Disons-le d’entrée : sur le seul plan cinématographique, ce film est des plus médiocres. Mais son intérêt est ailleurs. Il raconte, certes de façon édulcorée, la consternante dérive d’une poignée d’illuminés se disant humanitaires qui, faute d’avoir pu rassembler au Tchad les centaines d’ « orphelins en danger de mort » qu’ils prétendaient y trouver, dans le but de les ramener en France pour les faire adopter par des familles qu’avait émues une campagne préalable larmoyante et mensongère, n’ont pas hésité à s’en « procurer » en mentant quand ils le pouvaient ou en achetant des chefs de villages lorsqu’ils ne pouvaient faire autrement.
C’est donc de la piteuse histoire de L’Arche de Zoé qu’il s’agit, dans laquelle tous les aspects sont profondément choquants. Ainsi les gros mensonges servis sans ciller aux collaborateurs africains recrutés sur place : création d’un camp durable pour soigner, éduquer les enfants, jusqu’à leur majorité, alors que l’opération devait être bouclée en un mois, ainsi que son responsable (interprété par Vincent LINDON) ne cesse de le répéter à ses complices. Sur un autre plan, l’obsession de ne retenir (capturer serait plus exact) que des enfants âgés de cinq au plus, car il s’agit moins de les « sauver » que de respecter la commande des familles d’accueil, qui ont payé d’avance pour un produit précis. Ou encore la façon invraisemblable avec laquelle Françoise, la vidéaste, (Valérie DONZELLI) se prend à s’amuser avec un jeune garçon dont personne ne veut se soucier : elle a trouvé une sorte de petit chien - ou un singe savant - avec lequel elle va pouvoir jouer. On n’en finirait pas de dresser un réquisitoire accablant au seul vu du film, et pourtant, la réalité était bien pire, mélange d’arrogance et d’infantilisme, de grands sentiments et de trafic d’êtres humains, de pseudo-compassion et de mépris pour les africains, le tout baignant dans une délicieuse odeur d’argent. Grâce à la politique qui s’en est fâcheusement mêlée, les sanctions encourues et, au départ, prononcées contre les chefs de cette bande, n’ont pas été appliquées. Hélas, le film n’en dit rien, pas plus qu’il ne démonte les travers fréquents de l’action humanitaire : devoir d’ingérence, priorité du milieu éducatif sur le milieu familial, transgression généralisée des principes, des lois, des coutumes, au nom d’une prétendue bonne cause. A quand donc une suite à ces Chevaliers blancs ?