auteur de "Violences des échanges en milieu tempéré", dans son cloisonnement, laisserait pratiquement entendre qu'il n'y a d'autres armes que d'être un prédateur isolé, la résignation et la soumission aux prérogatives pour les travailleurs. Alors qu'il y a tout lieu de s'interroger, au-delà de cette préparation minutieuse et réfléchie, sur ce qui provoque cette indifférence froide, sur ce qui asphyxie l'empathie, en tous cas la perte de faculté de liens sociaux. Le film pourtant bien maîtrisé ne prend aucun parti que celle de la compréhension toute iréniste de son protagoniste principal et du contexte dans lequel il évolue : j'en pense que, pour commencer à comprendre, il faut s'aventurer à faire des liens, même fallacieux, au lieu de conclure sottement à l'impuissance, notamment de la médecine du travail ; au lieu d'opérer un flou artistique sur les notions de durabilité, de confiance des échanges sans pointer la précarité.
Il m'est avis que si ce fait divers est plus qu'un fait divers - puisque c'est un film, je veux dire, un art de masse ayant la volonté d'être vu et compris de tous - pourquoi donc faire diversion avec cet humanisme non militant ? Cet humanisme me rappelle l'autrement meilleur "La Question Humaine".
Personnellement, je me sens trahi quand je vois ce type de pruderie oecuménique.
Après quoi, une seule question me tarode : pourquoi n'a-t-on pas fait appel à Christophe Hondelatte pour soigner la B.O. ?