Une adaptation parfaitement réussie d’un livre de l’auteur culte Thomas Pynchon. Une mise en scène brillante, une adaptation de scénario et un découpage qui a su extraire l’essentiel du livre. Une image colorisée et teintée 70’s ,superbe , et surtout une bande son exceptionnelle , mélangeant la musique pop acidulée des années 60 , et une musique originale , envoutante , électrisante , crispante , les deux alternant de manière très intelligente, et qui donne un tempo et un rythme au récit , compensant ainsi la légèreté de l’intrigue principale. L’image est parfois floutée, parfois saturée de couleurs, beaucoup de plans serrés sur les visages qui ajoutent du drama, mais aussi des très beau x plans séquences. Dont le plus beau et le plus érotique, celui où Sascha rentre au bercail et se prépare à faire l’amour à son détective privé préféré, le Doc . Il y a d’abord un effeuillage très sexy, puis Sashta s’allonge sur son Doc et le caresse avec son pied, elle lui avoue l’avoir trompée avec plusieurs hommes (à la fois) . Doc lui administre alors une fessée endiablée, et la prend ensuite avec sauvagerie. 50 fois plus érotique que « 50 nuances de Grey », qui passe alors en comparaison pour un roman de la Comtesse de Ségur, tout cela en un seul plan séquence langoureux et envoutant.
Bien sûr une interprétation magistrale de Joaquin Phoenix , son plus beau rôle , au-delà du délire , en pleine composition frénétique. Le policier Big Foot est aussi superbement interprété par Josh Brolin et bien sûr la délicieuse Katherine Waterson nous joue une Sashta évanescente et écervelée.
Et pourtant le challenge était compliqué car paradoxalement Pynchon , auteur , n’avait jamais été adapté au cinéma et surtout « Inherent Vice » est certainement , son plus mauvais roman , le moins intéressant, à la structure romanesque la plus faible Il ne se passe pas grand-chose , cette enquête est un faux prétexte, pour décrire Los Angles des 60’s et une certaine nostalgie de la fin des années Hippies et du Flower Power . C’est le moins Pynchonien des romans de Pynchon. C’est un livre qu’il avait écrit il y a longtemps, mais ne le trouvant pas très bon, il ne l’avait pas publié. C’est sa femme ( son éditrice) qui le convainc de le publier en 2009 ( elle a donc très bien fait) . Pour découvrir Pynchon je conseillerai de commencer par « V. » , et/ou « Mason & Dixon », et ensuite si l’on a aimé, s’attaquer à «Contre- Jour » , pavé de 1200 pages, très dense , très touffu, une Master piece, probablement le plus grand roman américain de la 2e moitié du 20 siècle. Pynchon est avec Philippe Roth, l’écrivain US majeur de la fin du siècle. Personnage secret, de 78 ans , dont la dernière photo connue remonte à son service militaire , qui vit caché et reclus à Manhattan ,et qui a publié 8 romans (presque tous des chef d’œuvres), sans jamais accordé un interview, ni paraitre dans les medias (juste une apparition dans le cartoon des Simpson , ou il était montré avec un sac sur la tête) . On parle régulièrement de lui pour le Nobel, mais il est bloqué par l’académie qui trouvent ses romans trop « décalés » et pas assez respectueux du politiquement correct,
C’est bien pour cela que le travail de Anderson est remarquable par sa mise en scène audacieuse, esthétisante à souhait, par la beauté et la pureté cinématographique qu’il a su crée, tout en restant fidèle à l’esprit et au style de Pynchon, sublimant et surpassant même l’œuvre originale.